FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 450  de  M.   Birraux Claude ( Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Savoie ) QOSD
Ministère interrogé :  équipement, transports et logement
Ministère attributaire :  équipement, transports et logement
Question publiée au JO le :  23/06/2003  page :  4885
Réponse publiée au JO le :  25/06/2003  page :  5868
Rubrique :  logement
Tête d'analyse :  logement social
Analyse :  construction. Haute-Savoie
Texte de la QUESTION : M. Claude Birraux appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur la situation du logement social en Haute-Savoie. La proximité de la Suisse et l'application des accords bilatéraux entre l'Union européenne et la Suisse ont pour effet une pression foncière accrue, des prix de terrains constructibles qui s'envolent. Pour pouvoir construire du logement social en Haute-Savoie, les collectivités locales ont largement été mises à contribution : participation au surcoût foncier des communes et du conseil général, subvention de 2 300 euros du conseil général pour chaque logement. La modification des plafonds de loyers du dispositif Besson peut laisser entrevoir un desserrement de la pression immobilière. Or, au 1er juin 2004, la libre circulation des personnes s'appliquera aux seuls ressortissants suisses. Compte tenu du coût des loyers, environ 40 % plus chers qu'en France, et de la difficulté, compte tenu de l'exiguïté du territoire et de la préservation des terres agricoles à Genève, le nouveau dispositif Besson va créer un appel d'air pour les ressortissants suisses qui pourront librement habiter en France. C'est pourquoi il serait intéressant de classer le secteur frontalier en zone B (de 10 à 12,50 euros par mètre carré), afin de limiter les effets négatifs et de permettre aux groupements intercommunaux chargés de l'établissement des SCOT, d'imposer aux promoteurs privés 20 à 25 % de logements sociaux.
Texte de la REPONSE :

SITUATION DU LOGEMENT SOCIAL
EN HAUTE-SAVOIE

    M. le président. La parole est à M. Claude Birraux, pour exposer sa question n° 450, relative à la situation du logement social en Haute-Savoie.
    M. Claude Birraux. Monsieur le ministre, vue de loin, de Paris par exemple, la situation du département de la Haute-Savoie peut paraître radieuse : un département en expansion économique et démographique constante, l'attrait et l'influence de la Suisse, et de Genève en particulier, qui fournissent un emploi à quelque 30 000 travailleurs frontaliers. Mais si cette proximité est source de richesses, elle est aussi source de disparités et d'inégalités.
    Tant que les employeurs de Genève ont puisé dans le réservoir naturel de main-d'oeuvre du Genevois français et de la Haute-Savoie, les flux parvenaient à une sorte d'équilibre. Mais après les restrictions imposées à l'immigration et aux travailleurs saisonniers, la Suisse et Genève se sont tournées vers le reste de la France pour recruter des travailleurs frontaliers, et les choses se sont gâtées. La Haute-Savoie a dû assumer la charge du logement de ces personnes, de leur formation et de la construction des infrastructures publiques. La forte demande a créé une pression considérable sur le foncier, et le logement, dont les prix atteignent le niveau des grandes agglomérations.
    La mise en oeuvre des accords bilatéraux Suisse-Union européenne a renforcé les craintes et les inquiétudes des élus. En effet, le 1er juin 2004, entrera en vigueur l'accord sur la libre circulation des personnes au seul bénéfice des ressortissants helvétiques ; les citoyens de l'Union européenne devront, eux, attendre la réciprocité jusqu'en 2012. Le logement étant rare et cher à Genève, mes collègues et moi-même redoutons un afflux de ressortissants suisses en France qui entraînerait des disparités encore plus grandes en zone frontalière. Il faut savoir qu'un logement cher chez nous coûte encore 40 % de moins qu'à Genève.
    C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir étudier nos arguments avant de rendre un avis définitif sur le classement en zone B, à 12,5 euros par mètre carré, du Genevois français dans le nouveau dispositif « de Robien », et non plus en zone A, comme initialement proposé.
    Par ailleurs, vous comprenez qu'il est de plus en plus difficile, dans de telles conditions, de construire du logement social, dont nous avons pourtant un impérieux besoin pour loger des travailleurs français travaillant en France et percevant des salaires français, en particulier des fonctionnaires. Pour vous éclairer, je rappelle qu'un franc suisse vaut 4,32 ex-francs français.
    Un partenariat a été conclu entre l'Etat, les bailleurs sociaux et les collectivités locales dans le cadre d'une convention prévoyant la construction de 1 000 logements sociaux par an. Nous n'atteignons pas ce chiffre. Et si des logements sociaux se construisent encore, c'est parce que le conseil général et les communes se partagent le surcoût foncier dans la limite de 35 euros par mètre carré chacun, et que chaque logement est subventionné à hauteur de 2 300 euros par le conseil général et de 4 600 euros par les bailleurs.
    Ma supplique est simple, monsieur le ministre : aidez-nous à construire du logement social ! Pour cela, il faut sortir des schémas traditionnels même s'il nous faut toujours des prêts locatifs à usage social, les PLUS.
    Compte tenu de nos contraintes foncières, ne pourrait-on autoriser les communes à imposer aux promoteurs privés, dans leurs programmes, 20 à 25 % de logements sociaux qui seraient vendus en état futur d'achèvement aux bailleurs ? Une telle mesure favoriserait la mixité sociale et ouvrirait des possibilités aux communes qui n'ont pas de réserve foncière et qui, accessoirement, éprouvent quelques difficultés à se conformer à l'article 55 de la loi de solidarité et de renouvellement urbains, dite loi SRU.

Suspension et reprise de la séance

    M. le président. La séance est suspendue.
    (La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à onze heures vingt.)
    M. le président. La séance est reprise.
    La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
    M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le président, veuillez pardonner mon retard. Il est vrai que les questions et les réponses précédentes ont été courtes, ce qui a entraîné le décalage de ma propre intervention. Monsieur Birraux, j'ai néanmoins entendu votre question sur mon poste de télévision. J'y réponds avec plaisir parce qu'elle démontre, n'en déplaise à certains, que la majorité est véritablement soucieuse de développer la mixité sociale dans notre pays et sur le terrain, sans l'approche normative, contraignante, parfois même coercitive, qui a été, à mon avis, excessivement privilégiée jusqu'à présent.
    Vous me posez deux questions, l'une qui relève du droit de l'urbanisme, l'autre du financement du logement.
    Comment une commune peut-elle imposer dans chaque opération un pourcentage minimal de logements sociaux ? Par l'intermédiaire de son plan local d'urbanisme qui définit les terrains affectés aux programmes de logements sociaux. Ces logements peuvent être réalisés par le propriétaire ou l'acquéreur du terrain, dans le cadre d'un programme d'ensemble.
    Si le propriétaire ne souhaite pas réaliser lui-même ces logements, il dispose d'un droit de délaissement qui impose à la commune de lui acheter le terrain dans un délai de deux ans. Autrement dit, la commune dispose de deux ans pour trouver un opérateur qui réalise le programme mixte qu'elle a souhaité.
    Enfin, la commune peut, bien évidemment aussi par une discussion en amont avec les promoteurs, obtenir la réalisation de programmes mixtes. Cette procédure, non contraignante, est souvent celle qui donne les meilleurs résultats.
    Votre deuxième question porte sur le logement. Il s'agit là d'un véritable sujet qui est essentiel pour pouvoir maintenir en zone tendue des services publics de qualité.
    Je suis bien évidemment prêt à mettre en place un observatoire du marché du logement pour que nous puissions déterminer à quel zonage il faut rattacher le Genevois français, que ce soit pour le nouveau dispositif d'amortissement fiscal, qui a été voté il y a quelques semaines, ou pour le financement du logement social.
    Par ailleurs, le Premier ministre vient d'accepter que, par redéploiement interne à mon département ministériel, l'ensemble des crédits pour la réalisation de logements sociaux soient intégralement rendus disponibles. C'est donc bien 55 000 logements sociaux au moins qui seront financés en 2003. Encore faut-il que des maîtres d'ouvrage montent des dossiers et les rendent éligibles. Monsieur le député, si vous avez des projets, parlons-en et finançons-les ensemble, comme vous me l'avez proposé. Avec des moyens juridiques pour permettre aux élus de bâtir la mixité sociale, des moyens financiers disponibles pour construire des logements, le Gouvernement saura être à vos côtés pour bâtir une ville solidaire.
    M. le président. La parole est à M. Claude Birraux.
    M. Claude Birraux. Merci, monsieur le ministre, de votre réceptivité et de votre ouverture aux problèmes que je vous ai exposés. J'aimerais pousser un peu plus loin la réflexion.
    En premier point, dans le cadre du contrat de partenariat signé avec l'Etat, M. le préfet de région nous assure de son appui pour disposer des PLUS nécessaires à la construction de 1 000 logements sociaux. Or une étude du CILS montre que, pour faire face au retard et le résorber, il faudrait, dans les cinq ans qui viennent, construire 1 200 logements sociaux par an.
    En second point, vous pouvez, certes, nous accompagner en matière d'urbanisme, de destination de terrains à travers les plans locaux d'urbanisme, mais il se pose aujourd'hui un problème de prix. En Haute-Savoie, il est encore accru par l'application des accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne. Dans le village où j'habite, à huit kilomètres d'Annemasse, le terrain à construire se vend de 230 euros à 260 euros le mètre carré. Et ce n'est qu'un village ! En centre-ville, les prix sont tels que les collectivités ne peuvent plus faire jouer leur droit de préemption.
    Le conseil général et les collectivités ont mis en place un dispositif pour avoir en quelque sorte un fonds de concours pour des acquisitions d'opportunité. Mais il me semble qu'il nous manque une base juridique qui impose aux promoteurs privés de faire 20 % de logement social dans la promotion privée. C'est, à mon sens, le seul moyen de réaliser du logement social malgré le coût foncier.
    M. le président. Nous avons pris un peu d'avance. Si nous tenions le même rythme pour la réforme des retraites, ce serait bien. (Sourires.)

UMP 12 REP_PUB Rhône-Alpes O