Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Rouault attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'insécurité juridique des propriétaires quant à l'étendue et à la définition de leur droit lorsque celui-ci se trouve confronté à la protection du logement. La jurisprudence, en vertu du respect du droit au logement des occupants sans titre, oblige les propriétaires, notamment lorsque ce sont des institutionnels, à reloger les personnes en cause. Nous ne pouvons qu'approuver cette mesure, notamment lorsqu'il s'agit de concitoyens privés de ressources, mais cela pose le problème du respect du droit de propriété. Ce dernier n'est alors plus absolu dans le cas du squat. En effet, au bout de quarante-huit heures, le propriétaire peut user de la voie judiciaire pour récupérer son bien. La procédure, au-delà qu'elle soit longue, peut s'avérer extrêmement coûteuse pour le propriétaire qui souhaite récupérer le logement dont il est le propriétaire. Une telle situation est paradoxale et injuste. En conséquence, il le remercie de bien vouloir préciser son sentiment en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'article 2 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 introduit le droit de propriété au nombre des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. L'article 1er de la loi du 6 juillet 1989 a, quant à lui, consacré le droit au logement. Ces deux droits peuvent paraître antagonistes, cependant les règles établies par le législateur ont permis de trouver un équilibre entre les deux, notamment grâce aux délais qui peuvent être accordés aux locataires, et aux indemnisations qui peuvent être versées au propriétaire en cas d'occupation illicite. De même, il tient à rappeler que le fait de s'être introduit frauduleusement en un local, de s'y être installé et de s'y maintenir irrégulièrement, qu'il s'agisse d'un local d'habitation ou d'un local inoccupé quelle que soit sa destination, constitue une infraction. Dans la première hypothèse, il s'agit du délit de violation de domicile au sens de l'article 226-4 du code pénal, ce qui suppose que soit établie l'intention délictueuse de l'occupant illégal. Dans la seconde, il y a affectation d'un local inoccupé à leur habitation par ceux qui s'y sont introduits par voie de fait. Dans les deux cas la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 modifiée, portant réforme des procédures civiles d'exécution, trouve application. Dès lors les occupants sans droit ni titre peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion réglementée par la loi précitée et par son décret d'application n° 92-650 du 31 juillet 1992, ainsi que par les articles L. 613-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation. Il ressort de ces dispositions que l'expulsion doit être ordonnée par une décision de justice, rendue par le tribunal de grande instance, qui peut être obtenue dans des délais raisonnables : de trois mois en moyenne en référé et de quatre mois et demi en moyenne au fond, soit une moyenne globale de quatre mois selon les derniers chiffres disponibles pour l'année 2002. Ces dispositions tendent, dans le respect des garanties procédurales dues à tout citoyen, à faciliter la libération des locaux occupés par ceux qui y sont entrés par voie de fait. En premier lieu, l'article 62 de la loi de 1991 précitée prévoit que le juge des référés ou le juge de l'exécution peut, par décision spéciale et motivée, réduire ou supprimer le délai de deux mois qui suit le commandement et qui doit désormais précéder l'exécution de la décision d'expulsion lorsque les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait. En second lieu et sous réserve de la prise en considération de l'exceptionnelle dureté que représenterait l'expulsion, la loi prive les personnes entrées par voie de fait du bénéfice de l'article L. 613-3 du code de la construction et de l'habitation prévoyant un sursis aux expulsions durant la période hivernale. Enfin, le refus du préfet d'accorder à l'huissier chargé de l'exécution le concours de la force publique ouvre droit à indemnisation par l'État pour le bailleur.
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