CRÉATION DES RÉSEAUX D'ÉCOLES
DANS LE CADRE D'UN EPCI
Mme la présidente. La
parole est à M. Jean-Louis Léonard, pour exposer sa question,
n° 494.
M. Jean-Louis Léonard.
Monsieur le ministre délégué à l'enseignement scolaire, ma question concerne
votre projet supposé de réseaux d'écoles, et plus spécialement leur gestion par
les établissements publics de coopération intercommunale.
La coopération entre les communes et
l'idée de regrouper des équipements scolaires ne sont pas récentes. Elles n'ont
pas besoin d'être imposées car la problématique est parfaitement comprise par
les communes. En effet, l'utilité de la mutualisation des moyens afin d'offrir
les mêmes chances d'accès au savoir et à la formation, au nom de l'égalité
républicaine, n'est plus à démontrer et a présidé au développement des
regroupements pédagogiques. On constate par exemple une progression importante
et régulière du nombre de RPI, les regroupements pédagogiques intercommunaux,
mis en place grâce à des conventions entre les communes. Celles-ci ont largement
compris la nécessité de tels regroupements, notamment dans les zones rurales.
Dans mon pays rochefortais ou dans le pays d'Aunis, situé dans ma
circonscription, ils ont permis aux communes, entre autres, de conserver les
écoles dans des conditions qu'elles avaient choisies et de jouer pleinement le
rôle qui leur a été conféré par le suffrage universel.
Cependant, votre projet reviendrait
à remettre en question le lien fondamental école-commune et le rôle des élus
municipaux. Ce lien fondamental, presque viscéral, entre l'école et la commune
existe depuis toujours. En effet, les communes ont toujours joué un rôle
essentiel dans le fonctionnement et la gestion de leurs écoles. D'ailleurs,
l'article L. 211-1 du code de l'éducation rappelle que « l'éducation est un
service public de l'Etat » mais que la commune y joue un rôle essentiel pour la
mise à disposition des locaux et des équipements, et c'est la grande fierté de
nos institutions.
Aussi faut-il,
même si l'on comprend bien la volonté de rationaliser les moyens, être
particulièrement prudent vis-à-vis d'une approche plutôt comptable, efficace,
certes, mais qui enlèverait à nos communes, c'est-à-dire aux élus municipaux,
l'essentiel de leur vocation à s'investir dans la formation.
Vous comprendrez alors, monsieur le
ministre, l'inquiétude ressentie par les maires de nos circonscriptions à
dominante rurale lorsque vous évoquez le transfert à un EPCI de leurs
compétences en matière de fonctionnement et de gestion des écoles, et plus
encore lorsque les propos qui vous sont attribués - sans doute à
tort - pourraient laisser penser que les incitations financières permettant
la modernisation et le développement des infrastructures scolaires seraient
désormais destinées aux EPCI, et non plus aux communes, comme c'est le cas
jusqu'à présent.
Je sais que la
concertation se poursuit mais, à ce stade de la réflexion, et afin de rassurer
les élus - c'est-à-dire nous-mêmes - pourriez-vous préciser les rôles
respectifs des communes et des EPCI en matière scolaire dans le projet de loi
sur la décentralisation : quel est votre sentiment en la matière, quels seront
vos objectifs et vos directives, et quel sera le réel pouvoir de décision des
communes dans le cadre de ce projet de loi ?
Mme la présidente. La
parole est à M. le ministre délégué à l'enseignement scolaire.
M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire.
Monsieur le député, vous avez raison de rappeler l'attachement viscéral des élus
de la commune à leur école et le lien profond qui lie un maire à celle-ci. Ayant
moi-même été élu d'un département rural, je comprends que chaque maire souhaite
garder son école, car c'est un symbole de vie, d'avenir pour sa commune. Mais
hélas ! les évolutions démographiques et la concentration des activités
économiques ont bouleversé le paysage scolaire, en particulier en milieu rural,
dans des départements comme le vôtre ou comme le mien. Nous le savons,
aujourd'hui, près d'une commune sur trois n'a plus d'école, et près du tiers de
nos écoles sont de très petites structures qui ne comptent qu'une ou deux
classes. Pour tenter de freiner l'exode des élèves vers des centres plus
importants, nous recommandons, mais nous n'imposons pas, de constituer des
réseaux d'écoles adossées aux structures intercommunales. L'objectif est
d'offrir aux élèves des zones rurales les mêmes conditions de travail,
d'encadrement, les mêmes conditions pédagogiques que celles qu'ils pourraient
rencontrer dans des écoles aux effectifs plus nombreux.
La mutualisation des moyens et la
constitution d'équipes pédagogiques ne peuvent se faire qu'en rassemblant les
écoles autour d'un projet éducatif qui réponde aux besoins d'un enseignement
moderne, dynamique et efficace. J'ai donc demandé à chaque inspection d'académie
de préparer, dans le cadre d'une très large concertation, un schéma territorial
qui prenne en compte les données et les tendances démographiques, sociales ou
économiques. Le conseil départemental de l'éducation nationale sera associé à sa
rédaction et à sa mise en oeuvre. Ce schéma constituera une base de réflexion et
de travail qui devrait améliorer sensiblement les conditions d'élaboration de la
carte scolaire annuelle en permettant d'anticiper largement les évolutions
prévisibles. La mise en réseaux, sans contrainte, des écoles, appuyée sur un
schéma territorial pluriannuel, contribuera ainsi à un aménagement équilibré du
territoire.
J'en viens à la
question qui vous préoccupe, à savoir le développement de l'intercommunalité.
C'est une chance pour les écoles et les communes qui pourront associer leurs
forces et offrir aux parents une école performante. L'organisation que je
propose ne modifie pas l'équilibre actuel, fixé par la loi, entre les
compétences des communes et celles de l'Etat pour l'organisation et le
fonctionnement de l'école primaire. La mise en réseau des écoles accompagne le
mouvement volontaire vers l'intercommunalité et profite de sa dynamique.
J'ajoute qu'il n'est nullement dans nos intentions de favoriser financièrement
les intercommunalités par rapport aux communes.
Le projet de loi relatif aux
responsabilités locales contient plusieurs dispositions de nature à faciliter le
traitement des questions scolaires dans un cadre intercommunal et à favoriser la
fréquentation effective des écoles situées dans le périmètre de
l'intercommunalité par les enfants qui y résident. Mais ce sont les élus qui
décideront finalement de s'engager ou pas dans cette voie. Bien entendu, chaque
fois que cela sera possible, nous ferons tout pour qu'une école rurale soit
maintenue dans le cadre communal strict.
Voilà, monsieur le député, je pense
vous avoir rassuré : le projet du Gouvernement est non seulement d'encourager
l'intercommunalité lorsqu'elle semble nécessaire, mais aussi, évidemment,
d'apporter un soutien appuyé aux écoles communales rurales.