FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 49103  de  M.   Schneider André ( Union pour un Mouvement Populaire - Bas-Rhin ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  19/10/2004  page :  8025
Réponse publiée au JO le :  03/05/2005  page :  4499
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Soudan
Analyse :  Darfour. situation politique
Texte de la QUESTION : M. André Schneider appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation du Darfour province de l'Ouest soudanais. En effet, cette région est en proie à une guerre civile qui a fait déjà plus de 10 000  victimes et contraint 1,2 million de personnes à quitter leur village. Chaque jour les droits de l'homme sont violés, et la stabilité de l'ensemble de la région est menacée. Aussi il lui demande quelles sont les intentions de la France vis-à-vis de l'ONU, seule habilitée à intervenir au nom de la Communauté internationale.
Texte de la REPONSE : La signature de l'accord de paix de Nairobi le 9 janvier 2005 entre le gouvernement soudanais et la rébellion sudiste du Mouvement populaire de libération du Soudan (MPLS) est un facteur d'espoir pour le Soudan et pour le continent africain dans son ensemble. Cet accord met en effet un terme au plus ancien et sans doute au plus meurtrier des conflits africains. Il crée également une dynamique positive qui permettra, nous l'espérons, de faciliter la résolution de la crise du Darfour. La paix retrouvée doit maintenant permettre de reconstruire le Sud-Soudan, une des régions les plus défavorisées de la planète. Les attentes et les besoins des populations sont considérables. Quatre millions de déplacés et un million de réfugiés sont susceptibles de rentrer dans leurs foyers. La communauté internationale doit se mettre en mesure de relever ce défi. Pour sa part, la France a décidé, à titre bilatéral, d'engager au Soudan près de 10 millions d'euros d'aide pour les trois années à venir. La France, par ailleurs, encourage la reprise de la coopération européenne avec le Soudan. La Commission européenne dispose pour le Soudan d'une enveloppe de 400 millions d'euros (dont 24,3 %, soit près de 100 millions d'euros, sont financés par la France). Elle a d'ores et déjà annoncé le déblocage de 50 millions d'euros à la suite de la signature, le 25 janvier 2005, du document de stratégie pays entre le commissaire européen, M. Louis Michel, et le vice-président soudanais, M. Ali Osman Taha. Les futurs décaissements européens seront, bien entendu, soumis à la bonne application de l'accord de paix de Nairobi, mais aussi à l'amélioration de la situation dans le Darfour. La communauté internationale doit maintenant jouer un rôle actif pour s'assurer de la bonne application de l'accord du 9 janvier. Le Conseil de sécurité est en train d'examiner la mise en place, sur proposition américaine, d'une opération de maintien de la paix de 10 000 hommes destinée à assurer l'application de l'accord de paix. Cependant, si la signature de l'accord du 9 janvier 2005 est une condition nécessaire pour envisager le retour de la paix et la reconstruction du Soudan, elle reste non suffisante en raison de la persistance de la crise du Darfour, qui est depuis l'origine au coeur des préoccupations de la France. Le succès dans le Sud ne doit pas faire oublier le Darfour, où la situation demeure très grave : multiplication des ruptures du cessez-le-feu, violations constantes des droits de l'homme, précarité absolue des conditions de vie des déplacés et des réfugiés (plus de deux millions de personnes ont été forcées de quitter leurs foyers sur une population totale de six millions d'habitants). Cette situation est d'autant plus préoccupante que le conflit du Darfour est un facteur de déstabilisation pour les pays voisins, notamment le Tchad et la République centrafricaine, mais aussi la région des Grands Lacs. La France s'est impliquée la première dans la résolution de ce conflit. Àtitre bilatéral, nous avons multiplié les échanges avec les autorités soudanaises. Ainsi, dès février 2004, M. Dominique de Villepin, alors ministre des affaires étrangères, s'était rendu au Tchad (à N'Djamena et dans le camp de Forchana) puis au Soudan. M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, s'est quant à lui rendu fin mai à N'Djamena, tandis que le secrétaire d'État aux Affaires étrangères, M. Renaud Muselier, est allé fin juin à Khartoum puis dans le Darfour afin d'y évaluer la situation dans les camps de déplacés d'El Geneina et de Mornei. Le ministre des affaires étrangères, M. Michel Barnier, s'est rendu sur place le 27 juillet à N'Djamena puis dans le Darfour, à El Fasher, dans le camp de déplacés d'Abou Shok. Le ministre de la défense, Mme Michèle Alliot-Marie, était à son tour le 6 août à Abéché, au Tchad. Michel Barnier s'entretient par ailleurs régulièrement avec son homologue soudanais, reçu encore le 12 février dernier à Paris. Il envisage de se rendre de nouveau au Soudan prochainement. La France a d'abord souhaité répondre à l'urgence humanitaire. Notre aide humanitaire bilatérale et multilatérale, via l'Union européenne et les agences spécialisées des Nations unies, s'élève aujourd'hui à 40 MEUR. Au total, nous avons engagé pour le Darfour près de 64 millions d'euros d'aide humanitaire et politique (soutien à la force de l'Union africaine ainsi qu'aux négociations de paix). Pendant la saison des pluies 2004 (août-septembre), nos moyens militaires au Tchad ont été mis à disposition pour acheminer plus de 700 tonnes de fret (équipement, médicaments, compléments alimentaires) de N'Djamena vers les camps de réfugiés situés près de la frontière avec le Soudan, au profit de différents opérateurs humanitaires (Nations unies, ONG). Parallèlement, la France intervient régulièrement dans le cadre de l'Union européenne, à l'occasion des nombreuses consultations (conseils affaires générales, comité politique et sécurité) qui sont consacrées à la crise du Darfour. La France participe enfin activement à la mobilisation du Conseil de sécurité sur ce dossier. Nous avons soutenu le vote de la résolution 1593 qui permet, au-delà de la mise en place d'une opération de maintien de la paix dans le Sud demandée par les États-Unis, de renforcer et d'étendre l'embargo sur les armes dans le Darfour décidé par la résolution 1556, et d'instaurer des mécanismes permettant de sanctionner les personnes responsables de violations du cessez-le-feu, de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire, ou celles qui feraient obstacle au processus de paix. Cette résolution traite également de la lutte contre l'impunité. Les auteurs des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre rapportés par la commission internationale d'enquête mise en place par la résolution 1564 seront poursuivis pour les exactions dont ils se sont rendus coupables. La fin de l'impunité est en effet un préalable indispensable au retour durable de la paix. Sur ce point, la France appuie sans réserve la décision du Conseil de sécurité de saisir la Cour pénale internationale (CPI) pour juger les crimes commis dans le Darfour, suivant ainsi les recommandations du rapport de la commission internationale d'enquête. Dès l'origine, l'Union africaine s'est impliquée avec détermination, sur le terrain comme en appui aux négociations politiques entre autorités soudanaises et représentants de la rébellion. Convaincue de l'intérêt d'appuyer cette mobilisation en première ligne des Africains eux-mêmes, la France appuie résolument ces efforts. L'union africaine a ainsi déployé dans le Darfour une importante mission d'observation et de sécurisation (1 850 hommes actuellement sur le terrain, 3 300 à terme). La France apporte à cette mission un soutien logistique (à partir de nos installations militaires au Tchad) et a mis à disposition un général français, qui exerce les fonctions de vice-président de la commission d'observation du cessez-le-feu, et un officier spécialiste de la planification. Pour compléter le dispositif de l'UA, les forces françaises présentes au Tchad mènent des actions d'observation et de sécurisation à la frontière avec le Soudan, ce qui a permis une stabilisation de la situation dans cette zone particulièrement fragile. Outre un appui financier bilatéral direct, de l'ordre de 2 millions d'euros en 2004 et que nous renforcerons en 2005, nous participons au financement de l'Union européenne, qui a aujourd'hui engagé à cet effet 92 millions d'euros. Ce partenariat entre l' UE et l'UA, dont les résultats sont très satisfaisants, doit être poursuivi et renforcé. Au total, la France reste particulièrement vigilante sur la question du Darfour. La clé du retour à la stabilité du Darfour, mais aussi de la région, est avant tout entre les mains des autorités soudanaises. Le règlement de la crise, humanitaire d'abord, politique ensuite, ne se fera pas sans le Soudan, et encore moins contre le Soudan. Il se fera avec lui, en prenant en considération les intérêts prioritaires des populations aujourd'hui directement menacées, et en confortant les efforts menés par l'Union africaine.
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