FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 606  de  M.   Terrasse Pascal ( Socialiste - Ardèche ) QOSD
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  03/02/2004  page :  739
Réponse publiée au JO le :  04/02/2004  page :  1265
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  procédures
Analyse :  réfugiés politiques iraniens. arrêtés d'expulsion. assignation à résidence. abrogation
Texte de la QUESTION : M. Pascal Terrasse attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur le fait que le 17 juin 2003, les forces de l'ordre procédaient à l'arrestation de 165 opposants iraniens, tous bénéficiant du statut de réfugié politique. Dans les semaines qui ont suivi, les décisions rendues par la cour d'appel de Paris ont considéré que les intéressés ne présentaient pas un danger pour l'ordre public et qu'il n'y avait pas lieu de prononcer de mise en détention. Dès lors, les arrêtés d'expulsion et les assignations en résidence devenaient sans fondement. A ce jour, trois réfugiés demeurent pourtant oubliés de la République, à Chaumont, à Vesoul et en Ardèche, où se trouve l'un d'entre eux, menacé d'expulsion alors même que pèse sur lui une condamnation à mort en Iran. Puisque aucun lien n'a été établi avec l'OMPI et puisque aucune charge à caractère terroriste n'a été retenue, les droits de l'homme, et singulièrement le droit d'asile, doivent au plus vite reprendre le dessus dans cette affaire. Ces trois réfugiés assignés à résidence vivent dans une incertitude et une angoisse qui ne peut plus durer. Aussi, afin de mettre un terme à cette situation, il lui demande de procéder à l'abrogation de son arrêté d'expulsion et de lever l'assignation à résidence qui pèse sur les trois personnes concernées pour leur permettre de retrouver une vie normale sur notre sol.
Texte de la REPONSE :

SITUATION DE RÉFUGIÉS IRANIENS ASSIGNÉS À RÉSIDENCE

M. le président. La parole est à M. Pascal Terrasse, pour exposer sa question, n° 606.
M. Pascal Terrasse. Monsieur le ministre délégué aux libertés locales, ma question porte sur le sort d'un réfugié politique iranien, M. Majid Chahbazian, opposant au régime des mollahs, actuellement assigné à résidence dans mon département de l'Ardèche, à Privas plus précisément, et de deux de ses amis également assignés à résidence depuis sept mois, respectivement à Chaumont et à Vesoul. Tous les trois sont sous le coup d'un arrêté d'expulsion signé le 20 juin 2003 par le ministère de l'intérieur. Je précise que je n'ai pas la prétention, ici en tout cas, de porter un quelconque jugement sur l'organisation à laquelle ils appartiennent.
Le régime sanguinaire et répressif actuellement en place en Iran inquiète fortement nombre d'entre nous. Hier encore, 140 députés iraniens se sont démis de leurs fonctions pour protester contre la violation des droits de l'homme.
M. Chahbazian croit, comme beaucoup d'ailleurs, que l'on peut instaurer une démocratie laïque en Iran. Il est pacifiste, non agressif et très respectueux des lois de la République. Il est apprécié par beaucoup d'Ardéchois et d'élus locaux. Un comité de soutien a même été mis en place. D'autres réfugiés ont pu regagner Auvers-sur-Oise depuis la rafle - ou plutôt les arrestations qui ont eu lieu. Mais trois d'entre eux n'ont pas pu rejoindre leur résidence.
A Privas, M. Chahbazian est parfaitement intégré : j'ai pu m'en rendre compte à l'occasion des contacts que j'ai pris avec les forces de l'ordre, les services de la préfecture et toutes celles et ceux qui sont directement liés à son assignation à résidence.
Je crois savoir, sans m'immiscer dans la procédure judiciaire en cours, que le juge d'instruction n'a pas trouvé aujourd'hui de charges contre ces trois réfugiés au regard des éléments qui m'ont été communiqués hier par les services chargés de l'instruction de ce dossier, notamment l'avocat de M. Chahbazian.
Peut-être une assignation à résidence est-elle nécessaire. Mais, comme 200 députés britanniques viennent de le souligner, toutes tendances confondues, il serait dangereux d'expulser des opposants au régime iranien.
Nous serions sans doute la seule démocratie européenne à fermer les yeux sur ce qui se passe en Iran.
Compte tenu des éléments que j'apporte, le ministère de l'intérieur devrait revoir au moins partiellement cette assignation à résidence dans le département de l'Ardèche. D'abord, elle coûte très cher aux contribuables, de l'ordre de 100 euros par jour. Ensuite, je ne suis pas certain de son opportunité.
M. le président. La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le député, vous avez bien fait de corriger le mot que vous vous êtes laissé aller à employer. On ne peut pas parler de " rafle " de la part de la police française. Issu d'un peuple qui en a été victime, je sais faire la différence. Notre police doit bénéficier du respect républicain qu'elle mérite car ses façons de procéder n'ont rien à voir avec les méthodes odieuses auxquelles vous avez fait allusion.
M. Chahbazian, auquel vous apportez votre soutien, est indiscutablement membre de l'Organisation des moudjahidin du peuple iranien, même s'il passe pour modéré. Vous savez que ce mouvement est une organisation terroriste qui figure sur la liste établie par l'Union européenne et qui est indissociable du Conseil national de la résistance iranienne derrière lequel elle tend à s'abriter. L'OMPI a, au cours de ces dernières années, revendiqué depuis la France de nombreux actes de terrorisme. Depuis la chute du régime irakien, qui la soutenait - M. Saddam Hussein en était le principal pourvoyeur de fonds -, elle a dû procéder à une réorganisation, en particulier à partir du territoire français. La France, c'est bien naturel, ne souhaite pas accueillir sur son sol une organisation terroriste.
Par ailleurs, le juge d'instruction a placé les trois intéressés, en particulier M. Chahbazian, sous un strict contrôle judiciaire. Il n'est donc pas possible de préjuger des suites que donnera la justice aux instructions qui sont en cours.
Enfin, il convient de remarquer que c'est précisément en vertu du droit d'asile dont les trois intéressés bénéficient actuellement qu'ils ont été assignés à résidence, en attendant de trouver un pays tiers susceptible de les accueillir, s'ils sont expulsés. En tout état de cause, je veux vous rassurer, leur renvoi en Iran est totalement exclu. Une telle décision est même inconcevable puisqu'incompatible avec le droit d'asile.
Je vous rappelle que les intéressés ont usé de leurs droits en déposant un recours contre les mesures dont ils font l'objet devant les juridictions administratives. En particulier, un pourvoi est en cours devant le Conseil d'Etat et, tant que les décisions de justice définitives n'auront pas été rendues, le Gouvernement n'envisage pas de modifier les décisions qui ont été prises.

SOC 12 REP_PUB Rhône-Alpes O