PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE
M. le président. La
parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe UMP.
M. Christian Estrosi.
Ma question, qui s'adresse à M. le garde des sceaux, concerne l'avenir de la protection judiciaire de la jeunesse, dont la mission fondamentale est d'aider, à la demande de la justice des mineurs, à la réinsertion des jeunes.
Monsieur le garde des sceaux, au moment où votre action dans le cadre de la grande réforme de la justice que vous engagez, conjuguée avec l'action du ministre de la sécurité intérieure, nous permet d'engager une politique de rupture dans le domaine de la lutte contre la délinquance, la Cour des comptes observe, dans le rapport définitif qu'elle vient de publier sur la période 1996-2001, que la PJJ ne remplit plus son rôle.
M. François Lamy. A Nice !
M. Christian Estrosi. Gabegie budgétaire, gestion calamiteuse des ressources humaines, avantages matériels injustifiés...
M. Michel Bouvard. Tout à fait !
M. Christian Estrosi. ... tels sont les termes employés par la Cour des comptes pour stigmatiser les résultats de la PJJ.
Plus grave encore, la Cour des comptes dénonce également tous les obstacles mis par la protection judiciaire de la jeunesse à la nouvelle politique conduite par le Gouvernement.
M. Roland Chassain. Eh oui !
M. Christian Estrosi. Je pense notamment aux centres d'éducation fermés pour mineurs délinquants, sur lesquels nous fondons les plus grands espoirs pour apporter une réponse alternative à l'enfermement en prison des mineurs.
M. Bernard Roman. Le rapport s'arrête en 2001 ! Comment pouvez-vous dire ça ?
M. le président. Monsieur Roman !
M. Julien Dray. En 2001, il n'y avait pas de centres d'éducation !
M. Christian Estrosi. Alors que vous venez de vous engager à créer 1 250 emplois pour la PJJ dans la loi d'orientation et de programmation pour la justice, entendez-vous réformer le fonctionnement de la PJJ, ou considérez-vous, au contraire, qu'il faut concevoir un nouvel outil, plus moderne et plus performant ? Pour nous en tout cas qui avons pris des engagements devant les Français, il est inacceptable de devoir continuer à subir l'action idéologique de cette institution ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Bernard Roman. C'est scandaleux de dire ça !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur Estrosi, vous évoquez le rapport que la Cour des comptes vient de rendre public, il y a quelques semaines seulement alors que le rapport provisoire avait été rédigé voici maintenant plus d'un an.
M. Julien Dray. Il n'y avait pas, alors, de centres d'éducation !
M. le garde des sceaux. Ce rapport critique notamment la gestion de la PJJ, vous avez raison. J'ai moi-même très vite eu connaissance de la situation préoccupante de cette administration, qui a en quelque sorte implosé au fil des années, et j'ai décidé, dès le mois de septembre dernier, de lancer une réforme systématique, en commençant par l'administration centrale.
J'ai souhaité d'abord renforcer celle-ci, en lui donnant les moyens d'avoir enfin la capacité de définir une stratégie et de contrôler les activités sur le terrain. Ensuite, une modification du recrutement des éducateurs a été adoptée, qui permettra, à l'avenir, de recruter les éducateurs non seulement à la sortie des écoles mais également en cours de vie professionnelle. Par ailleurs, la formation continue de ces éducateurs a été revue pour leur permettre d'être davantage opérationnels sur le terrain. Enfin, l'ensemble des associations para-administratives, qui ont été particulièrement critiquées par la Cour des comptes, et à juste titre car elles ne correspondaient pas à la réglementation, ont été supprimées.
M. Bernard Accoyer. Très bien !
M. le garde des sceaux. Sur le fond, faut-il continuer à engager cette administration sur le terrain ou faut-il passer à autre chose ?
M. Michel Bouvard. Passer à autre chose !
M. le garde des sceaux. Il ressort de mes rencontres avec les éducateurs et les responsables départementaux de cette administration qu'ils se sentent abandonnés, sans directives précises quant à la charge qui leur incombe. Grâce à un renforcement des structures régionales et départementales, nous allons pouvoir donner davantage d'orientations à cette administration. Ainsi, je puis vous indiquer, par exemple, qu'après une période de critiques, d'incertitudes et même d'attentisme, près d'une dizaine de centres éducatifs fermés publics gérés par la PJJ ouvriront dans les prochains mois. Il y a en effet une prise de conscience de la nécessité de s'atteler à la lutte contre la délinquance des mineurs d'une autre manière.
Je fais confiance à ces éducateurs. Je souhaite que cette administration bénéficie d'une nouvelle chance. Encore faut-il, bien sûr, que le pouvoir politique assume ses orientations, qu'il les indique clairement à son administration et qu'il ait le courage de contrôler l'exécution du travail sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)