Rubrique :
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traités et conventions
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Tête d'analyse :
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accord d'entraide judiciaire entre l'Union européenne et les États-Unis
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Analyse :
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conséquences. transports aériens
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Texte de la QUESTION :
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Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le fait que les États-Unis ont adopté, le 19 novembre 2001, une législation sur la sécurité de l'aviation et du transport (The Aviation and Transportation Security Act) et le 5 mai 2002, une loi renforçant les conditions d'entrée sur le territoire américain (Enhanced Border Security and Visa Entry Reform Act). Ainsi, depuis le 5 mars 2003, ces mesures imposent aux compagnies aériennes de communiquer aux services des douanes et de sécurité américains des informations personnelles relatives à leurs passagers à destination des États-Unis, sous peine de contrôles renforcés, d'amendes et du refus du droit d'atterrir. Ces informations sont stockées sous forme d'enregistrements standardisés dénommés PNR (Passenger Name Record). Après avoir hésité, l'Union européenne vient de donner son accord pour que les compagnies aériennes transmettent aux États-Unis ces données personnelles dans le cas des voyageurs qui achètent un billet d'avion à destination de ce pays. Dorénavant, les agents américains du bureau des douanes et de la protection des frontières auront automatiquement accès à ces informations recueillies par les agences de voyages et les compagnies aériennes. Le transfert des données personnelles sera en effet systématisé au départ de l'Europe, en vertu d'un accord signé en mai 2004 entre les États-Unis et l'Union européenne. Cette coopération renforcée s'inscrit dans le climat d'hystérie sécuritaire qui règne actuellement aux États-Unis et qui fait peu de cas des droits de l'homme. L'accord en cause porte d'autant plus atteinte aux libertés individuelles et au respect de la vie privée que les données recueillies à titre commercial sont utilisées à des fins sécuritaires, ce qui est contraire aux principes garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. Certes, les exigences américaines peuvent contribuer à la lutte contre le terrorisme, mais les risques de dérapage sont importants. On en a déjà fait l'expérience avec la zone de non droit de Guantanamo et avec le recours à la torture en Irak et en Afghanistan. Les dispositions de l'accord répertorient trente-quatre catégories d'informations personnelles dont la transmission prend le contre-pied des législations européennes. En effet, parmi les données transmises, on aurait : le détail des vols effectués par le passé vers d'autres pays, les habitudes alimentaires (végétarien, consommation de porc ou d'alcool...), les problèmes de santé, l'adresse, l'état civil détaillé, le numéro de carte bancaire, des indications susceptibles de faire apparaître l'origine raciale ou l'orientation religieuse, le nom des personnes accompagnantes et la position de leurs sièges dans l'avion, l'adresse de facturation du billet, les contacts à terre du passager, l'historique des changements apportés dans le fichier du voyageur... Elle lui demande en conséquence quelle est la position du Gouvernement en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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À la suite des événements du 11 septembre 2001, les États-Unis ont adopté deux lois relatives à la sûreté des transports, en 2001 et 2002, qui prévoient la transmission préalable des données relatives à l'équipage et aux passagers pour les vols à destination du territoire américain. Ont été concernées dans un premier temps les informations figurant sur le passeport tels le nom, l'adresse, ainsi que l'adresse de séjour aux États-Unis puis, à partir du 25 juin 2002, les données du système de réservation électronique des compagnies (PNR). Ces données peuvent comporter des informations personnelles, portant par exemple sur « l'historique » des voyageurs. En France et en Europe, ces données sont protégées, d'une part, par la loi française, d'autre part, par la directive européenne 95/46/CE sur la protection des données personnelles. C'est pourquoi l'Union européenne a engagé avec les États-Unis une négociation visant à garantir le respect de la protection des données personnelles qui seraient transmises aux services américains. L'Union européenne a ainsi obtenu la garantie d'un traitement « adéquat » de ces données, c'est-à-dire dans le strict respect de la réglementation sur la protection des données personnelles. L'Union européenne a également insisté pour que soient garantis aux citoyens les droits d'accès, de rectification et de recours effectif. Le nombre des données à transmettre a été réduit et concerne essentiellement les modalités de transports (itinéraire, historique du trajet, caractéristiques du billet, identité de l'agence de voyages...). La liste de ces données figure dans le texte de la décision de la Commission qui a été publié au Journal officiel de l'Union européenne le 6 juillet 2004 (n° L. 235). Un autre point important concerne la non-discrimination des passagers et l'engagement de réciprocité : le texte de l'accord stipule que le bureau américain des douanes et de la protection des frontières, autorité compétente, traitera les données reçues et les personnes concernées par ce traitement « sans discrimination, en particulier sur la base de la nationalité et du pays de résidence » ; le texte indique enfin qu'en cas de mise en oeuvre dans l'Union européenne d'un système similaire, le bureau des douanes et de la protection des frontières « encouragera activement, autant que possible et dans le respect du principe de réciprocité, les compagnies aériennes relevant de sa compétence à coopérer ». Le principe d'un tel accord, qui vise à concilier les impératifs de sécurité de la vie des personnes et de protection de leurs libertés individuelles, pourrait être étendu à l'ensemble des destinations du trafic aérien. La Commission européenne a en effet l'intention de porter le dossier auprès de l'organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
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