FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 607  de  M.   Balligand Jean-Pierre ( Socialiste - Aisne ) QOSD
Ministère interrogé :  affaires européennes
Ministère attributaire :  affaires européennes
Question publiée au JO le :  03/02/2004  page :  739
Réponse publiée au JO le :  04/02/2004  page :  1267
Rubrique :  Union européenne
Tête d'analyse :  élargissement
Analyse :  conséquences. fonds structurels
Texte de la QUESTION : M. Jean-Pierre Balligand appelle l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur le devenir de la répartition des fonds structurels européens après le prochain élargissement de l'Union européenne (UE). Le 1er mai 2004 vont en effet adhérer à l'Union européenne dix nouveaux pays dont le niveau de développement économique et social est de moitié inférieur à la moyenne de celui des États membres actuels. Cette situation ne laisse déjà pas d'inquiéter les principaux contributeurs au budget communautaire - dont la France - qui ont réclamé, apparemment sans succès, une stabilisation en valeur des dépenses de l'Union européenne. Mais la France est également concernée en tant que destinataire des aides européennes : les régions françaises éligibles aux fonds structurels européens au titre des objectifs 2 et 3 se savent profondément liées à l'évolution institutionnelle de l'Europe. Bénéficiaires jusqu'en 2006 - conformément au document unique de programmation élaboré à cet effet en 2000 et 2001 - des aides du Fonds européen de développement régional (FEDER), du Fonds social européen (FSE), du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) ou de l'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP), ces régions craignent ainsi, à la faveur du prochain budget communautaire, de voir disparaître la quasi-totalité des subventions acquises au profit des nouveaux entrants dans l'Union européenne. L'élaboration de leurs projets d'investissement exigeant du temps, de l'anticipation et une relative sécurité financière, ces territoires attendent de savoir dès aujourd'hui s'ils pourront toujours, et dans quelle proportion, compter sur les fonds structurels européens pour la période 2007-2013. Il la remercie par conséquent d'apporter une réponse précise et circonstanciée à cette légitime revendication.
Texte de la REPONSE :

CONSÉQUENCES
DE L'ÉLARGISSEMENT DE L'UNION EUROPÉENNE
SUR LA RÉPARTITION DES FONDS STRUCTURELS

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand, pour exposer sa question, n° 607.
M. Jean-Pierre Balligand. Madame la ministre déléguée aux affaires européennes, je souhaite vous interroger sur le devenir de la répartition des fonds structurels européens après le prochain élargissement.
En effet, le 1er mai 2004 vont adhérer à l'Union dix nouveaux pays - Chypre, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République slovaque, la République tchèque, la Slovénie - dont le niveau de développement économique et social est inférieur de moitié à la moyenne de celui des Etats membres actuels, à l'exception notable de Chypre. C'est un vrai problème car leur produit national brut vient d'être publié il y a quelques mois et il est très en deçà des estimations de l'Union européenne. La situation inquiète déjà les principaux contributeurs au budget communautaire, parmi lesquels la France, qui ont réclamé, apparemment sans succès, une stabilisation des dépenses de l'Union en valeur pour les années à venir. Mais la France est également concernée en tant que destinataire des aides européennes. La plupart de nos régions sont éligibles aux fonds structurels européens, notamment au titre de l'objectif 2.
Les régions concernées savent que le sort de ces subventions est profondément lié à l'évolution institutionnelle de l'Europe. Bénéficiaires jusqu'en 2006 - conformément au document unique de programmation élaboré en 2000 et 2001 - des aides du FEDER, du FSE, du FEOGA et de l'IFOP, elles craignent légitimement de voir disparaître, à la faveur du prochain budget communautaire et au profit des nouveaux entrants dans l'Union, la quasi-totalité des dispositifs dont elles bénéficient.
M. Pascal Terrasse. Eh oui !
M. Jean-Pierre Balligand. La réalisation de leurs projets d'investissements réclame une nécessaire sécurité financière. En effet, leur préparation, en collaboration avec les services des régions et de l'Etat - les SGAR - demande facilement un an et demi ou deux ans, et l'exécution des projets importants s'étale sur deux, trois, quatre ans. Nos territoires sont donc en droit de savoir dès aujourd'hui s'ils pourront toujours, dans quelles proportions et selon quelle répartition, compter sur les fonds structurels européens pour la période 2007-2013, notamment pour les années 2007 à 2009 qui correspondent au phasing out, et bénéficier ainsi d'une certaine sécurité financière, compte tenu du volume des budgets mis en place. Les pouvoirs publics ne sont plus au rendez-vous. Hormis les financements locaux ou territoriaux, seuls les financements européens peuvent suppléer au désengagement de l'Etat de ces deux dernières années.
Madame la ministre, le Gouvernement peut-il répondre aux interrogations des élus régionaux sur l'avenir des fonds structurels européens, qui leur apportent la sécurité financière ?
M. Pascal Terrasse. Excellente question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée aux affaires européennes.
Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le député, je comprends votre préoccupation et la juge légitime. Je tiens donc à vous rassurer sur la pérennisation des aides européennes au profit de nos régions.
Tout d'abord, il faut rappeler que l'attribution des fonds structurels européens fait, comme vous le savez, l'objet d'une programmation pluriannuelle. Pour la période en cours, de 2000 à 2006, la dotation de la France est de 16,5 milliards d'euros, soit environ 8,1 % des crédits de l'ensemble de la politique régionale européenne. Il est important de souligner que, pour la période restant à courir, l'élargissement ne modifiera nullement l'enveloppe qui nous est attribuée. En effet, les 21,7 milliards d'euros de crédits d'engagement alloués aux dix nouveaux Etats membres, au titre de la politique régionale européenne, s'inscrivent pleinement dans le cadre des perspectives financières actuelles. L'élargissement de l'Union n'introduira de changement qu'à partir de la prochaine période de programmation, qui s'ouvrira en 2007, quand un déploiement de crédits en faveur des nouveaux Etats membres sera bien entendu nécessaire pour les aider à rattraper leur retard de développement.
Dans cette perspective, la Commission européenne doit rendre publique, le 10 février prochain, une communication générale sur le futur cadre financier pluriannuel de l'Union et, quelques semaines plus tard, un nouveau rapport sur la politique de cohésion économique et sociale. Ces orientations seront suivies de propositions législatives formelles à la fin de cette année, pour permettre l'entrée en vigueur des nouvelles perspectives financières au 1er janvier 2007.
La négociation n'a donc même pas encore commencé. Soyez certain que les autorités françaises entendent y défendre les priorités exposées dans le mémorandum que le Premier ministre a arrêté à la suite du CIADT du 18 décembre 2002.
Permettez-moi de rappeler ces priorités.
Premièrement, nous comptons évidemment nous joindre à l'indispensable effort de solidarité en faveur des nouveaux Etats membres, puisque leur rattrapage économique favorise l'ouverture de nouveaux marchés ainsi que la compétitivité du site global Europe, et va donc dans le sens de l'intérêt général européen. C'est pourquoi nous plaidons pour que le taux d'éligibilité régionale reste fixé pour le futur objectif 1 à 75 % du PIB communautaire moyen par habitant, sans préjudice des dispositions spécifiques qui seront adoptées pour les régions ultrapériphériques.
Deuxièmement, nous mettrons tout en œuvre pour augmenter l'efficacité du système d'attribution des aides régionales correspondant aux objectifs 2 et 3. A cet égard, nous jugeons indispensable de substituer une logique de projet à une logique territoriale de zonage qui s'avère souvent inappropriée par rapport aux programmations souhaitées par les élus. Il faut supprimer le zonage.
Troisièmement, nous sommes tout à fait désireux de valoriser, dans les critères d'attribution, ce qui pourra encourager la compétitivité et le développement durable, qui seront au cœur du nouveau volet de cette politique régionale réorientée à l'échelle de l'Europe élargie.
Vous aurez compris que c'est avec une attention particulière que le Gouvernement examinera les prochaines propositions de la Commission. Nous veillerons à ce que l'ensemble de nos priorités soient respectées, et notamment à ce que nos régions ne relevant pas de l'objectif 1 continuent à bénéficier pleinement, en fonction des nouveaux critères d'attribution, des aides régionales dont elles ont besoin pour pérenniser les projets qu'elles ont engagés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.
M. Jean-Pierre Balligand. Madame la ministre, en tant que président, avec Adrien Zeller, de l'Institut de la décentralisation, je peux témoigner du souci exprimé par beaucoup d'élus régionaux. Nombre de régions françaises, particulièrement celles classées objectif 2 - l'objectif 1 étant réservé aux zones très périphériques -, ont encore beaucoup de casse industrielle : les problèmes de délocalisations d'entreprises - notamment vers certains pays entrants ou vers la Chine - devraient induire l'accompagnement des zones concernées, d'autant plus que leur nombre n'est pas en diminution. La reconversion est un travail sur le long terme.
Pour pouvoir mettre au point des dossiers de reconversion dans ces villes de toute taille, qui sont les poumons de la France régionale, nous devons disposer, au-delà de 2006, d'un programme d'accompagnement sinon jusqu'en 2013, du moins jusqu'à la date d'achèvement des grands dossiers. Je ne conteste pas la nécessité d'aider les nouveaux entrants, mais je crains que l'appel d'air financier venu de l'Est soit tel qu'il ne conduise à un réel abandon des zones françaises concernées. Il faut que l'Etat assure un vrai suivi des dossiers en cours, qui exigent un accompagnement, même si le prochain contrat de plan Etat-région ne le prévoit pas.
SOC 12 REP_PUB Picardie O