FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 480  de  M.   de Villiers Philippe ( Députés n'appartenant à aucun groupe - Vendée ) QG
Ministère interrogé :  Premier ministre
Ministère attributaire :  Premier ministre
Question publiée au JO le :  20/03/2003  page : 
Réponse publiée au JO le :  20/03/2003  page :  2183
Rubrique :  Union européenne
Tête d'analyse :  politique extérieure
Analyse :  perspectives
DEBAT :

POLITIQUE EXTÉRIEURE EUROPÉENNE

    M. le président. La parole est à M. Philippe de Villiers.
    M. Philippe de Villiers. Monsieur le Premier ministre, au cours du week-end dernier, aux Açores, trois chefs de gouvernement de l'Union européenne se sont réunis autour du président des Etats-Unis pour affirmer, à propos de l'Irak, une position rigoureusement contraire à tous les efforts de la diplomatie française, dont chacun, sur tous les bancs de cet hémicycle, a salué la cohérence et le panache.
    Or, au même moment, et parallèlement à l'expression de ces tropismes diplomatiques inconciliables, il y a comme un acharnement à vouloir mettre en place coûte que coûte une politique européenne étrangère unique,...
    M. Jean Glavany. Ce n'est pas demain la veille, hélas !
    M. Philippe de Villiers. ... qui viendrait comme un carcan contraindre les Etats membres.
    La contribution conjointe franco-allemande a elle-même préconisé et réclamé cette politique extérieure unique, décidée à la majorité, ce qui, naturellement, disqualifie définitivement le compromis de Luxembourg.
    La convention présidée par M. Giscard d'Estaing propose la création d'un poste de ministre des affaires étrangères européen.
    M. Maxime Gremetz. Qui parlerait d'une seule voix !
    M. Philippe de Villiers. Plus surprenant encore, le Gouvernement a déposé récemment un amendement allant dans le même sens.
    Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : à la lecture des dernières déclarations et à la lumière des derniers événements, pouvez-vous faire en sorte que nous ayons une position cohérente, visant à préserver la liberté de la France dans sa politique étrangère ?
    Comment pourrait-on en effet considérer que le droit de veto est essentiel au Conseil de sécurité des Nations unies et deviendrait superfétatoire dans le cadre des institutions européennes ?
    Comment peut-on imaginer une politique étrangère unique, votée à la majorité qualifiée ?
    M. le président. Merci, monsieur de Villiers.
    M. Philippe de Villiers. Si tel était le cas, aujourd'hui, à l'heure où nous sommes, nous assisterions impuissants au départ des soldats français en Irak (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
    M. Renaud Donnedieu de Vabres. Caricature !
    M. Philippe de Villiers. ... pour aller faire là-bas une guerre que nous ne voulons pas. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    M. le président. Merci, monsieur de Villiers, vous allez maintenant écouter la réponse à votre question.
    M. Philippe de Villiers. Bref, comment vouloir garder les mains libres à New York et à Paris et les avoir liées à Bruxelles ?
    M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
    M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, avant d'exprimer mon désaccord sur votre vision européenne, je voudrais saluer, en votre nom, tous les marins vendéens qui, aux côtés des marins basques, ont participé à la lutte contre les dégâts provoqués par le naufrage du Prestige. Il s'est agi d'un combat très important, et je voulais saluer ceux qui y ont participé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. Quel rapport avec la question ?
    M. le Premier ministre. J'en viens à votre question.
    Les difficultés ne justifient pas les renoncements. Or, actuellement, nous sommes dans une période où les difficultés sont grandes : il est vrai que, sur l'affaire irakienne, nous avons un profond désaccord avec le Royaume-Uni et l'Espagne. Toutefois, ce n'est pas parce que nous avons un désaccord que nous avons des humeurs ou des rancoeurs.
    Il est clair que la construction européenne est au coeur de la vision du monde que défend la France. Pourquoi nous battons-nous aujourd'hui avec tant de force au sein du Conseil de sécurité de l'ONU ? Parce que nous le faisons pour une vision du monde multipolaire, pour la diversité et contre le choc des civilisations. Et, pour cela, nous avons besoin de l'Europe.
    Pour que le pôle européen puisse équilibrer le monde, nous avons besoin d'une Europe qui soit porteuse des valeurs qui sont les nôtres, et que nous ne soyons plus, à l'avenir, les seuls à défendre les idées que notre histoire et nos convictions nous ont données. Avec une Europe forte, le monde sera davantage équilibré.
    Cependant, il est vrai, monsieur le député, que ni la géographie ni l'histoire...
    M. François Hollande. Ni les sciences naturelles ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
    Monsieur le premier ministre. ... n'ont rendu l'Europe évidente : la géographie nous sépare et l'histoire a fait que nous avons pu nous entretuer.
    Il est évident, comme l'a écrit Edgar Morin dans son superbe ouvrage, Penser l'Europe, que nous sommes une communauté de destin et que l'Europe est un besoin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et, dans la langue de Jean Monnet, l'Europe était aussi synonyme de paix. C'est pour cela qu'il faut se battre pour cette idée et pour essayer de construire l'Europe, en dépit de toutes les difficultés auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui.
    Du reste, ces difficultés, nous réussissons à les surmonter, y compris sur des sujets aussi délicats que celui de la défense : dans quelques jours, c'est l'Europe qui prendra la relève de l'OTAN en Macédoine. De même, de grands groupes industriels français participeront à la construction du futur porte-avions britannique. Cest dire que, en dépit des difficultés internationales, nous continuons de progresser.
    Certes, il reste encore des pas importants à faire, mais l'Europe doit trouver la force de surmonter les difficultés et d'oeuvrer pour son avenir. C'est pour cela que nous restons européens et que nous défendrons nos principes et nos convictions avec autant de force à Bruxelles qu'à New York. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
    Un député du groupe socialiste. C'est digne du café du commerce !
    

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