Texte de la QUESTION :
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M. Patrick Bloche attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnes placées en détention provisoire et atteintes de maladies graves. Récemment, une personne placée en détention provisoire et atteinte d'un cancer s'est vu refuser, pour la sixième fois consécutive, une demande de remise en liberté. L'Observatoire international des prisons s'est d'ailleurs indigné du sort réservé à ce détenu dont le pronostic vital est qualifié par les médecins d'« assez sombre et mis en jeu à court terme ». Cette situation soulève le problème de l'impossibilité pour les personnes en détention provisoire de bénéficier d'une mesure d'aménagement de peine pour raison médicale. La loi 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a en effet créé, par son article 10, la possibilité de suspendre, pour une durée indéterminée, l'exécution d'une peine privative de liberté si la personne est atteinte d'une pathologie engageant à brève échéance le pronostic vital ou si son état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention. Cependant, les personnes en détention provisoire ne peuvent bénéficier d'une telle possibilité puisque, dans l'attente de leur jugement, elles sont présumées innocentes. Seul le juge d'instruction peut alors ordonner la mise en liberté de la personne détenue. Ainsi, contrairement aux détenus condamnés dont la demande de suspension de peine pour raison médicale dépend du juge d'application des peines, la décision de mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire n'est pas détachée des enjeux liés au travail de l'instruction. Il lui demande donc s'il entend apporter des solutions afin que le droit des malades soit mieux garanti et que leur statut prime sur la nature de leur détention.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, appelle l'attention de l'honorable parlementaire sur le fait que la détention provisoire ne constitue pas une peine mais une mesure de sûreté. Ne revêtant aucun caractère répressif, cette mesure n'est pas susceptible de faire l'objet d'une mesure d'aménagement de peine dont le prononcé éventuel relève de la seule compétence des juridictions de l'application des peines. En outre, cette mesure étant nécessairement fondée sur l'un ou plusieurs des motifs de l'article 144 du code de procédure pénale et étant destinée à garantir, dans certains cas particuliers, le bon déroulement d'une procédure judiciaire, elle ne peut, par nature, faire l'objet d'une suspension. Il appartient en effet aux juridictions appelées à intervenir dans le contentieux de la détention provisoire, le juge d'instruction, le juge de la liberté et de la détention, la chambre de l'instruction et, plus épisodiquement, les juridictions de jugement d'apprécier, au seul moment de leur saisine, l'opportunité de la mesure et sa pertinence au vu des nécessités de l'enquête et de la personnalité du mis en examen. Une possible mesure de suspension pour raisons médicales, qui supposerait la possibilité d'une éventuelle reprise ultérieure de la mesure (en cas d'amélioration de la santé du mis en examen), n'aurait guère de sens dans un tel cadre. Il va de soi qu'à l'occasion de l'examen de l'opportunité de la mesure, il appartient aux juridictions de prendre en considération la personnalité de l'intéressé et notamment son état de santé. Afin de se prononcer en toute connaissance de cause ces juridictions disposent de la possibilité d'ordonner des expertises médicales portant notamment sur la compatibilité de l'état de santé du mis en examen avec la détention.
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