Texte de la QUESTION :
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M. Francis Falala appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur certaines conclusions du rapport annuel de la Cour des comptes relatives au manque d'évaluation des politiques de l'emploi. Le rapport note que, outre la trop grande dispersion des données statistiques à ce propos, le « manque d'études ex post » se révèle criant, le Gouvernement privilégiant les simulations avant la prise de décision. Aussi, il souhaite connaître son sentiment et ses intentions relativement à cette situation.
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Texte de la REPONSE :
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Dans son rapport consacré aux politiques de l'emploi, la Cour des comptes note que l'évaluation est essentiellement le fait de la direction de la recherche, des études et de la statistique (DARES), l'INSEE et la direction de la prévision à Bercy, mais elle estime que ceux-ci sont trop peu impliqués dans ce domaine. En outre, elle relève un manque d'études « ex post », le Gouvernement privilégiant les simulations avant la prise de décision. En ce qui concerne l'évaluation des politiques de l'emploi, comme des autres politiques publiques, il convient de distinguer les évaluations a priori - parfois appelées études d'impact, utiles à l'élaboration du projet de loi - et les évaluations a posteriori. Ce ne sont pas seulement les administrations responsables qui peuvent être différentes, mais aussi les délais impartis, les informations disponibles et les méthodes statistiques ou économétriques mobilisées. Pour ce qui concerne le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, l'évaluation a priori de mesures de politique de l'emploi est au premier chef assuré par la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) plus précisément l'ex direction de la prévision et de l'analyse économique (DP), en particulier le bureau marché du travail et politique de l'emploi, avec l'appui au cas par cas de l'INSEE. Cette mission est correctement assurée : l'implication de la DGTPE dans ce domaine est très forte. Les méthodes d'évaluation a posteriori peuvent, quant à elles, relever différents degrés de sophistication. Cependant, la grande majorité des économistes est désormais convaincue qu'il faut utiliser des données individuelles d'entreprises, en exploitant des fichiers administratifs ou des enquêtes, notamment les enquêtes sur l'emploi gérées par la DARES, pour évaluer proprement « ex post » l'effet des politiques de l'emploi. Il s'agit alors d'analyser les comportements des entreprises, notamment les comportements d'emploi, selon que les entreprises aient ou non recouru à telle ou telle mesure. L'exploitation de ces données individuelles d'entreprises exige un travail statistique et économétrique très lourd. Il faut, en premier lieu, procéder à un travail extrêmement soigneux d'appariement de différentes sources (fichiers, enquêtes). Il faut, en second lieu, prendre garde à tenir compte proprement d'éventuels biais : ce n'est généralement pas par hasard qu'une entreprise décide de recourir à telle ou telle mesure de politique de l'emploi. Ces méthodes exigent une connaissance fine des données, et, pour la seconde, des chercheurs à l'avant-garde de la recherche économétrique. Il est donc naturel qu'elles aient été développées pour la première à la DARES, pour la seconde au CREST (centre de recherche du GENES, lui-même direction de l'INSEE). Il est effectivement dommage qu'il n'y ait pas eu d'autres travaux de recherche appliquant les mêmes méthodes micro-économétriques. Compte tenu de la grande spécialisation que ses travaux demandent, les laboratoires de recherche capables de les mener à bien sont en tout état de cause en tout petit nombre. Pour sa part, la DGTPE ne se lance pas elle-même dans des travaux exploitant les données individuelles d'entreprises : il ne peut être question d'engager ces travaux sans les réaliser avec le plus grand soin, ce qui nécessiterait de mobiliser pendant plusieurs mois une grande partie des moyens du bureau chargé des politiques de l'emploi, au détriment du travail courant de conseil au ministre et à son cabinet sur les dossiers en cours d'instruction. Pour résumer, les travaux micro-économétriques d'évaluation rétrospective des politiques de l'emploi constituent une discipline très pointue, dans laquelle certains chercheurs du CREST notamment ont acquis compétence et réputation. Si les travaux de la DARES et du CREST n'ont pas trouvé d'écho dans les laboratoires universitaires, il n'apparaît pas nécessaire de mobiliser des moyens supplémentaire au sein du ministère des finances pour développer ce type de travaux, au détriment de missions essentielles de conseil de politique économique.
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