FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 58  de  M.   Rochebloine François ( Union pour la Démocratie Française - Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  jeunesse et éducation nationale
Ministère attributaire :  jeunesse et éducation nationale
Question publiée au JO le :  16/12/2002  page :  4846
Réponse publiée au JO le :  18/12/2002  page :  6811
Rubrique :  État
Tête d'analyse :  décentralisation
Analyse :  conséquences. centres d'information et d'orientation. personnel
Texte de la QUESTION : M. François Rochebloine attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les vives inquiétudes exprimées par les personnels des CIO à un moment où différentes réflexions relatives à de futures réorganisations, allant notamment dans le sens d'une décentralisation partielle du service public de l'éducation, semblent être menées par le Gouvernement. Considérant que le fonctionnement du réseau des CIO repose notamment sur l'implication de plus de 4 500 fonctionnaires de l'Etat (conseillers d'orientation-psychologues et directeurs de CIO), répartis sur l'ensemble du territoire national dans le cadre de chacune des académies, il apparaît indispensable de conforter un dispositif qui répond aujourd'hui à un véritable besoin, aussi bien pour le suivi, l'évaluation et le conseil individuel en orientation que pour la formation des équipes éducatives chargées de mettre en place des actions d'orientation. Dans le contexte de rigueur budgétaire actuel, le débat sur la décentralisation et les nouveaux transferts de compétences de l'Etat vers les collectivités locales qui pourraient en découler suscite de nombreuses interrogations sur l'avenir des structures, les perspectives d'évolution des statuts des personnels ou encore le niveau des moyens consacrés à la mission d'orientation. Aussi il le remercie de bien vouloir lui apporter des précisions sur l'état d'avancement de ce dossier.
Texte de la REPONSE :

AVENIR DES CENTRES D'INFORMATION
ET D'ORIENTATION

    M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n° 58, relative à l'avenir des centres d'information et d'orientation.
    M. François Rochebloine. Monsieur le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, dans sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre a largement abordé les thèmes de la décentralisation et de la nouvelle gouvernance, qu'il a voulu placer au coeur de l'action réformatrice de l'actuel quinquennat. Globalement, cette orientation reçoit l'assentiment des Français.
    Cependant, au-delà de l'énoncé des grands principes, c'est souvent au niveau du détail des réformes qu'apparaissent les premières difficultés. Celles-ci ont été particulièrement visibles dans le domaine de l'éducation, avec l'apparition des premières crispations ou tensions suscitées par certaines annonces - plus ou moins déformées, je vous l'accorde.
    Il n'en demeure pas moins, monsieur le ministre, que les inquiétudes sont réelles chez certaines catégories de personnels, préoccupées notamment par les perspectives d'évolution de leur métier du fait de probables réorganisations.
    J'en veux pour preuve les questions qui se posent quant à l'avenir des centres d'information et d'orientation. Comptant actuellement 4 500 agents répartis au sein de 600 centres relevant de l'Etat, les CIO assurent, chacun le reconnaît, une mission d'information et d'orientation de premier ordre. Pourtant, force est de constater qu'il n'y a jamais eu en France de vrai débat sur les problèmes de l'orientation. Or nous savons tous l'inadéquation permanente qui persiste entre le marché de l'emploi et l'offre de formation en direction des jeunes. Il est également plus que temps de s'interroger collectivement sur l'organisation et le niveau de moyens consacrés à ce service public indispensable. Sur le terrain, les budgets de fonctionnement de ces structures sont annoncés à la baisse et aucune dépense d'équipement informatique ne serait, dit-on, engagée dans les prochains mois, à en croire des informations en provenance de certaines inspections d'académie.
    Dans ces conditions, que vont devenir les CIO ? Devront-ils fusionner avec d'autres services, comme les missions locales, spécialisées dans l'insertion des jeunes, ce qui reviendrait à privilégier une logique de guichet unique ? A l'inverse, les CIO vont-ils garder leur autonomie, leur organisation actuelle et leurs personnels ?
    Les transferts de compétences qui pourraient résulter de la nouvelle phase de décentralisation devront nous éclairer rapidement. Espérons toutefois que cette affaire sera débattue comme il convient et qu'elle donnera lieu à une véritable concertation à laquelle les personnels devront bien sûr être associés.
    Le cadre régional pourrait être privilégié, nous dit-on. Soit. Mais si cela est confirmé, comment sera géré demain le déroulement des carrières des agents de l'Etat ? Comment la mobilité des personnels sera-t-elle appréhendée ? Le statut actuel de fonctionnaire d'Etat sera-t-il remis en cause ? Y aura-t-il en 2003 un recrutement de directeurs de CIO ? Que deviendront les directeurs de CIO qui, pour des besoins du service, ont accepté des postes éloignés de leur domicile et qui pouvaient chaque année demander une mutation dans un souhait de rapprochement légitime ?
    Tout cela pose une deuxième série de questions sur l'avenir des personnels, directeurs de CIO, conseillers d'orientation, psychologues, etc., qui appellent des réponses précises dont dépendra d'ailleurs pour partie la réussite de la réforme engagée.
    Monsieur le ministre, le Gouvernement a décidé d'ouvrir le vaste chantier de la décentralisation et je m'en réjouis. Mais qu'il me soit permis d'appeler avec insistance votre attention sur l'impact des réformes projetées.
    S'il ne doit pas s'agir de déconcentrer ou de décentraliser à tout prix, la réforme doit s'adresser d'abord et avant tout à ces jeunes Françaises et ces jeunes Français présents dans le système éducatif et qui devront, coûte que coûte, s'insérer sur le marché du travail. Notre responsabilité est grande. Il faut souhaiter que, sur un tel sujet, tous les groupes présents dans cet hémicycle puissent travailler ensemble à la recherche de solutions consensuelles.
    M. le président. La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Monsieur le député, je vous remercie de votre question. Elle touche à un sujet extrêmement important qui nous préoccupe au premier chef, d'autant que les élèves et les familles ont fréquemment le sentiment de ne pas être suffisamment informés sur la réalité de notre système scolaire et sur les possibilités qu'il leur offre. Très souvent, les jeunes me font état d'un manque d'informations concrètes. Ils disent souhaiter pouvoir rencontrer des professionnels, des gens de terrain, connaissant les métiers et capables de leur apporter de vraies réponses aux questions qu'ils se posent sur leur orientation.
    Cette tâche d'information et d'orientation fait, vous le savez, partie des missions de l'éducation nationale, selon les termes mêmes de la loi d'orientation de 1989. Il revient aux équipes enseignantes, et notamment aux professeurs principaux, de répondre aux questions des familles et des élèves en la matière. Mais ces derniers doivent également pouvoir se tourner, c'est parfaitement légitime, vers les 4 500 directeurs de CIO et conseillers d'orientation psychologues, auprès desquels ils peuvent trouver des informations plus fines, plus précises afin d'être convenablement orientés.
    En ce qui concerne la décentralisation, vous me posez une question difficile, à laquelle il serait un peu prématuré de prétendre totalement répondre aujourd'hui ; quoi qu'il en soit, je vais m'y efforcer.
    La quasi-totalité des présidents de région que j'ai rencontrés dans le cadre des réunions organisées sur la décentralisation font état de deux demandes. S'ils aspirent à participer davantage à l'élaboration de la carte des formations professionnelles, et plus généralement à la conception de la formation professionnelle, ils trouveraient normal d'être davantage associés à l'information et à l'orientation, d'autant que, au fond, ils détiennent une part substantielle de cette information qui intéresse tout autant les élèves que les familles.
    Cette demande me paraît, sur le principe, légitime, et le meilleur moyen d'y répondre reste l'expérimentation, sur la base de propositions formulées au niveau des collectivités territoriales et en accord avec les services relevant de plein droit du service public, notamment les services rectoraux. L'expérimentation serait à mes yeux le meilleur moyen d'associer les collectivités territoriales à un copilotage de cette mission d'information et d'orientation, qui ne saurait raisonnablement être séparée de l'élaboration des cartes des formations professionnelles et des plans régionaux de formation. Ce copilotage, qui doit évidemment rester dans le cadre du service public, est non seulement à mon sens légitime, mais réclamé avec insistance par les régions.
    M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.
    M. François Rochebloine. Monsieur le ministre, je vous remercie de toutes ces informations. Je comprends qu'il vous était difficile, en l'état, de m'apporter des réponses plus précises. Cela dit, les expérimentations dont vous parlez ne pourront guère concerner plus de deux, voire trois ou quatre régions, avant d'envisager une mise en application générale de la régionalisation des CIO. Je souhaite en tout cas, comme je l'ai indiqué dans une question, que cette opération soit menée en pleine concertation avec les personnels concernés, c'est-à-dire ces 4 500 directeurs de CIO et conseillers d'orientation. C'est avec eux qu'il faut travailler ; la réussite en dépend.

UDF 12 REP_PUB Rhône-Alpes O