FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 61075  de  M.   Raoult Éric ( Union pour un Mouvement Populaire - Seine-Saint-Denis ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  22/03/2005  page :  2907
Réponse publiée au JO le :  17/05/2005  page :  5158
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  agressions sexuelles
Analyse :  enfants. inceste. imprescriptibilité
Texte de la QUESTION : M. Éric Raoult attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la reconnaissance comme crime de l'inceste. En effet, à la date de la fin 2004, le mot « inceste » n'existait pas dans le code pénal. On ne retient que l'abus sexuel sous autorité ce qui permet à bien des pervers d'être relaxés, certains juges estimant qu'un frère aîné ou un jeune oncle n'exerce pas de véritable autorité sur une petite fille de 3 ans. Autre aberration : le droit de prescription qui interdit de porter plainte pour abus sexuel au-delà de vingt ans après l'âge de la majorité, alors qu'il faut parfois des décennies pour que la parole se libère. Ainsi, certaines victimes qui parviennent enfin à dénoncer des viols subis à l'adolescence doivent taire ceux de leur petite enfance, les années écoulées ayant entraîné la prescription. Car il est essentiel, « pour guérir », d'être reconnu(e) victime de tout ce que l'on a subi. C'est pour adapter la loi à une réalité terrifiante (20 % des femmes et 7 % des hommes ont été victimes d'agression sexuelle avant leur majorité selon l'association internationale des victimes d'inceste) qu'il faudrait que l'inceste soit reconnu comme un crime imprescriptible. Il lui demande de bien vouloir lui préciser la position du Gouvernement sur ce dossier.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire qu'il est favorable à ce que l'inceste fasse l'objet d'une répression spécifique et explicite dans le code pénal. Une telle modification de notre droit serait en effet de nature à renforcer l'interdit de l'inceste, tout en améliorant la cohérence de la répression de ces actes particulièrement odieux et qui causent d'importants traumatismes chez les victimes. Elle permettrait notamment de poser en principe qu'un enfant ne peut librement consentir à avoir des relations sexuelles avec son ascendant. C'est la raison pour laquelle le Premier ministre a, à la demande du garde des sceaux, confié à M. Christian Estrosi, député des Alpes Maritimes, la mission de réfléchir sur la création dans notre droit positif d'une infraction spécifique de l'inceste, dont il conviendra de définir précisément le contenu, notamment quant aux personnes visées par l'incrimination. Le rapport et les propositions découlant de cette mission, qui devront être remis le 30 juin 2005, permettront l'élaboration d'une réforme des textes actuels. Le garde des sceaux indique toutefois à l'honorable parlementaire qu'il ne lui paraît pas justifié de rendre imprescriptibles les crimes de nature sexuelle commis contre les mineurs. Depuis la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, ces crimes se prescrivent en effet à l'issue d'un délai de vingt ans, au lieu de dix ans comme en droit commun, et ce délai court à compter de la majorité des victimes. Celles-ci peuvent ainsi dénoncer les faits jusqu'à ce qu'elles atteignent l'âge de 38 ans, ce qui correspond le plus souvent à une période de leur vie où leur maturité et leur évolution leur permettent enfin de dénoncer des faits jusque là indicibles, comme l'indique la circulaire d'application des nouvelles dispositions, en date du 14 mai 2004. Il convient par ailleurs de préciser que, contrairement à ce qu'indique l'honorable parlementaire, tous les actes d'inceste dont a pu être victime un mineur, qu'ils soient commis pendant sa petite enfance ou lors de son adolescence, font l'objet de la même prescription, puisque celle-ci ne court qu'à compter de la majorité de la victime, et qu'il n'est donc pas possible que des faits plus anciens soient prescrits alors que des faits plus récents ne le seraient pas.
UMP 12 REP_PUB Ile-de-France O