DISPARITIONS D'ENFANTS
ET LUTTE CONTRE LES SITES PÉDOPHILES
M. le président. La
parole est à Mme Chantal Brunel, pour le groupe de l'UMP.
Mme Chantal Brunel.
Elle s'appelle Estelle, elle a la beauté et l'innocence de ses neuf ans. Elle habite Guermantes, un petit bourg de ma circonscription situé au creux des vallées de la Brosse et de la Gondoire. Le 9 janvier 2003, la vie bascule : Estelle ne rentre pas. Des moyens considérables en hommes et en matériels sont déployés par le ministère de l'intérieur. Une solidarité humaine exceptionnelle se manifeste, ce dimanche encore au stade Charléty. Pourtant, l'attente est toujours là, angoissante et insupportable pour la famille, pesante pour Guermantes et pour nous tous.
Nous ne voulons pas oublier Estelle. Nous ne voulons pas non plus oublier Aurélie, Marion, Marine, autres enfants disparus.
Bien que, à ma connaissance, on ne puisse pas relier formellement ces disparitions à des activités pédophiles, je voudrais tout de même vous demander, monsieur le ministre de l'intérieur, quels sont les moyens actuels de répression de vos services face au développement des sites pédophiles - on parle d'un million d'images -, le plus souvent installés à l'étranger. Je sais que vos services s'emploient à lutter contre ces sites, mais il semble que des freins limitent leurs possibilités d'action.
Quelles mesures la France peut-elle prendre ? Comment organiser une véritable coopération des polices dans ce domaine ? Nous savons tous, dans cet hémicycle, que le problème des paradis fiscaux et des Etats non coopératifs n'a pas été réglé.
M. Jean-Claude Lefort. C'est vrai !
Mme Chantal Brunel. Toutefois, nous savons tous aussi que la menace de sanctions a permis de réaliser des progrès. Ne peut-on avancer dans le même sens pour les sites pédophiles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité
intérieure et des libertés locales. Madame la députée, j'ai reçu les parents d'Estelle. Nous pouvons tous rendre hommage à leur très grande dignité et nous incliner devant leur douleur.
Estelle a disparu depuis deux mois. Les enquêteurs du SRPJ de Versailles font ce qu'ils peuvent, ne négligent aucune piste, mais je vous confesse qu'aujourd'hui - et c'est bien pour cela qu'ils n'en négligent aucune - ils n'en ont pas de sérieuses. Du reste, personne ne sait dans quelles circonstances Estelle a disparu.
Au nom du Gouvernement, j'ai pris l'engagement, devant ses parents, que la cellule spéciale qui a été mise en place pour retrouver Estelle ne s'arrêtera pas de travailler tant que celle-ci n'aura pas été retrouvée, tout en sachant bien que ces mots ne permettront pas de guérir leur angoisse et ne sont pas à la hauteur de la douleur qu'ils ressentent, comme ils ne sont pas à la hauteur de celle des parents d'enfants ayant été victimes d'agissements pédophiles. Toutefois, pour ce qui est d'Estelle, nous ne pouvons pas encore dire ce qui s'est passé.
Face à cette situation, la France, qui assume la présidence du G 8 qui se tiendra au mois de juin, a proposé que la réunion préparatoire des ministres de l'intérieur et de la justice soit consacrée à la question de la pédopornographie et des sites Internet pornographiques, car seule la coopération internationale peut rendre notre action efficace.
Par ailleurs, dès 2002, nous avons créé une section spéciale au sein de la gendarmerie, chargée d'identifier la provenance des images pédopornographiques sur le site Internet. Tenez-vous bien : rien que pour cette seule année, 720 affaires ont été traitées et ont fait l'objet de poursuites, ce qui témoigne de l'importance du phénomène.
Le garde des sceaux a donc prévu, dans le cadre de son projet de loi destiné à lutter contre la criminalité, de durcir les peines sanctionnant les auteurs de ces diffusions.
Pour ma part, j'ai organisé, il y a un mois, au ministère de l'intérieur, une réunion de travail avec les fournisseurs d'accès afin que les images pédopornographiques ne soient plus diffusées en France.
M. Jean-Claude Lefort. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. S'il y a un domaine, madame la députée, où la tolérance zéro doit s'appliquer, c'est bien celui-là ! (Applaudissements sur tous les bancs.)