CONSÉQUENCES DU NOUVEAU DISPOSITIF
DE RECENSEMENT POUR LES COLLECTIVITÉS LOCALES
M. le président. La parole
est à M. Daniel Garrigue, pour exposer sa question, n° 565, relative
aux conséquences du nouveau dispositif de recensement pour les collectivités
locales.
M. Daniel Garrigue. Madame
la ministre déléguée à l'industrie, ma question porte sur les nouvelles
modalités du recensement de la population. La loi du 27 février 2002
sur la démocratie de proximité et le décret du 5 juin 2003 en ont en
effet réorganisé les modalités.
C'est vrai que, dans le principe,
ce changement paraît positif. Jusqu'à présent, on effectuait de grands
recensements tous les neuf ans, lourds à organiser et à gérer, et, ensuite, on
restait pendant un grand nombre d'années sans avoir le moindre élément sur
l'évolution de la population.
La
nouvelle méthode retenue devrait permettre, par des sondages opérés chaque année
à partir d'échantillons, d'avoir une bien meilleure connaissance année après
année de l'évolution de la population et de donner ainsi aux responsables des
villes, des communes, des informations régulières à ce sujet. Cela devrait aussi
avoir des incidences sur l'attribution d'un certain nombre de dotations de
l'Etat.
La méthode retenue
consiste à diviser le territoire communal en cinq groupes d'adresses, chaque rue
se trouvant divisée et comprise elle-même dans chacun des cinq groupes. Le
territoire communal devient ainsi une sorte de peau de léopard et, chaque année,
on procède à l'intérieur de l'un des groupes à des recensements par échantillons
qui portent sur environ 8 % du territoire communal, ce qui fait qu'au bout
de cinq ans, on devrait avoir une vision assez juste de l'évolution de la
population.
Le principe paraît
excellent. Pour autant, les difficultés liées à la mise en oeuvre de ce nouveau
mode de recensement ne manquent pas. Ce n'est pas un hasard si, au cours des
derniers mois, toutes les associations d'élus en ont vivement critiqué les
modalités.
La première
difficulté tient au délai de mise en place du nouveau système d'analyse. On part
en effet d'un répertoire des immeubles localisés, que l'on appelle le RIL, fondé
sur le recensement de 1999. Malheureusement, les délais donnés aux communes pour
vérifier l'exactitude de ce répertoire ont été extrêmement brefs, de l'ordre
d'un mois. J'ajoute qu'il a été demandé à ma commune d'effectuer cette tâche au
mois de juillet, ce qui n'est peut-être pas la période la mieux choisie.
La deuxième difficulté tient aux
conditions de prise en charge de ces opérations par l'INSEE. Lors des grands
recensements précédents, pratiquement la totalité des dépenses engagées par les
collectivités était couverte par les dotations de l'INSEE. Aujourd'hui, nous
sommes très loin d'obtenir cette couverture puisque chaque commune sera obligée
de fournir un coordonnateur, ainsi que les agents recenseurs, soit en recrutant
à l'extérieur, soit en faisant appel à des agents communaux mais qui alors ne
seront plus disponibles pour d'autres tâches.
Je prends l'exemple de Bergerac,
ville de 27 000 habitants dont je suis le maire. Pour une dépense totale
évaluée à 20 000 euros environ, la dotation de l'INSEE ne s'élèvera qu'à 4 200
euros ! Ce problème est évoqué par l'ensemble des maires de France, preuve de sa
réalité.
Enfin, la date choisie
pour le recensement ne me paraît pas non plus idéale puisqu'elle coïncide avec
les vacances de février, ce qui n'est pas non plus la meilleure période.
Madame la ministre,
qu'envisagez-vous pour corriger les différents défauts qui caractérisent les
modalités actuelles du recensement, qu'il s'agisse des délais ou du financement
?
M. le président. La parole
est à Mme la ministre déléguée à l'industrie.
Mme
Nicole Fontaine, ministre déléguée à
l'industrie. Monsieur le député, la collecte de la première enquête annuelle
de recensement a commencé en effet le 15 janvier et je ne doute pas
qu'elle sera un succès, grâce à l'engagement actif des communes.
Je tiens à souligner que le nouveau
recensement a fait l'objet d'une large concertation, à tous les niveaux de sa
mise en oeuvre, via notamment le Conseil national de
l'information statistique.
S'agissant des charges occasionnées
par l'enquête, je vous rappellerai que le recensement s'est, de tout temps,
effectué à frais partagés entre l'Etat et les communes.
La loi de février 2002 a certes
redéfini avec précision les responsabilités respectives, sans pour autant
bouleverser le partage des tâches. Seul l'encadrement des agents recenseurs est
désormais dévolu à la commune.
Pour sa part, l'Etat a toujours
financé l'ensemble des moyens de conception du recensement : impression des
imprimés, exploitation des questionnaires, fabrication des produits de diffusion
des résultats.
A cet égard, non
seulement le montant de la dotation forfaitaire de 17,5 millions d'euros versée
aux communes sera supérieur au remboursement qui avait été versé lors du
recensement de 1999, mais encore les communes auront la libre disposition, quel
que soit leur choix, de recourir ou non à leur propre personnel pour traiter ces
opérations.
La part de l'Etat a
été quant à elle significativement augmentée puisque l'INSEE prendra en charge
plus de 12 millions d'euros chaque année par redéploiement de ses
crédits.
Les délais dont les
communes de 10 000 habitants ou plus ont disposé pour l'élaboration du
répertoire d'immeubles localisés ont été brefs, j'en conviens.
Dès cette année, pour la très
grande majorité d'entre elles, les opérations seront beaucoup plus légères avec
la seule mise à jour des apparitions et disparitions d'adresses.
En outre, pour la collecte de 2005,
l'INSEE veillera à ce que ces délais s'établissent en concertation avec chacune
des communes concernées.
Enfin,
pour ce qui est de la période de l'enquête, aucune date dans l'année n'a fait
l'objet d'un consensus parmi les très nombreux responsables de communes que
l'INSEE a rencontrés depuis fin 1999.
Si on tient compte des nécessités
de la préparation de l'enquête de recensement, parmi les deux périodes
préférables aux autres, nous avons retenu janvier-février. Elle permettra de
tenir compte de l'enquête de recensement la plus récente dans les chiffres de
population prenant effet au 1er janvier suivant.
Cela étant, ce sujet pourra
naturellement faire l'objet d'un débat au sein de l'instance d'évaluation des
nouvelles modalités de collecte du recensement qui sera mise en place au premier
semestre 2004, conformément au souhait du CNIS.
Cette instance regroupera des
représentants des associations d'élus, des représentants des associations de
cadres de direction des communes et des techniciens.
Je suis convaincue, monsieur le
député, que ces nouvelles modalités permettront à l'Etat et aux communes de
porter le recensement au meilleur niveau, et je remercie vivement les élus
locaux de tout ce qu'ils feront à cet effet.
M. le président. La parole
est à M. Daniel Garrigue.
M. Daniel Garrigue. Madame
la ministre, je ne conteste pas l'intérêt de cette nouvelle méthode de
recensement, qui s'appuie certainement sur des techniques statistiques éprouvées
et qui permettra de disposer d'informations régulières et sans doute assez
rapidement très fiables.
En
revanche, sur les délais, je prends acte des améliorations possibles dans les
prochaines années - sans doute nos difficultés sont-elles liées à la mise en
place du nouveau système, mais elles sont néanmoins lourdes.
S'agissant de la question de la
prise en charge, vous nous dites que, jusque-là, elle se faisait à frais
partagés entre l'Etat et les collectivités, c'est vrai. Mais aujourd'hui, le
partage n'est plus très égal, et même si c'est à frais partagés les communes ont
vraiment le sentiment que ce sont elles qui supportent la charge la plus lourde.
(Applaudissements sur les bancs du groupe
socialiste.)