FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 47320  de  M.   Paul Daniel ( Député-e-s Communistes et Républicains - Seine-Maritime ) QE
Ministère interrogé :  culture et communication
Ministère attributaire :  culture et communication
Question publiée au JO le :  28/09/2004  page :  7466
Réponse publiée au JO le :  30/11/2004  page :  9429
Rubrique :  enseignement : personnel
Tête d'analyse :  enseignants
Analyse :  musées nationaux. gratuité. maintien
Texte de la QUESTION : M. Daniel Paul souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la suppression de la gratuité enseignante aux musées nationaux, que le musée du Louvre applique depuis le 1er septembre 2004. En effet, outre qu'elle pénalise de nombreux enseignants, elle s'inscrit dans une logique de rentabilité qui met en danger le droit à la culture pour tous et toutes. Tout d'abord, cette décision remet en cause un large accès au patrimoine national, particulièrement légitime pour le monde enseignant, auquel il incombe de porter et de transmettre une partie de ce patrimoine. Pour certains élèves, les enseignants s'avèrent être l'unique vecteur d'accès à ce patrimoine national. Remettre en cause l'accès gratuit au Louvre pour ceux-ci, c'est les restreindre dans leur approche pédagogique d'une grande partie du patrimoine national, pénalisant ainsi également les élèves. En outre, le conditionnement de la gratuité aux enseignants réalisant au moins une sortie scolaire dans l'année au Louvre sanctionne certains enseignants, notamment ceux de province ou ceux du premier degré. Cette mesure est d'autant plus choquante que le musée a annoncé un « bilan très positif » pour le premier semestre 2004, avec une hausse de sa fréquentation payante de 17,6 % par rapport à la même période en 2003. Toutefois, la suppression de la gratuité pour les enseignants, même si ses effets ne modifieront pas considérablement le budget du musée, répond à une logique de recherche de rentabilité accrue, symptomatique du désengagement de l'Etat en matière d'éducation et de culture. En effet, la constitution des grands musées nationaux en établissements publics à caractère administratif et les contrats d'objectifs et de moyens signés entre les grands musées et le ministère des finances contraignent les musées à accroître leurs ressources propres - au Louvre, accroissement de 22 % pour la période 2003-2005. Ainsi, le Louvre, dont le prix du billet à 8,5 euros est prohibitif pour la plupart des citoyens, est tenu, par ce contrat d'objectifs et de moyens, d'accroître ses ressources propres. Il souligne la gravité de cette logique de rentabilité, en opposition avec le droit universel à la culture. Il rappelle qu'un large accès à la culture est une condition nécessaire au maintien des démocraties et à la richesse des peuples. Il lui demande donc de rétablir la gratuité totale pour les enseignants et de revoir ses contrats d'objectifs avec les musées nationaux, en coopération avec le ministre des finances, afin de maintenir une politique active de l'État pour un accès à la culture pour toutes et tous.
Texte de la REPONSE : En réponse à la question posée par l'honorable parlementaire sur la « suppression de la gratuité enseignante » appliquée par le musée du Louvre, le ministre de la culture et de la communication tient à rappeler que le Louvre a souhaité faire évoluer sa politique tarifaire pour que celle-ci reflète une offre culturelle redéfinie et une politique sociale plus affirmée. Fidèle à sa mission culturelle et éducative et à l'engagement qu'il a pris avec l'Etat, le Louvre, qui vise à faire venir encore davantage de jeune public au musée, a choisi de bénéficier de manière permanente de l'appui des nombreux enseignants, relais actifs de sa mission éducative. La nouvelle politique tarifaire fixée par le conseil d'administration de l'établissement public du musée du Louvre le 28 novembre 2003, avec l'accord des ministères de tutelle, est ainsi sous-tendue par la volonté de développer et de mieux orienter le rôle social et éducatif, très réel du Louvre, vers les publics prioritaires au sens du contrat d'objectifs et de moyens conclu avec l'Etat, et notamment envers les jeunes et les publics socialement défavorisés. La politique de gratuité est un élément fondamental de l'offre tarifaire du Louvre. Elle profite en priorité aux jeunes de moins de dix-huit ans qui représentent plus d'un million sur le 1,9 million de visiteurs exonérés, Allant en outre plus loin que d'autres établissements culturels en la matière, le Louvre leur accorde aussi la gratuité d'entrée aux expositions temporaires. Cette politique connaît des résultats très significatifs, puisque, au Louvre, la part du public jeune s'est nettement accrue : elle constitue environ 46 % de la fréquentation soit 2,6 millions de personnes, dont un million de moins de dix-huit ans, alors qu'en 2000 les jeunes de moins de vingt-six ans ne représentaient que 37 % du public du musée. Toutefois, aujourd'hui, moins de 500 000 élèves en groupes scolaires, accompagnés de leurs enseignants, visitent le musée chaque année. Or, la venue au musée est un élément fondamental de l'éducation et de l'épanouissement culturel de tout enfant. C'est pourquoi, par les mesures adoptées, le Louvre cherche à accroître cette fréquentation et vise ainsi à atteindre l'objectif de 100 000 jeunes élèves de plus chaque année. Afin de faciliter la venue de ce jeune public, le Louvre accorde donc la gratuité d'entrée aux enseignants, pour un an et quelle que soit leur spécialité enseignée, dès lors qu'ils ont le projet de venir avec une classe et qu'ils procèdent à la réservation de la visite. La carte Louvre enseignants qui leur est délivrée, leur donne la gratuité d'accès au musée pour un an. Ils ont ainsi la possibilité de venir au Louvre autant de fois qu'ils le désirent pour préparer leur future visite avec des élèves. Grâce à cette carte, les services du Louvre sont en mesure de communiquer plus directement avec eux afin de les informer régulièrement des offres nouvelles, et de les faire bénéficier d'avantages propres à toute formule d'adhésion. Le musée développe d'ailleurs, depuis la dernière rentrée scolaire, des formations et des visites gratuites à l'intention des enseignants qui souhaitent découvrir ou approfondir leur connaissance du musée et de l'histoire de l'art. De plus, la gratuité d'entrée est élargie - ce qui n'était pas le cas auparavant - aux expositions temporaires du Louvre (dix à douze par an) et offre, ce qui est aussi une nouveauté, des réductions aux visites-conférences et activités de l'auditorium du Louvre. Le Louvre, qui a veillé à maintenir la gratuité automatique d'accès, sur justificatif, aux enseignants en art plastique et en histoire de l'art, adopte ainsi une politique tarifaire incitative et généreuse à l'égard des enseignants. C'est donc bien pour renforcer l'effet prescripteur de la mesure que le conseil d'administration a décidé avec l'accord du ministère de la culture et de la communication et de celui de l'éducation nationale de ne plus accorder la gratuité automatique aux enseignants qui n'amèneraient pas une classe, au moins une fois, dans l'année écoulée. Cette disposition est d'ailleurs déjà appliquée dans des institutions recevant des scolaires, comme la Cité des sciences et de l'industrie. Il convient de souligner que le Louvre encourage aussi le rôle « prescripteur » des responsables d'enseignement supérieur et de formation professionnelle, en développant des accords de partenariat stimulants et novateurs avec ces établissements. Le Louvre a veillé à ce que la mise en oeuvre de sa nouvelle grille tarifaire soit suivie par une augmentation de l'offre événementielle et de l'accompagnement à la visite pour tous les publics, en densifiant et en variant le programme d'expositions, en organisant des événements et en renforçant la programmation pour les jeunes et les familles, notamment les nocturnes. Il témoigne ainsi de son réel attachement à favoriser l'instruction et la formation culturelle des jeunes publics, tout en développant des liens étroits et constructifs avec les enseignants, et en reconnaissant ainsi leur rôle capital en ce domaine.
CR 12 REP_PUB Haute-Normandie O