PERSPECTIVES DES RETRAITES DES
MILITAIRES
M. le président. La parole
est à M. Thierry Mariani, pour exposer sa question, n° 396, relative
aux perspectives des retraites des militaires.
M. Thierry Mariani. Madame
la ministre de la défense, ma question porte sur l'avenir des retraites des
militaires. Alors que ce matin, comme depuis plus de trois semaines,
certains se font entendre bruyamment, voire abusivement, prenant chaque jour un
peu plus en otage une partie de la population, d'autres, par tradition, par
respect des services publics, par obligation ou parce que leur conception de la
République et de la France les y poussent, restent dans le silence : les
militaires.
En dix ans, l'armée
française a connu la plus grande « révolution » de son histoire. Sa
professionnalisation, décidée en 1996 par le Président de la République, s'est
accompagnée de bouleversements et de restructurations considérables. Le
gouvernement socialiste n'a pas pris la mesure de ce défi, et, aujourd'hui,
c'est à vous qu'il revient d'organiser avec efficacité le redressement de
l'effort de défense de la France et de rassurer ainsi les personnels
militaires.
La réserve et la
discrétion des militaires ne doivent cependant pas faire oublier qu'ils sont eux
aussi des citoyens et qu'ils sont, à ce titre, inquiets pour l'avenir de leur
régime de retraite. Prêts à risquer leur vie pour la France, à quitter leur
famille pour défendre les Français et les valeurs chères à notre République, les
militaires ont besoin que soient pris en compte, au moment du calcul de leurs
pensions, les spécificités de leur engagement, les risques de leurs missions,
les exigences physiques et morales de leur métier.
Parce que défendre la France n'est
pas - et ne sera jamais - un métier comme un autre, ils attendent aujourd'hui
d'être rassurés sur leur avenir. Pour que, comme le souhaite le Président de la
République, soit confortée, « dans toutes les unités, la fierté légitime que les
militaires français, quels que soient leur grade ou leur fonction, retirent de
l'exercice de leur beau métier », les militaires ne doivent pas être oubliés en
ces temps de réforme.
Madame la
ministre, même si, alors que d'autres en abusent, les militaires ne pratiquent
pas la contestation préventive, ils attendent du Gouvernement qu'il leur dise si
leur régime de retraite sera réformé, s'il entendra leur inquiétude, et si
l'Etat, par ce biais, leur témoignera la reconnaissance qu'ils méritent.
M.
René André. Excellente question !
M. le président. La parole
est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. Monsieur le député,
je sais tout l'intérêt que vous portez aux militaires. Soyez assuré que le mien
n'est pas moindre. Depuis plusieurs mois, j'essaie d'être le plus possible à
leur écoute sur la question des retraites, parce qu'ils accomplissent en effet
un travail essentiel pour la survie et le rayonnement de la France et parce
qu'ils font la preuve de leur sens de l'Etat et du service public.
C'est ainsi que je leur avais
indiqué, lors de la réunion du conseil supérieur de la fonction militaire du
mois de décembre, qu'ils seraient sans nul doute appelés à participer, comme
l'ensemble des Français, aux mesures destinées à sauvegarder les régimes de
retraite. Mais je m'étais également engagée à faire en sorte que les contraintes
et les sujétions particulières liées à l'exercice de leur mission soient prises
en compte. J'ai donc rappelé, lors des discussions interministérielles, que les
nécessités opérationnelles et le principe de jeunesse imposent aux militaires
des limites d'âge relativement basses et, dans un certain nombre de cas, des
carrières courtes.
Toutes ces
préoccupations ont été intégrées. J'ai réuni, il y a à peine quinze jours,
l'ensemble des instances de concertation avant l'adoption définitive du projet
par le Gouvernement, et je puis vous indiquer que le conseil supérieur de la
fonction militaire a rendu un avis dans lequel il estime avoir été entendu.
Cela signifie d'abord que le projet
de loi se traduit par une juste participation des militaires à l'effort
collectif, comme je le leur avais dit et comme ils ne le contestent nullement,
parce qu'ils ont justement, eux, le sens de l'intérêt général. Comme tous les
autres agents publics, ils devront donc cotiser plus longtemps pour pouvoir
prétendre à une retraite à taux plein. Comme tous les autres citoyens, ils
rentreront dans le dispositif de la décote.
Pour autant, les spécificités
militaires ont été préservées à travers le maintien ou la création de
dispositifs dérogatoires. Ainsi, le système de bonifications d'annuités, qui
traduit la reconnaissance du risque encouru, que vous avez rappelé, et de la
pénibilité, a été préservé.
Par
ailleurs, le principe des retraites à jouissance immédiate et la possibilité de
cumuler la pension avec un nouvel emploi, qui répondent à la nécessité, pour
plus de la moitié des militaires, de se reconvertir dans de bonnes conditions,
puisqu'ils partent tôt, ont été maintenus.
Enfin, le dispositif de la décote a
été adapté. Il incite les militaires pensionnés s'orientant vers une carrière
courte à servir deux années et demie au-delà du temps d'activité ouvrant droit à
la retraite à jouissance immédiate, laquelle reste néanmoins possible après
15 ans pour les non-officiers et 25 ans pour les officiers.
La spécificité des militaires
effectuant une carrière longue a également été prise en compte.
En conséquence, et même si nous
avons dû faire un gros effort de communication - les militaires, comme bon
nombre d'entre nous, éprouvant quelques difficultés à se retrouver dans des
textes passablement complexes -, j'estime que la réforme appliquée aux
militaires est juste, équilibrée et que les spécificités sur lesquelles je
m'étais engagée ont été respectées.
Hier, alors que je me trouvais à
Barhein, je suis montée à bord de l'un de nos navires, La Marne qui vient
d'effectuer un grand périple dans l'océan Indien. Et je puis vous indiquer que
les militaires de tous grades avec lesquels j'ai longuement discuté estiment
avoir été entendus et disposer d'un système d'information qui leur permet de
comprendre très précisément les mesures qui leur seront appliquées, ce qui les
rassure.
M. le président. La
parole est à M. Thierry Mariani.
M. Thierry Mariani.
Madame la ministre, je tiens à vous remercier tout d'abord d'avoir tenu à
répondre personnellement à cette question. Votre présence ici, ce matin, en
dépit des aléas de votre emploi du temps, témoigne en effet de l'intérêt que
vous portez aux militaires et à leur avenir, s'agissant notamment de leur
retraite. Je vous remercie également pour les informations que vous nous avez
communiquées et qui feront chaud au coeur des militaires. Elles montrent qu'ils
participent, comme vous l'avez dit, à l'effort de solidarité mais aussi que les
spécificités de leur mission et de leurs carrières ont été retenues. Je pense
que la réforme qui leur sera présentée leur donnera entière satisfaction.