Texte de la QUESTION :
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M. Christian Estrosi attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'interdiction des symboles nazis dans l'Union européenne. En cette période de célébration du 60e anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz et après le scandale provoqué par le prince Harry arrivé à une fête déguisée arborant à son bras une croix gammée, cette idée vient d'être lancée au niveau européen par plusieurs eurodéputés allemands. Outre-Rhin, le fait de porter de tels signes est un délit passible de poursuites judiciaires. De son côté, le commissaire européen chargé de la justice, de la liberté et de la sécurité a assuré être prêt à réfléchir à la possibilité juridique d'une telle interdiction et à son utilité. Il a également souligné que cette affaire devrait surtout être l'occasion de réveiller le débat sur le rapprochement des législations antiracistes européennes. Une proposition de loi en ce sens est bloquée depuis 2003 au conseil des ministres du fait de l'Italie et du Royaume-Uni, qui estiment qu'elle va à l'encontre de la liberté d'expression. Il souhaiterait connaître sa position sur ce sujet.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la lutte contre les infractions à caractère raciste ou xénophobe constitue une priorité absolue pour le ministère de la justice, compte tenu de la recrudescence de ce type de comportements qui se manifestent de manière de plus en plus violente et indigne. L'arsenal législatif actuel permet de sanctionner pénalement - selon une échelle des peines adaptée à la gravité des faits - les comportements évoqués par l'honorable parlementaire. Ainsi, le fait de porter ou d'exhiber en public un uniforme, un insigne ou un emblème nazi est puni par l'article R. 645-1 du code pénal de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe, sauf lorsque l'usage d'un tel symbole s'explique par les besoins d'un film, d'un spectacle ou d'une exposition comportant une évocation historique. Par ailleurs, si le symbole arboré sert à illustrer un discours ou un écrit public visant à mettre en valeur l'un de ces crimes, ou au contraire à en minimiser l'existence ou l'étendue, ou encore à inciter à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne pour des motifs racistes ou xénophobes, ces faits peuvent se voir appliquer les peines prévues par les articles 24 et 24 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (faits d'apologie ou de contestation de crimes contre l'humanité, et d'incitation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciales). Au sein de l'Union européenne, des négociations sont en cours, portant sur un projet de décision-cadre relatif à la lutte contre le racisme et la xénophobie, dont l'objet est d'harmoniser la définition des infractions et le niveau des sanctions applicables en cette matière. Il s'agit d'une négociation difficile, du fait d'un clivage culturel très fort entre les États membres de l'Union européenne sur la conception de la liberté d'expression. La reprise des discussions sur ce texte, à l'initiative de la Présidence luxembourgeoise, doit être approuvée. Compte tenu de la multiplication récente des infractions racistes, le garde des sceaux sera particulièrement vigilant au sein du conseil JAI, afin que le texte conserve un niveau d'ambition élevé.
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