Texte de la QUESTION :
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M. Christian Vanneste appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des psychiatres des prisons. En effet, ces médecins n'ont pas les moyens de soigner les condamnés violents d'autant que le système actuel ne permet pas de diagnostiquer réellement les risques de récidive. Par ailleurs, les détenus n'ont aucune obligation de soins en prison. Par exemple, c'est seulement depuis la loi du 17 juin 1998 que les délinquants sexuels doivent se soumettre à un suivi socio-judiciaire. De plus, il est regrettable de constater que l'on continue à confier aux psychiatres la détermination de la responsabilité et de la dangerosité. Or, seul un diagnostic criminologique détaillé permet d'évaluer avec quelque pertinence le pronostic social et d'élaborer un programme individualisé de traitement. La justice pénale doit se donner, sur ce point, les moyens techniques de ses ambitions. Enfin, il est opportun aussi de rappeler que la France ne compte que 250 lits psychiatriques dans les prisons. En conséquence, il lui demande de bien vouloir l'informer des mesures qui peuvent être envisagées pour répondre aux attentes de psychiatres en milieu carcéral.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice informe l'honorable parlementaire qu'il est très attaché à la qualité de la prise en charge sanitaire des personnes incarcérées et en particulier des personnes détenues souffrant de troubles psychiatriques. Depuis 1977, la prise en charge par les établissements de santé des patients incarcérés souffrant de troubles mentaux est assurée au sein des établissements pénitentiaires ; elle a été généralisée en 1986 par la création des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire et la mise en place des services médico-psychologiques régionaux (SMPR). Dans chaque région pénitentiaire, un ou plusieurs secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire, placés sous l'autorité d'un psychiatre hospitalier, sont rattachés à un établissement public de santé ou à un établissement de santé privé admis à participer à l'exécution du service public hospitalier. Chacun de ces secteurs comporte notamment un service médico-psychologique régional aménagé dans un établissement pénitentiaire, étant précisé que le nombre des SMPR s'élève à vingt-six. Il existe deux niveaux de soins en milieu pénitentiaire qui se répartissent entre : des prises en charge ambulatoires réalisées par les équipes de secteurs de psychiatrie générale et, le cas échéant, de psychiatrie infanto-juvénile ; des soins plus diversifiés, incluant l'hospitalisation avec consentement des personnes détenues, assurés par les vingt-six SMPR. Quant à l'hospitalisation en établissement de santé, en application de l'article D 398 du code de procédure pénale (CPP), elle ne peut actuellement être réalisée que sous le régime de l'hospitalisation d'office, dans des établissements habilités à recevoir des patients hospitalisés sans consentement. L'accès aux soins et la diversité de l'offre de soins sont variables selon les établissements pénitentiaires. La capacité globale des vingt-six SMPR s'élève à 360 lits et places, ce qui permet d'assurer essentiellement une prise en charge de jour, seuls deux SMPR disposant d'une couverture paramédicale nocturne ; dans les autres cas, les patients détenus sont simplement hébergés de nuit. Au regard de cette situation, le législateur a prévu que l'hospitalisation, avec ou sans consentement, des personnes détenues atteintes de troubles mentaux se ferait désormais dans les établissements de santé au sein d'unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA). Ces structures assureront les hospitalisations complètes de personnes détenues atteintes de troubles mentaux avec la même qualité de prise en charge qu'en milieu libre. La première tranche, dont la réalisation devrait être effective entre 2008 et 2010, aura une capacité d'accueil de 450 lits, la création en plusieurs tranches de 19 UHSA devant aboutir à terme à une capacité totale de 700 lits. Tel que défini, ce programme devrait permettre d'assurer d'emblée une couverture de l'ensemble des régions pénitentiaires métropolitaines. Par ailleurs, une enquête épidémiologique sur la santé mentale des personnes détenues a été initiée en janvier 2003 par le ministère chargé de la santé, avec la participation du ministère de la justice. Les résultats définitifs de cette étude seront connus fin 2005 et permettront d'améliorer la prise en charge de ce public. Enfin, une commission pluridisciplinaire santé-justice, présidée par M. Jean-François Burgelin, ancien procureur général près la Cour de cassation, destinée à étudier les modalités d'une meilleure prise en charge sur les plans judiciaire et médical des auteurs d'infractions atteints de troubles mentaux ou présentant un profil dangereux, a remis un rapport en juillet 2005 aux ministres mandants. Parmi les vingt-quatre préconisations de ce document, il est notamment proposé de développer les connaissances en matière de psycho-criminologie et de créer, d'une part, un réseau national d'équipes ressources interrégionales (ERI), chargées d'évaluer de manière pluridisciplinaire la dangerosité criminologique des auteurs d'infractions, d'autre part, une base de données nationale (centre de documentation psycho-criminologique) regroupant l'ensemble des expertises judiciaires ordonnées, les évaluations effectuées par les ERI, ainsi que les hospitalisations d'office prononcées après déclaration d'irresponsabilité pénale pour troubles mentaux. Ces préconisations complètent les dispositifs déjà existants dans les établissements pour peine, comme le projet d'exécution des peines (PEP) qui regroupe différents partenaires en vue de préparer la réinsertion de la personne détenue (psychologue PEP, personnel d'insertion et de probation, personnel de surveillance référent, personnel de direction). Ce projet, mis en oeuvre en accord avec la personne détenue, vise à donner plus de sens à la peine privative de liberté en impliquant davantage le condamné pendant toute la durée de son incarcération et à améliorer l'efficacité des actions visant à sa réinsertion.
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