DÉREMBOURSEMENT DE MÉDICAMENTS
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, pour le groupe socialiste.
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Ma question, qui porte sur un sujet déjà abordé par Mme Jambu, s'adresse à M. le Premier ministre, car la réponse de M. Mattei - malgré son ton véhément - ne nous a absolument pas convaincus. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Au cours du week-end de Pâques, votre ministre de la santé a fait passer en catimini un arrêté visant à dérembourser plus de six cents médicaments. La plupart d'entre eux sont pourtant des médicaments fréquemment prescrits et utiles au malade. Cette mesure n'est pas justifiée, elle est tout simplement scandaleuse. La santé publique passe une nouvelle fois derrière les intérêts financiers.
Le précédent gouvernement avait pour sa part permis un classement des médicaments selon leur service médical rendu. L'idée était, dans la concertation, de sortir progressivement du remboursement les médicaments dont le service médical rendu s'avérait insuffisant. Ce que vous faites aujourd'hui est totalement différent : vous vous attaquez à des médicaments dont l'efficacité est réelle, au dire même des médecins, et dont le remboursement est donc pleinement justifié. Cette décision a été prise de surcroît sans aucune concertation, sauf, de l'aveu même du ministère de la santé, avec l'industrie pharmaceutique.
M. Alain Néri. Voilà !
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. Les représentants de l'assurance maladie, des mutuelles et des syndicats de médecin s'y opposent fermement,...
M. Bernard Roman. Eh oui !
Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. ... ne comprenant pas davantage que nos concitoyens les raisons de cet arrêté.
En réalité, cette décision a pour seule raison, et donc pour conséquence, d'opérer un transfert des dépenses de santé sur les ménages, dont les cotisations d'assurance complémentaire devraient augmenter fortement, comme l'a souligné le président de la Mutualité française. Après le rapport Chadelat qui préconise une privatisation de l'assurance maladie et avant la réforme annoncée à l'automne, c'est une nouvelle étape du démantèlement de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) C'est un pas supplémentaire et significatif vers une politique de déremboursement du petit risque, telle que l'a préconisée à l'automne dernier M. Barrot, président du groupe UMP.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Voilà ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme Marie-Françoise
Pérol-Dumont. Cette politique est injuste. Elle tourne le dos au principe de solidarité et de maîtrise médicalisée, pourtant prônée un temps par votre ministre de la santé.
A l'évidence, le démantèlement de la sécurité sociale est déjà en marche. Allez-vous enfin, monsieur le Premier ministre, l'avouer aux Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Madame la députée, je suis un peu surpris. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) A défaut de la forme, je pensais que vous approuveriez le fond.
Vous venez de raconter l'histoire partiellement. Souffrez que je la déroule en totalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) C'est Mme Aubry qui, en 1998, avec beaucoup de perspicacité, a réorganisé la Commission de la transparence et l'a chargée d'évaluer et de répartir chacun des 4 500 médicaments en cinq classes : majeur, important, modéré, faible et insuffisant.
M. Jean Le Garrec. C'est exact !
M. le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. Et elle a signé un décret, que vous pourrez lire à la page 1020 du code de sécurité sociale, selon lequel : « Sont remboursés à 35 % les médicaments dont le service médical rendu n'a pas été classé comme majeur ou important. »
Le Gouvernement n'a pas touché aux médicaments à effets majeur ou important, conformément au décret signé par Mme Aubry. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
J'ajoute que Mme Guigou a pris deux arrêtés, en septembre et en décembre 2001, déremboursant 309 médicaments (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) pour un montant de plus de 300 millions d'euros !
Les choses sont claires : comme l'a dit le Premier ministre, quand on trouve quelque chose de bien, on le garde ; quand ce n'est pas bien, on l'écarte. En l'espèce, nous avons trouvé que cette mesure était judicieuse, qu'elle reposait sur du bon sens et nous l'avons complétée par une politique fondée sur l'innovation. C'est cela le coeur de la solidarité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)