FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 404  de  M.   Bacquet Jean-Paul ( Socialiste - Puy-de-Dôme ) QOSD
Ministère interrogé :  écologie
Ministère attributaire :  écologie
Question publiée au JO le :  09/06/2003  page :  4335
Réponse publiée au JO le :  11/06/2003  page :  4895
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  boues
Analyse :  utilisation. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Jean-Paul Bacquet interroge Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur les efforts très importants réalisés par les communes en matière d'assainissement, pour se conformer à la législation européenne qui interviendra à compter de 2005 ; cela représente un coût financier très lourd, transféré pour partie sur une taxe d'assainissement, étant donné l'importance du montant de l'investissement par rapport au nombre d'habitants desservis. Aujourd'hui, les communes sont confrontées à un problème particulièrement aigu. En effet, les boues de station d'épuration étaient utilisées en valorisation agricole, mais le principe de précaution, faisant suite aux différentes crises sanitaires agricoles, fait que les agriculteurs refusent désormais l'utilisation de ces boues. Il s'agit en définitive, non pas d'une volonté délibérée des agriculteurs, mais de l'obligation qui leur est faite, par les centrales d'achats ou les coopératives agricoles, de garantir des productions sans boues d'épuration. Cette situation pénalise lourdement les collectivités locales, qui n'ont à ce jour aucune solution de remplacement. Il lui demande ce que l'on peut proposer aux communes pour le traitement de leurs boues d'épuration qui financera les nouveaux coûts induits et s'il existe une certitude scientifique quant au risque d'utilisation des boues d'épuration en valorisation agricole.
Texte de la REPONSE :

UTILISATION AGRICOLE DES BOUES D'ÉPURATION

    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour exposer la question, n° 404, de M. Jean-Paul Bacquet relative à l'utilisation agricole des boues d'épuration.
    M. Jean-Pierre Dufau. Madame la présidente, M. Bacquet, retardé par des embouteillages, m'a demandé de poser sa question à sa place, ce que je fais avec d'autant plus de plaisir qu'elle est essentielle.
    Madame la ministre de l'écologie et du développement durable, les communes et, en particulier, les petites communes ont consenti des efforts très importants ces dernières années en matière d'assainissement pour se conformer à la législation européenne qui entrera en vigueur à compter de 2005. Comme vous le savez, cela représente un coût financier très lourd, transféré pour partie sur une taxe d'assainissement, étant donné l'importance du montant de l'investissement par rapport au nombre d'habitants desservis. Aujourd'hui, les communes sont confrontées à un problème particulièrement aigu. En effet, les boues de station d'épuration étaient utilisées en valorisation agricole mais, en vertu du principe de précaution découlant des différentes crises sanitaires agricoles, les agriculteurs refusent désormais l'utilisation de ces boues. Il s'agit, en définitive, non pas d'une volonté délibérée des agriculteurs, mais de l'obligation qui leur est faite par les centrales d'achats ou les coopératives agricoles de garantir des productions sans boues d'épuration. Cette situation pénalise lourdement les collectivités locales qui n'ont, à ce jour, aucune solution de remplacement.
    Madame la ministre, que peut-on proposer aux communes pour le traitement de leurs boues d'épuration ? Qui financera les nouveaux coûts induits ? Existe-t-il, enfin, une certitude scientifique quant aux risques d'utilisation des boues d'épuration en valorisation agricole ?
    Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.
    Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable. Vous voudrez bien, monsieur Dufau, remercier M. Bacquet de sa question très importante, qui attire l'attention sur les difficultés que peuvent rencontrer les communes pour valoriser en agriculture les boues issues du traitement des eaux usées urbaines en raison de la réticence de certains agriculteurs.
    La question de l'épandage agricole des boues a fait l'objet de nombreux débats. Cette filière est une voie de valorisation des sous-produits de l'assainissement, pratiquée depuis de nombreuses décennies. Aujourd'hui, les deux tiers des boues urbaines sont valorisées par cette filière et 12 % des boues sont incinérées.
    L'épandage des boues, s'il est réalisé dans de bonnes conditions, constitue le débouché le plus intéressant pour la valorisation des boues, d'un point de vue tant environnemental qu'économique, les boues contenant des nutriments directement utilisables pour les cultures et servant d'amendements organiques et calciques pour améliorer les propriétés physiques et chimiques du sol, en particulier, si elles sont chaulées. La valorisation des boues par épandage est satisfaisante pour les agriculteurs, pour les collectivités et pour la protection de l'environnement et demeure la filière de destination des boues à privilégier.
    Afin de conforter cette filière en apportant les garanties nécessaires d'innocuité et de bonne pratique, les règles applicables à ces épandages sont encadrées par une réglementation rigoureuse mise à jour récemment : le décret du 8 décembre 1997 et l'arrêté du 8 janvier 1998 répondent à cet objectif. Ces textes réglementaires soumettent l'épandage des boues des stations de plus de 200 équivalents habitants à une procédure, au titre de la loi sur l'eau, de déclaration ou d'autorisation en fonction de la quantité des boues produites. La procédure d'autorisation conduit à une enquête publique et à une consultation au comité départemental d'hygiène, assurant une pleine information des parties intéressées.
    Ces textes prévoient également un certain nombre de prescriptions qui encadrent l'ensemble de la filière, jusqu'à l'épandage proprement dit.
    Des normes sont fixées notamment sur la qualité des boues en matière de métaux lourds ou de composés organiques, en concentration et en flux, ainsi que sur la qualité des sols sur lesquels ces boues sont apportées.
    Face aux controverses itératives sur l'épandage, les ministères chargés de l'environnement et de l'agriculture ont mis en place en 1998 un comité national des boues regroupant des représentants des collectivités locales, des professionnels de l'assainissement, des professionnels agricoles, des industries agro-alimentaires, de la grande distribution, des consommateurs, des associations de protection de l'environnement et des experts scientifiques.
    L'ensemble des travaux conduits au sein de ce comité national a confirmé tout l'intérêt de l'épandage sur les terres agricoles. Un document de synthèse de ces travaux a été publié par l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, en janvier 2001. Vous pouvez consulter ces conclusions sur son site Internet.
    Ce document a confirmé l'absence de risques d'un épandage conduit dans le strict respect des textes réglementaires.
    La qualité des boues épandues pour l'usage agricole continue de s'améliorer, comme en témoigne le dernier bilan national qui a été communiqué en 2003 à la Commission européenne et qui montre que les boues épandues ont en moyenne des caractéristiques supérieures aux exigences réglementaires. Ce dernier bilan ne fait pas apparaître de diminution de l'apport de l'épandage des boues.
    Le compostage des boues pourra par ailleurs être encouragé lorsque l'arrêté de mise en application de la norme NFU 44-095 relative au compost incluant les boues de station d'épuration sera pris. Ce produit, grâce à l'incorporation de déchets verts, peut être un atout dans la récupération de sols fortement appauvris en carbone et donc particulièrement soumis à des phénomènes d'érosion.
    La filière de l'épandage des boues garde donc, monsieur le député, un intérêt très important.
    Il convient d'ajouter que l'Association nationale des industries alimentaires souhaite, et je partage son avis, que l'absence de boues ne puisse en aucun cas être utilisée comme un argument de marketing.
    Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.
    M. Jean-Pierre Dufau. Madame la ministre, je vous remercie de la clarté de votre réponse et d'avoir confirmé l'intérêt écologique et économique de l'épandage des boues dans les conditions réglementaires que vous avez rappelées.
    La bataille à mener consiste maintenant à persuader les centrales d'achat, les coopératives agricoles et les consommateurs qu'il s'agit là d'une valorisation naturelle qui n'affecte en aucun cas les produits.

SOC 12 REP_PUB Auvergne O