FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 52517  de  M.   Blum Roland ( Union pour un Mouvement Populaire - Bouches-du-Rhône ) QE
Ministère interrogé :  affaires européennes
Ministère attributaire :  affaires européennes
Question publiée au JO le :  07/12/2004  page :  9580
Réponse publiée au JO le :  10/10/2006  page :  10564
Date de changement d'attribution :  02/06/2005
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Chypre
Analyse :  événements de 1974. ressortissants français. indemnisations
Texte de la QUESTION : M. Roland Blum attire l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur la situation de vingt-deux ressortissants français ayant perdu leurs biens suite à l'invasion par la Turquie du territoire de la République de Chypre au cours de l'été 1974. Ces ressortissants français se situaient dans la zone nord de ce pays, toujours sous occupation militaire turque. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer les démarches qui ont été entreprises par la France au cours de ces trente dernières années auprès d'Ankara pour obtenir la juste indemnisation de ses ressortissants.
Texte de la REPONSE : Dès la fin des événements de l'été 1974 à Chypre, le ministère des affaires étrangères est intervenu auprès du gouvernement turc pour rechercher une indemnisation en faveur des ressortissants français ayant perdu leurs biens à cette occasion. Cette demande s'est toutefois heurtée à une fin de non-recevoir, les autorités turques ayant fait savoir qu'il n'y avait pas d'occupation à Chypre au sens de la convention de La Haye de 1907 et que seule l'administration autonome chypriote-turque était compétente pour cette partie de l'île. Cette dernière administration n'étant pas reconnue par la France, des pourparlers n'ont pu être engagés avec elle pour un éventuel dédommagement. Par ailleurs, les possibilités d'indemnisation au titre de la législation française ont été examinées mais les demandes n'ont pu être satisfaites en raison du lieu et de la date des dommages. La situation juridique a depuis évolué, du fait de la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme (« arrêts Loizidou » de 1996 et 1998 et « arrêt pilote » Xenides-Arestis de 2005). Dans son arrêt Loizidou c. Turquie de 1996, la cour a statué sur le bien-fondé de la requête de la plaignante, et considéré que le refus de la laisser accéder à ses biens à Kyrenia, au nord de Chypre, relevait de la juridiction de la Turquie au sens de l'article 1er de la Convention européenne des droits de l'homme et lui était donc imputable. La cour a constaté une violation de l'article 1e du protocole 1er à la convention en ce que la requérante avait effectivement perdu la maîtrise de ses biens et toute possibilité d'user et de jouir de sa propriété. À ce jour, cet arrêt n'a toutefois pas été exécuté. Par ailleurs, dans sa décision de recevabilité du 6 avril 2005 dans l'affaire Xenides-Arestis c. Turquie, la cour a jugé que la saisine de la commission d'indemnisation créée le 30 juin 2003 par les « autorités » chypriotes-turques ne pouvait être considérée comme un recours effectif au sens de la Convention européenne des droits de l'homme ; cette commission ne pouvant ordonner la restitution des biens et ne présentant pas de garanties suffisantes d'impartialité. Dans son arrêt Xenides-Arestis du 22 décembre 2005, la cour a exigé qu'une voie de recours effective et adéquate soit mise en place dans un délai de trois mois à compter du prononcé de l'arrêt et qu'il y ait réparation dans les trois mois suivants, l'examen des quelque 1 400 requêtes similaires étant suspendu pendant ce temps. En mars 2006, à la suite de cet arrêt, les « autorités » chypriotes-turques ont mis en place une « Commission des propriétés immobilières », formée de cinq Chypriotes turcs et de deux experts étrangers, en mesure de restituer leurs biens aux Chypriotes grecs spoliés. Au 21 juin, 17 requêtes avaient été introduites devant la Commission, qui avait déjà rendu deux décisions prononçant la restitution des biens et une troisième accordant une compensation. Arguant de ces 17 requêtes, la Turquie a demandé début juillet, lors de l'examen de l'exécution des arrêts de la cour par le comité des ministres, que l'on attende que la cour se prononce sur l'effectivité du recours et que l'on ajourne le suivi de l'exécution de l'arrêt jusqu'à ce que la cour rende sa décision. Le comité des ministres a alors considéré que l'on ne pouvait en effet se prononcer à ce stade sur un éventuel défaut d'exécution de l'arrêt de la cour, mais qu'il convenait néanmoins de maintenir cette question à l'ordre du jour et d'en reprendre l'examen à la prochaine réunion, qui se tiendra les 17 et 18 octobre. Il conviendrait donc, en tout état de cause, pour les ressortissants français qui seraient fondés à faire valoir leur cas auprès de la Cour européenne des droits de l'homme de suivre attentivement l'évolution de cet arrêt-pilote.
UMP 12 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O