CONSÉQUENCES SANITAIRES DE LA
LUTTE
CONTRE LA CHRYSOMÈLE DES RACINES DU MAÏS
M. le président. La
parole est à M. Jean-Pierre Blazy, pour exposer sa question, n° 458,
relative aux conséquences sanitaires de la lutte contre la chrysomèle des
racines du maïs.
M. Jean-Pierre Blazy.
Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des
affaires rurales, je souhaite vous interroger - une nouvelle fois, car je
l'ai déjà fait par écrit, et vous m'avez d'ailleurs répondu le 11 août
dernier - sur l'épidémie de chrysomèle des racines du maïs qui sévit dans
une partie de notre territoire, notamment en région parisienne, plus
particulièrement dans le Val-d'Oise.
Ce petit coléoptère s'attaque aux
racines du maïs, avec des conséquences graves pour les exploitations agricoles,
lesquelles ne peuvent prétendre à une indemnisation - vous m'avez répondu
par écrit sur ce point. Il est apparu pour la première fois en août 2002, à
proximité des aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et du Bourget : en plus des
nuisances dues au bruit, nous avons donc maintenant celles dues à la chrysomèle
! Tous les foyers détectés jusqu'à présent se situent en effet à proximité
d'aéroports internationaux, et pas uniquement en France ; ce sont donc les
avions qui propagent ces insectes dans nos champs.
Face à cette grave épidémie, les
moyens mis en oeuvre pour combattre le coléoptère inquiètent les habitants des
secteurs concernés, à double titre.
Premièrement, je souhaiterais vous
interroger à nouveau sur les traitements employés. Les épandages d'insecticide
sont pratiqués par hélicoptère, à proximité immédiate des habitations et sans
que les populations ni les élus soient correctement informés, et on ne sait plus
aujourd'hui quels risques ces produits font encourir à l'homme et aux animaux,
un grand quotidien ayant même révélé que le Decis, l'insecticide employé,
pouvait avoir des effets susceptibles de provoquer des monstruosités foetales.
De telles informations publiées dans la presse ne sont pas de nature à rassurer
les populations !
On nous indique
également qu'il est « recommandé » de respecter un délai de quatre à cinq jours
avant de manger des fruits et légumes produits sur des parcelles riveraines de
champs traités, mais cette « recommandation » n'a été formulée ni aux élus ni
aux riverains. Dans ces conditions, il conviendrait d'avoir au moins l'assurance
que cet insecticide est efficace, ce qui pour l'instant n'est pas prouvé. En
définitive, je souhaiterais, monsieur le ministre, qu'il y ait davantage de
transparence sur cette question des traitements.
Enfin, la présence de cet insecte
n'est pas sans poser des questions, puisqu'il apparaîtrait que celui-ci soit
arrivé directement par avion des Etats-Unis. N'est-on pas là en train de
préparer l'opinion à l'arrivée massive des OGM sur notre territoire, dont on
nous expliquera sans doute qu'il s'agit du meilleur moyen de lutter contre ce
coléoptère ? Quel est votre point de vue, monsieur le ministre, sur cette
question du rapport entre la chrysomèle et les OGM ?
M. le président. La
parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la
pêche et des affaires rurales.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de
la pêche et des affaires rurales. Monsieur le député, vous rappelez la
détection, au mois d'août de l'année passée, de la chrysomèle des racines du
maïs près des aéroports parisiens, notamment dans votre département. Comme vous
le soulignez, cet insecte, dont l'introduction et la dissémination sont
interdites dans toute l'Union européenne, présente un risque majeur pour la
maïsiculture de notre pays. C'est pourquoi mes services mettent tout en oeuvre
afin d'éradiquer cet organisme de quarantaine. Des mesures le lutte ont été
mises en oeuvre avec succès. En effet, dans le cadre de la surveillance
intensive des zones déclarées contaminées, un nombre très limité d'insectes a
été capturé cette année.
S'agissant des traitements
phytosanitaires appliqués dans la lutte contre cet insecte, je vous informe que
le produit utilisé est une spécialité commerciale dûment autorisée, dont la
substance active est bien connue et qui a fait l'objet d'une analyse
scientifique approfondie avant d'être homologuée. Il faut, bien évidemment,
répondre dans la transparence aux inquiétudes que vous avez évoquées. C'est
naturellement ce qui est fait et ce que nous continuerons de faire. L'efficacité
de ce produit contre cet organisme a été démontrée, car, après l'application des
traitements, aucun insecte n'a été trouvé sur les pièges qui en avaient
précédemment capturé.
Ce produit
a été choisi en tenant compte de la localisation des parcelles à traiter et de
leur proximité des habitations. Toutes les règles de sécurité ont été
respectées. On m'indique que les élus et les riverains ont été informés sur les
traitements et leur mode d'application, soit lors de réunions d'information,
soit par voie de presse. D'après vous, cela n'a pas été le cas. Je m'engage ici
à faire le point sur ce sujet, car il est bien évident que les élus et les
populations concernés doivent être saisis et informés en toute transparence.
Quant à la filière d'introduction de
la chrysomèle, même si la présence de cet insecte est reconnue aux Etats-Unis,
elle a été signalée pour la première fois en Europe en 1992 en République
fédérale de Yougoslavie, près de l'aéroport international de Belgrade. A partir
de ce premier foyer, l'insecte a rapidement atteint les pays voisins. Il est
donc difficile d'incriminer un responsable géographique unique. En effet, ainsi
que vous le savez en votre qualité d'élu francilien, les aéroports parisiens
desservent non seulement l'Amérique du Nord, mais aussi le reste du monde.
Enfin, sur la préparation des
esprits à l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés, je vous informe que
l'utilisation de maïs résistant à la chrysomèle des racines du maïs ne peut être
envisagée du fait de l'absence d'autorisation. De plus, sur le plan
scientifique, l'histoire de la lutte contre la chrysomèle des racines du maïs a
démontré qu'aucune solution unique de lutte ne peut revendiquer une exclusivité
et qu'il convient de privilégier un ensemble cohérent de mesures permettant une
détection précoce de l'insecte afin d'organiser une éradication rapide. Nous
refusons donc d'envisager que la chrysomèle soit, en quelque sorte, le cheval de
Troie des OGM.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.
M. Jean-Pierre Blazy.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre réponse, d'autant que je
partage tout à fait vos dernières considérations. Toutefois, je souhaiterais que
l'information des populations et des élus ne soit pas si tardive et ne soit pas
divulguée seulement la veille des interventions par hélicoptère. Il serait bon
d'organiser, dans les départements en cause, des tables rondes réunissant tous
les acteurs concernés, les agriculteurs notamment, et les élus représentant les
populations, pour faire le point sur les résultats des traitements. C'est grâce
à une bonne information et une plus grande transparence que l'on répondra le
mieux aux inquiétudes.