Texte de la QUESTION :
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M. Pierre Lang attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur les difficultés d'application de la taxe sur les supports numériques vierges, perçue au titre de la copie privée. Ce mécanisme a été créé en 1985 par le législateur pour compenser les pertes que représentait la copie privée sonore et audiovisuelle pour les auteurs. Avec l'évolution des technologies, la taxe a ensuite été étendue aux CD et DVD vierges, au motif que ces supports numériques pouvaient servir à pirater des oeuvres musicales ou audiovisuelles. Récemment, la commission prévue par l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle a annoncé une baisse de la taxe sur les DVD vierges, en réclamant en contrepartie la création d'une nouvelle redevance sur les clés mémoire USB. Les sommes collectées seraient reversées aux filières musicale et cinématographique. Ce système pose néanmoins des difficultés particulières dans l'environnement numérique. Contrairement aux cassettes audio ou vidéo, les supports tels que les CD, DVD, et maintenant les clés USB, permettent de stocker dans les mêmes conditions des données indifférenciées, qu'il s'agisse de texte, de sons ou d'images. Dans les entreprises, ces outils numériques sont couramment utilisés sur les postes de travail pour la copie et la sauvegarde de fichiers de toutes sortes, produits par les salariés, et pour l'archivage de données sur des serveurs spécialisés. Dans ces situations, la taxe perçue sur les supports vierges au titre de la copie privée trouve ses limites, car son assiette va au-delà de ce qui sert à copier des oeuvres ou des interprétations. De la même manière, la clé mémoire USB, dont la taxation est envisagée, n'est qu'un disque de stockage amovible : on y peut transférer tout document ou fichier informatique qu'on a soi-même rédigé et sauvegardé. C'est pourquoi l'application d'une redevance pour copie privée sur de tels supports numériques continue de susciter des critiques, et son extension aux clés USB prête à discussion. Il souhaiterait connaître sa position sur ce délicat problème.
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Texte de la REPONSE :
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La copie privée est une exception au droit exclusif qui permet aux particuliers de réaliser des copies des oeuvres et prestations protégées pour leur usage privé. Son régime, fixé par les articles L. 311-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle (CPI), met en place un droit à rémunération forfaitaire au bénéfice des auteurs, artistes-interprètes et producteurs d'oeuvres audiovisuelles ou musicales, ainsi qu'aux auteurs et éditeurs des oeuvres de l'écrit et de l'image fixe, depuis la loi du 17 juillet 2001. La rémunération pour copie privée ne constitue pas une contrepartie destinée à compenser les effets de la piraterie qui est une infraction mais correspond à l'exercice d'une faculté légalement reconnue. Dans le prolongement du dispositif arrêté en 1986 pour les supports analogiques (cassettes audio et video), la commission de la copie privée, présidée par un représentant de l'État et composée à parité des représentants des organismes d'ayant droit bénéficiaires et des représentants des redevables - industriels et consommateurs - a été reconstituée en mars 2000 afin de déterminer les taux dans l'environnement numérique caractérisé par le développement rapide de nouveaux supports d'enregistrement. La question de la prise en compte des usages professionnels dans le dispositif de la rémunération pour copie privée a déjà fait l'objet de nombreuses réflexions conduites par la commission de la copie privée et par le ministère de la culture et de la communication. Compte tenu du contexte de mutation technologique, marqué par le caractère indifférencié de l'usage des supports et par la convergence des produits professionnels et grand public, le ministère a préféré maintenir un traitement uniforme des supports, tempéré par un principe d'abattement, pour tenir compte des usages professionnels. Le système actuel de rémunération assure donc, par le biais de la commission de l'article L. 311-5, la prise en compte des usages professionnels : de manière générale, dans la définition du champ des supports assujettis, par l'exclusion du champ de la rémunération des supports destinés, par nature, à des usages professionnels ou familiaux (supports de stockage professionnels, cassettes de caméscope, etc.) ; pour les supports multi-usages (CD et DVD data), par la fixation d'une rémunération proportionnelle à la part que représente la copie privée d'oeuvre dans l'ensemble des utilisations, déterminée en fonction d'études d'usage. L'ajustement des taux est assuré par un processus de révision des décisions. La méthode retenue permet à la commission de prévoir des abattements importants pour les supports qui ne sont que partiellement utilisés pour la copie privée d'oeuvres. Les taux de rémunération sur les CD-R et DVD data, les plus couramment utilisés par les entreprises, ont été diminués de 55 % pour tenir compte de la part d'utilisation professionnelle. En outre, ce mécanisme permet aux particuliers qui utilisent ces supports pour y enregistrer des oeuvres - films ou musique - de payer une rémunération minorée : la rémunération pour copie privée représente 33 centimes pour un CD data de 650 Mo lequel permet d'enregistrer 1 album de musique en format normal et 12 en format MP3. Consciente de la nécessaire prise en compte des usages professionnels, la commission continue à être très vigilante dans l'analyse des taux de copie privée. Elle a ainsi récemment adopté le 6 juin 2005 une décision voté à une très large majorité qui baisse la rémunération due sur les DVD vierges enregistrables dont le montant passe de 1,59 à 1,27 euro. Elle poursuivra, dans le même esprit, l'examen des rémunérations qui devront être appliquées, conformément à la loi, à certains supports et appareils d'enregistrement récemment apparus sur le marché et utilisés pour la copie privée d'oeuvres. Les risques évoqués doivent être relativisés. Les modalités de fixation des tarifs retenues, à savoir des paramètres de calcul objectifs, négociés par les différents participants - ayants droit, industriels et consommateurs - permettent en effet de déterminer des taux de rémunération raisonnables dans le respect d'une égalité de traitement entre les différentes catégories de supports éligibles et des équilibres au regard du droit de la concurrence et du marché.
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