EFFECTIFS D'AUXILIAIRES DE VIE SCOLAIRE
POUR LES HANDICAPÉS
M. le président. La parole
est à Mme Marylise Lebranchu pour exposer sa question, n° 52, relative aux
effectifs d'auxiliaires de vie scolaire pour les handicapés.
Mme
Marylise Lebranchu. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, je
souhaite attirer votre attention sur le manque actuel d'auxiliaires de vie
scolaire, que nous avons tous, vous aussi, constaté lors de la dernière
rentrée.
Le Président de la
République a déclaré, lors de sa campagne : « Il faut enfin aider les familles à
prendre en charge un enfant handicapé. Elles doivent aujourd'hui soulever des
montagnes à chaque étape. Scolariser leur enfant, avoir des structures adaptées
pour l'accueillir quand le handicap est lourd, organiser son avenir, notamment
sa vie adulte, autant de soucis obsédants. Pour répondre à ces problèmes, la
nation doit reconnaître le droit à la compensation du handicap. Il faut
définir, pour chaque personne handicapée, un projet de vie et d'abord, pour
chaque enfant handicapé, un parcours de scolarité. Trop d'enfants handicapés
demeurent en effet exclus de l'enseignement. » Je partage ce constat.
Le 14 juillet dernier, lors d'une interview télévisée, le Président a
confirmé ces propos, en indiquant que son troisième chantier prioritaire serait
les handicapés.
Contrairement à
ce qui a pu être dit, y compris par Mme la secrétaire d'Etat aux personnes
handicapées dans la revue de l'Association des paralysés de France du mois
d'octobre, le problème des auxiliaires se pose dès cette année, et nous en
partageons bien volontiers la responsabilité.
Selon les chiffres de la Fédération
nationale pour l'accompagnement scolaire des élèves présentant un handicap, 1
335 enfants sont en attente d'auxiliaires de vie scolaire. Pour ne citer
que la Bretagne, soixante-huit enfants ayant obtenu un accord de la CDES, la
commission départementale de l'éducation spéciale, n'ont pas obtenu l'aide
indispensable à leur scolarité. Certains même, malheureusement, en l'absence
d'auxiliaire pour les accompagner, ont dû renoncer à toute scolarité. Une liste
nominative a été fournie à vos services. Ces enfants se voient donc refuser
l'accès à l'éducation, principe fondamental d'égalité de notre Constitution.
Monsieur le ministre, vous avez
récemment indiqué à la représentation nationale que vous annonceriez un nouveau
dispositif pour les AVS, dès le mois de janvier ou de février. En attendant
qu'il soit mis en place, il paraît indispensable d'octroyer en urgence des
dotations supplémentaires aux établissements scolaires qui ont, dans leurs
effectifs, un enfant bénéficiant d'un accord de la CDES. Les enfants concernés
ne peuvent malheureusement pas attendre la fin de janvier ou le mois de février
pour suivre leur scolarité de manière satisfaisante. Une jeune fille
m'expliquait récemment qu'elle devait passer le bac de français avec l'aide
d'une personne, puisqu'elle ne peut pas écrire seule. Cet apprentissage n'a
toujours pas commencé et aucune date n'est prévue. Je mets de côté tous les
problèmes qu'elle a rencontrés - comme devoir être aidée par les autres
élèves, avec le chariot, pour monter à l'étage assister à certains cours -
en dépit des efforts des enseignants et des accompagnateurs.
C'est pourquoi je souhaiterais,
pour elle et pour les autres, connaître les mesures pouvant être prises dans les
plus brefs délais afin d'éviter à ces enfants de perdre le bénéfice d'une année
scolaire.
M. le président. La
parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de
la recherche.
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale
et de la recherche. Madame la députée, les besoins dont vous faites état
sont réels et la situation est, en effet, désespérante pour certaines familles.
Il faut donc évidemment faire quelque chose. Je ne vais pas polémiquer sur un
sujet aussi grave, mais il est franchement injuste d'incriminer
Mme Boisseau sur ce sujet puisque nous avons trouvé une situation tout de
même stupéfiante : sur les 58 000 emplois-jeunes affectés à l'éducation
nationale, 1 100 seulement sont des aides à la vie scolaire, ces
aides-éducateurs qui aident à la scolarisation des enfants scolarisables, ce qui
est un peu absurde car c'est vraiment une mission prioritaire et urgente. On
aurait pu ne pas attendre que la situation ne devienne dramatique.
En urgence, j'ai donné instruction
aux recteurs de remplacer systématiquement tous les AVS susceptibles de quitter
leur poste.
A la rentrée
prochaine, parce que, malheureusement, je n'ai pas les moyens de le faire avant,
je mettrai en place, comme le Président de la République l'a annoncé lui-même à
l'Elysée, 6 000 aides-éducateurs destinés uniquement à la scolarisation des
enfants handicapés scolarisables. Vous avez cité le chiffre d'environ 1 300.
J'espère donc que nous pourrons ainsi non seulement couvrir les besoins urgents,
la réponse de l'éducation nationale étant indigne aujourd'hui, mais également
ouvrir davantage d'UPI, unités pédagogiques d'intégration, les classes qui, dans
le second degré, s'occupent des enfants handicapés, car l'on ne cesse pas d'être
handicapé parce qu'on passe de l'école primaire au collège ou du collège au
lycée. C'est surtout sur ce point que notre système scolaire n'est pas très
performant. Nous n'avons pas eu le courage de concevoir des parcours de
formation pour les enfants handicapés qui aillent jusqu'au second degré. La
plupart du temps, on a concentré les moyens uniquement sur le premier degré.
Je proposerai donc au mois de
janvier un plan qui permettra à la fois de mieux accueillir les familles, et de
leur éviter de faire un parcours du combattant indigne, de mettre en place les 6
000 AVS, et de construire des parcours de formation pour les enfants
handicapés allant au moins jusqu'au baccalauréat mais aussi jusqu'à
l'enseignement supérieur.
M. le président. La parole
est à Mme Marylise Lebranchu.
Mme Marylise
Lebranchu. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.
Je n'incrimine pas
Mme Boisseau, j'ai dit en posant ma question que nous partagions la
responsabilité de la rentrée scolaire. Vous n'avez pas pu faire face à la
situation entre le mois de juin et le mois de septembre, le collectif budgétaire
ne vous le permettait pas. Je me sens totalement coresponsable de cette
situation.
En revanche,
concernant la période de janvier à juin, en attendant votre plan de la rentrée
de septembre, je pense qu'on pourrait transférer des emplois-jeunes qui ne sont
pas encore « partis » et faire en sorte que 1 335 équivalents
d'emplois-jeunes actuels restent dans l'éducation nationale et prennent en
charge ces enfants. J'ai cité un cas que je connais bien, une jeune fille qui
doit passer le bac de français. Redoubler une classe de première uniquement
parce que, techniquement, on n'a pas pu s'entraîner à l'épreuve, c'est humiliant
et injuste.