FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 53683  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  jeunesse et sports
Ministère attributaire :  intérieur et aménagement du territoire (II)
Question publiée au JO le :  21/12/2004  page :  10169
Réponse publiée au JO le :  15/05/2007  page :  4572
Date de changement d'attribution :  27/03/2007
Rubrique :  collectivités territoriales
Tête d'analyse :  élus locaux
Analyse :  mandats associatifs. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le cumul des mandats associatifs et politiques. Eu égard à la jurisprudence en la matière, de nombreux élus locaux s'interrogent sur la nécessité de se retirer des conseils d'administration des associations locales dans lesquels ils siègent soit à titre personnel, soit en qualité de représentants de leur collectivité publique. Au-delà d'une jurisprudence qui apparaît de plus en plus sévère, il convient également de constater que la doctrine et l'administration, en incitant les élus à prendre toujours plus de précautions, qui deviennent autant de règles pratiques, participent au mouvement de « juridiciarisation » des institutions locales. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser si le Gouvernement entend clarifier les conditions de représentation des collectivités locales aux instances statutaires des associations d'intérêt général. - Question transmise à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Texte de la REPONSE : Les incompatibilités fixées par la loi entre des mandats politiques et d'autres fonctions n'interdisent pas au titulaire de ces fonctions de se porter candidat à une élection, mais s'opposent à la conservation du mandat et de la fonction incompatible, l'élu devant choisir entre les deux dans un délai fixé par la loi. Dans une décision du 30 mars 2000, le Conseil constitutionnel a estimé que, si le législateur peut prévoir des incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions ou activités professionnelles, cette restriction doit être justifiée par la nécessité de protéger la liberté de choix de l'électeur, l'indépendance de l'élu ou l'indépendance des juridictions, en prévenant les risques de confusion ou de conflits d'intérêts. Les règles précisant les fonctions incompatibles avec l'exercice d'un mandat électif sont d'interprétation stricte, et en l'espèce aucune loi n'interdit à un élu local de faire partie des instances dirigeantes d'une association. Néanmoins, dans le cadre de la prévention des conflits d'intérêts, des règles de prudence doivent être appliquées par les élus dans cette situation. L'article 432-12 du code pénal dispose que « le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende ». Pour prévenir le délit de prise illégale d'intérêt, mais aussi pour protéger les élus de toute suspicion, les notions de surveillance et d'administration d'une affaire sont interprétées de manière large par les juges administratifs et judiciaires. En effet, la participation au vote d'un élu intéressé dans une affaire n'est pas nécessaire pour caractériser le délit de prise illégale d'intérêt. Ainsi, une participation même indirecte dans la préparation de la décision, ou la seule présence de l'élu lors du vote de l'assemblée délibérante, peuvent suffire à influencer ce vote, et valent surveillance et administration de l'affaire (cf. CE 9 juillet 2003, caisse rurale de Crédit agricole mutuel de Champagne ou C. Cass. 19 mai 1999, de la Lombardière de Canson). Un élu local membre à titre personnel de l'instance dirigeante d'une association doit s'abstenir de participer, même indirectement, à l'élaboration et au vote de toute délibération du conseil municipal intéressant cette association. Le caractère non lucratif des activités d'une association et/ou l'absence d'intérêt financier personnel d'un élu au sein de cette association rendent difficile la caractérisation du délit de prise illégale d'intérêts, mais ne protègent pas nécessairement les élus de ce risque, ni les collectivités du risque d'annulation de leurs décisions, en particulier dans le cas où les objectifs poursuivis par l'association ne se confondent pas totalement avec les intérêts de la majorité des habitants de la commune (CE 16 décembre 1994, commune d'Oullins). La cour administrative de Marseille a néanmoins considéré, dans un arrêt du 16 septembre 2003 (commune de Vauvert), que si une association, bénéficiaire d'une subvention communale, présente un intérêt communal, et que ses membres ne peuvent en retirer aucun bénéfice personnel, la circonstance que le maire de la commune en soit le président et que plusieurs conseillers municipaux fassent partie de son conseil d'administration n'est pas de nature à les faire regarder comme étant intéressés. Il convient de noter que cette jurisprudence s'applique à une association dont l'objet concernait l'ensemble de la population de la commune, puisqu'il s'agissait notamment de l'organisation de la fête communale traditionnelle. En outre, le Conseil d'État n'a pas établi de distinction selon que l'élu siège à titre personnel à l'instance dirigeante d'une association, ou en tant que représentant de la commune (CE 9 juillet 2003, précité). Il faut rappeler que l'appartenance d'un élu à l'instance dirigeante d'une association, même sans risque de prise illégale d'intérêt, peut entraîner des situations de gestion de fait. Si elle ne saurait à elle seule constituer la gestion de fait, elle constitue un élément du « faisceau d'indices » examiné par le juge pour déterminer le degré de dépendance de l'association vis-à-vis de la collectivité. Il convient donc, en cas de présence d'un élu aux instances dirigeantes d'une association, d'accorder une attention aux règles de prudence visant à prévenir la gestion de fait, notamment l'utilisation des subventions versées par la commune à l'association, comme en témoigne l'arrêt de la Cour des comptes du 24 mars 1994, Darriet, commune de Floirac : « Le versement de subventions à une association doit être considéré comme un élément de participation à la gestion de fait s'il est établi que l'auteur du versement savait quelle sorte d'usage il serait fait des fonds. » Pour être qualifiée d'association « transparente », plusieurs conditions doivent être réunies. L'association doit exercer une mission de service public pour le compte de la commune, ses ressources doivent être essentiellement d'origine publique et les élus ou les fonctionnaires territoriaux, membres de l'instance dirigeante, doivent détenir l'essentiel du pouvoir de décision. Dès lors que ces conditions sont réunies, il y a alors gestion de fait, les fonds de l'association étant considérés comme des deniers publics gérés par une personne qui n'a pas la qualité de comptable public. En tant que gestionnaires de fait, les élus deviennent dès lors justiciables devant la cour de discipline budgétaire et financière, une amende pouvant leur être infligée si leur responsabilité est reconnue, en plus d'un éventuel règlement de débet par le comptable de fait.
UMP 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O