CONSÉQUENCES DE LA LOI SUR L'ARCHÉOLOGIE
PRÉVENTIVE SUR L'AMÉNAGEMENT DE LA RN 51
ENTRE REIMS ET ÉPERNAY
Mme la présidente. La
parole est à M. Philippe Armand Martin, pour exposer sa question,
n° 420, relative aux conséquences de la loi sur l'archéologie préventive
sur l'aménagement de la RN 51 entre Reims et Epernay.
M.
Philippe Armand Martin. Monsieur
le ministre de la culture, ma question porte sur les conséquences emportées par
l'application de la loi du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie
préventive ainsi que par ses décrets d'application du
16 janvier 2002.
Les
dispositions de cette loi, bien que louables, apparaissent aujourd'hui comme
très contraignantes dès lors qu'elles confient au seul Institut national de
recherche archéologique préventive la compétence pour réaliser ou faire réaliser
des fouilles préalablement à tous travaux. Par ailleurs, ces mesures engendrent
non seulement des frais financiers exorbitants pour la réalisation de
diagnostics archéologiques ou de fouilles complémentaires, mais aussi un
allongement des délais d'exécution des travaux. En effet, cet organisme ne
semble pas en mesure de respecter les délais stipulés dans les conventions
signées avec les collectivités locales qui, de plus, éprouvent les pires
difficultés à connaître le phasage des fouilles.
Cette situation est préjudiciable
au développement de nos territoires et décourage les investisseurs qui n'ont
aucune visibilité quant au calendrier des travaux. Tel est le cas pour la
réalisation de la RN 51 entre Reims et Epernay. D'ailleurs, ma collègue
Catherine Vautrin, de Reims, m'a dernièrement confirmé que les travaux avaient
été retardés, dans l'attente de la réalisation des fouilles archéologiques
préventives.
Il est regrettable
de constater, monsieur le ministre, que certains établissements publics
reportent le démarrage de travaux pourtant attendus par de nombreux Marnais. Par
conséquent, je vous saurais gré de bien vouloir me préciser les mesures que vous
entendez adopter pour concilier les intérêts de la fouille archéologique
préventive avec ceux de l'exécution de travaux d'intérêt général.
Mme la
présidente. La parole est à M. le ministre de la culture et de la
communication.
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la
communication. Monsieur le député, l'archéologie préventive est un élément
fondamental de notre politique en faveur du patrimoine : nous ne sommes pas un
peuple de vandales. (Sourires.)
L'archéologie préventive permet de
mieux connaître notre histoire, l'histoire de nos territoires et de nos
terroirs. La loi du 17 janvier 2001 lui a donné le régime juridique
dont elle était jusqu'alors dépourvue. Mais l'entrée en vigueur de la loi, en
2002, a entraîné de nombreux et rapides dysfonctionnements.
Vous avez évoqué les deux
principaux que sont l'allongement des délais et le coût parfois élevé des
opérations. Vous avez raison. J'ajouterai que ce coût, qui semble, comme vous le
relevez, exorbitant pour certains aménageurs, et notamment pour les communes
rurales, ne permet pas de répondre aux besoins de financement de l'Institut
national de recherche en archéologie préventive, l'INRAP, établissement public
créé par la loi du 17 janvier 2001, dont le déficit atteint
aujourd'hui 45 millions d'euros.
Pour remédier à ces
dysfonctionnements, le Gouvernement vient de déposer au Parlement un projet de
loi portant réforme de la loi de 2001. Le texte sera examiné en urgence par le
Parlement, au Sénat le 17 juin prochain puis à l'Assemblée
nationale.
L'objectif du
Gouvernement est de donner un cadre stable à l'archéologie préventive et de
renforcer sa dimension scientifique tout en l'intégrant mieux au développement
économique de notre pays et de nos régions.
Le nouveau dispositif réintroduira,
à tous les moments de la procédure, le dialogue, aujourd'hui totalement
insuffisant, entre les prescripteurs, l'opérateur et l'aménageur. Celui-ci
permettra notamment de faciliter l'élaboration d'un calendrier du diagnostic et
des fouilles et donc de mieux maîtriser les délais. Par ailleurs, une
disposition nouvelle de la loi permettra d'annuler la prescription de diagnostic
si le délai raisonnable fixé pour son exécution n'était pas respecté. C'est une
garantie contre l'arbitraire éventuel de l'opérateur. Cette réforme, qui a fait
l'objet d'une large concertation, se déploiera dans trois grandes directions :
tout d'abord, elle réaffirme le rôle de l'Etat dans le dispositif de
l'archéologie préventive : prescription des opérations, agrément des organismes
chargés des diagnostics et des fouilles, désignation du chef d'opérations,
autorisation et contrôle des travaux, élaboration de la carte archéologique
nationale, mise en oeuvre d'un mécanisme de mutualisation des financements.
Par ailleurs, cette réforme permet
une approche plus diversifiée, mieux à même de prendre en compte le contexte
scientifique de chaque région. Ainsi, aux côtés des services de l'Etat et de
l'INRAP, dont le statut est inchangé, pourront être mobilisés plus étroitement
les services agréés des collectivités territoriales tant pour les opérations de
diagnostic que de fouilles. On peut imaginer qu'au cours des prochaines années
se développent, sous la responsabilité de collectivités locales, à tel ou tel
degré - région, département, grande commune - des services d'archéologie
préventive, compétents, agréés par l'Etat. Mais des opérateurs scientifiques
publics ou privés agréés par l'Etat pourront réaliser des fouilles.
Cette réforme, enfin, réorganise le
financement de l'archéologie préventive. Une redevance générale d'archéologie
sera perçue sur tous les travaux d'aménagement et permis de construire
supérieurs à un certain plancher dont on débat actuellement en commission tant à
l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Cette redevance financera à la fois les
diagnostics archéologiques et un fonds de mutualisation qui permettra, dans
certains cas, de subventionner les aménageurs pour diminuer le coût des
fouilles, les petites communes par exemple n'ayant pas les moyens d'y faire
face. Les fouilles, quant à elles, seront payées par l'aménageur à l'opérateur
retenu après accord de l'Etat dans le cadre d'accords contractuels.
C'est ainsi, monsieur le député,
que nous entendons concilier le souci de la protection de notre patrimoine, la
volonté de mettre fin à des situations d'arbitraire durement ressenties par les
collectivités locales, que leur majorité soit à droite, à gauche ou au centre,
et la détermination à défendre les légitimes objectifs de l'aménagement de notre
territoire.
Mme la présidente. La
parole est à M. Philippe Armand Martin.
M. Philippe Armand Martin.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre réponse. Il est en effet
important de réformer la loi du 17 janvier 2001 afin de permettre aux
élus de disposer d'un cadre stable et de mieux maîtriser les délais, notamment
pour les travaux d'aménagement de la RN 51 qui revêt un intérêt primordial tant
pour le développement des échanges économiques que pour la sécurité routière.