Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Marc Roubaud appelle l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur le trafic d'espèces animales et végétales protégées à l'intérieur de l'Union européenne. L'élargissement de l'Europe ouvre aux trafiquants d'espèces menacées un marché de 450 millions de consommateurs potentiels. Entre 1996 et 2002, l'Union a importé légalement 6 millions d'oiseaux, 1,5 million de reptiles vivants, 10 millions de peaux de reptiles et 21 millions d'orchidées. Il existe aussi le commerce illégal : en Allemagne, par exemple, plus de 20 000 animaux et plus de 17 000 plantes ont été saisis en 2002. En conséquence, il lui demande si le Gouvernement envisage de prendre des mesures visant à renforcer la législation commune et la lutte contre le trafic d'espèces protégées.
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Texte de la REPONSE :
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Le ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative au commerce d'espèces protégées. Le commerce international de plus de 30 000 espèces menacées est réglementé par la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, dite CITES. 167 pays ont ratifié cette convention, dont tous les États membres de l'Union européenne. L'objectif de la CITES est qu'aucune espèce ne disparaisse du fait du commerce international. À cette fin, la convention s'est dotée de règles strictes visant à maintenir à un niveau durable les flux internationaux des espèces sauvages et des produits qui en sont issus. Ces règles sont contraignantes et la CITES a démontré son efficacité car, depuis sa mise en oeuvre en 1975, aucune espèce n'a disparu du fait du commerce international. La CITES interdit les exportations et importations à des fins commerciales d'animaux et de plantes appartenant aux espèces les plus menacées, vivants ou morts, ainsi que des produits qui en sont issus. Seuls les animaux issus d'élevages enregistrés, les plantes reproduites artificiellement et les objets anciens échappent à ces interdictions. Pour ce qui concerne les espèces qui ne sont pas actuellement menacées d'extinction mais qui risqueraient de le devenir si leur commerce international n'était pas réglementé, la CITES subordonne les exportations ; d'une part ; à une garantie d'origine licite et, d'autre part ; à un avis scientifique attestant que le prélèvement de l'animal ou de la plante dans la nature ne nuit pas à la conservation de l'espèce considérée ni à l'étendue du territoire qu'elle occupe. L'Union européenne applique une réglementation plus stricte qui prévoit un contrôle scientifique supplémentaire à l'importation. Cette réglementation communautaire élargit par ailleurs le nombre d'espèces concernées par les dispositions de la CITES et harmonise dans chaque État membre les conditions de délivrance des permis d'importation, d'exportation et de réexportation, les modalités de contrôles en frontières ainsi que les conditions de commercialisation intracommunautaire des spécimens appartenant aux espèces les plus menacées. De plus, les autorités scientifiques de tous les pays de la Communauté se réunissent plusieurs fois par an à Bruxelles pour évaluer le statut de conservation des espèces et l'éventuel impact du commerce. Si le volume ou les modalités du commerce en provenance de certains pays sont estimés préjudiciables à une espèce donnée, des avis scientifiques communautaires défavorables sont émis et chaque État membre de l'Union européenne est tenu de suspendre les importations correspondantes. Le strict respect de l'ensemble de ces dispositions communautaires par le moyen d'une réglementation nationale adaptée fut un préalable à l'adhésion en 2004 dans l'Union européenne des dix nouveaux États. Ce dispositif communautaire allant de pair avec une réactivité importante et des contrôles performants, le commerce légal des espèces concernées offre toutes les garanties en matière de préservation de la biodiversité, même si le volume des transactions peut paraître élevé. Les permis CITES attestent de l'origine licite des spécimens et de l'absence de surexploitation des espèces considérées, ils constituent pour leurs détenteurs une sorte de label vert. Il faut savoir par ailleurs que la valorisation économique des espèces sauvages représente in situ une motivation essentielle et souvent indispensable pour que les pays en voie de développement ou dits en transition, qui sont principalement ceux qui hébergent ces espèces à l'état naturel, investissent dans la lutte anti - braconnage et dans la préservation de l'habitat de leur faune et de leur flore. Or cet engagement national est indispensable en amont pour la survie des espèces. Le commerce CITES, dès lors qu'il est légal, participe donc activement au développement durable. Le commerce illégal, par contre, représente un véritable danger. Les profits potentiels en matière de commerce illicite de spécimens CITES se montent à des centaines de millions d'euros, ce qui attire des trafiquants, dont certains sont organisés en réseaux spécialisés. Or les transactions illégales non seulement portent atteinte à la biodiversité, mais elles affectent gravement les circuits licites en leur opposant une concurrence déloyale. Les pays développés, en tant que consommateurs de spécimens CITES, portent à cet égard une lourde responsabilité. En effet, compte tenu de l'impossibilité matérielle de surveiller constamment et efficacement de vastes territoires, les mesures prises par les pays producteurs pour lutter contre le braconnage et le commerce illicite ne peuvent qu'échouer si les pays consommateurs ne complètent pas leur action et si leurs ressortissants n'adoptent pas une attitude responsable. C'est la raison pour laquelle l'Union européenne a mis en place une campagne d'information et un vaste réseau de contrôles, tant aux frontières que sur le territoire national, ainsi qu'une active coopération entre les États membres. Le volume des saisies cité dans la présente question témoigne de l'efficacité de ce dispositif. En France, les douanes, mais aussi la gendarmerie, les directions des services vétérinaires et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage sont chargés de la détection et de la répression des infractions relatives aux espèces protégées. Par ailleurs, la France dispose d'une réglementation nationale extrêmement stricte, interdisant notamment tout commerce portant sur des espèces présentes à l'état naturel en métropole et dans les départements d'outre-m er. Pour lutter contre le trafic d'espèces protégées, il n'apparaît donc pas nécessaire de modifier la réglementation actuelle car celle-ci semble tout à fait adaptée. Le ministère de l'écologie et du développement durable concentre ses efforts sur la mise en oeuvre de cette réglementation et collabore avec les autres ministères concernés pour détecter et démanteler le commerce illicite.
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