Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Claude Decagny souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer sur l'application de la loi Gayssot et de l'article L. 132.8 du code de commerce qui permet aux entreprises sous-traitantes de recouvrer directement leurs créances faisant suite au non-paiement des factures de transport effectués, quel que soit la nationalité du commissionnaire, de l'expéditeur, du destinataire, dans la mesure où la seule condition est que l'une des parties au contrat soit basée en France. Même si le but affiché d'une telle mesure était celui de la responsabilisation, il s'avère, par répercussion, que le donneur d'ordre initial se trouve engagé et comptable des manquements de l'entreprise de transport ayant été mandatée à cette fin. Un problème évident se pose en particulier dans le cadre d'opérations dites franco de port avec d'autres pays. Il lui demande s'il ne serait pas envisageable de tenir compte de ces cas spécifiques pouvant mettre en difficulté des entreprises de transport nationales.
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Texte de la REPONSE :
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L'article L. 132-8 du code de commerce prévoit que la lettre de voiture, établie pour effectuer un transport routier de marchandises, a valeur de contrat pour toutes les parties concernées par l'opération. Sur cette base, le transporteur voiturier peut demander le paiement de ses prestations à l'expéditeur ou au destinataire de la marchandise, dans le cas où son cocontractant direct ne l'a pas rémunéré. Cet article s'applique à tous les contrats soumis à la loi française, qu'ils concernent l'exécution d'un transport intérieur ou d'un transport international lorsque la France a les liens les plus étroits avec l'opération effectuée. En effet, par un arrêt du 24 mars 2004, la chambre commerciale de la Cour de cassation a considéré que la Convention internationale de transport routier de marchandises par route du 19 mai 1956, dite CMR, qui régit les transports internationaux, étant muette sur l'action directe du transporteur à l'encontre du destinataire, il convient, par application de l'article 4 de la convention de Rome du 19 juin 1980, de la soumettre à la loi avec laquelle le contrat présente les liens les plus étroits. Selon le paragraphe 4 de cet article 4, le contrat de transport est présumé avoir les liens les plus étroits avec le pays dans lequel le transporteur a son établissement principal et où est situé le lieu de chargement ou de déchargement. La rédaction de l'article L. 132-8 du code de commerce, qui résulte de la loi du 6 février 1998, confirme l'évolution jurisprudentielle, les tribunaux considérant qu'il résultait des dispositions alors en vigueur que pour être payé, un transporteur pouvait se retourner contre l'une ou l'autre des parties au contrat, sans se limiter au cosignataire. Il peut en résulter que la partie qui a déjà payé le commissionnaire de transport ou le transporteur principal défaillant soit amenée à payer en plus l'entreprise qui a exécuté la prestation de transport. C'est ce qui est appelé le double paiement. Lorsqu'un commissionnaire ou un transporteur principal est en redressement judiciaire ou en dépôt de bilan, l'expéditeur ou le destinataire informés peuvent régler directement au transporteur le montant de ses prestations et ne payer à l'administrateur judiciaire, ou au mandataire liquidateur que le prix de la commission de l'entreprise dont il a la charge. Actuellement, il n'est pas envisagé de modifier à nouveau l'article L. 132-8 du code de commerce. Une modification serait en toute hypothèse prématurée, la jurisprudence en la matière étant loin d'être stabilisée. Il est donc conseillé aux chargeurs, expéditeurs ou destinataires, de se concerter avec les commissionnaires de transport et les transporteurs pour anticiper les accidents de paiement et tirer le meilleur profit de la réforme récente du code de commerce. Un chargeur peut, par exemple, exiger par contrat du commissionnaire de transport qu'il joigne à sa facture un justificatif de paiement de ses sous-traitants. Il lui est aussi possible de demander par contrat à un transporteur de ne pas sous-traiter et de ne le payer qu'au vu d'une attestation de non sous-traitance du contrat de transport.
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