Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Marc Roubaud appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur la politique de protection en cas d'accident nucléaire majeur sur notre territoire. La France, qui a résolument opté pour une politique d'indépendance énergétique et militaire, a vu depuis les années 1950 s'établir des dizaines de centrales nucléaires, disséminées sur tout le territoire. Or, il apparaît que, en cas d'accident nucléaire majeur, les pouvoirs publics ne sont pas en mesure de répondre de façon optimale, en matière de protection des populations civiles notamment. En conséquence, il lui demande si le Gouvernement envisage d'élaborer une véritable stratégie de gestion du risque à l'échelle nationale, et avant tout dans les domaines de la décontamination des territoires et de l'accueil des personnes irradiées.
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Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire demande si le Gouvernement envisage d'élaborer une véritable stratégie de gestion du risque à l'échelle nationale et avant tout dans les domaines de la décontamination des territoires et l'accueil des personnes irradiées. En matière de sûreté nucléaire, l'organisation des pouvoirs publics a évolué régulièrement dans le souci permanent d'une amélioration continue. La préparation à la gestion de crise exige la réalisation régulière d'exercices faisant appel à tous les acteurs concernés : exploitants, experts, pouvoirs publics, collectivités territoriales et populations. Les principales structures chargées de la sûreté nucléaire sont : l'autorité de sûreté nucléaire (ASN), composée d'une direction générale, la DGSNR et de onze divisions interrégionales, les divisions de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DSNR) placées au sein des directions régionales de la recherche, de l'industrie et de l'environnement (DRIRE), exerce le contrôle de la sûreté des installations nucléaires mais aussi le contrôle de la radioprotection dans tous les lieux où sont utilisés les rayonnements ionisants ; le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND), autorité compétente pour le nucléaire intéressant la défense ; l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), organisme d'expertise pour les installations civiles et pour les installations relevant de la défense ; la mission d'appui à la gestion des risques nucléaires (BRM/MARN) qui anime la réflexion du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire et des préfectures pour l'élaboration de dispositifs de protection des populations en réponse aux risques nucléaires ; le secrétariat général de la défense nationale (SGDN) qui assure le secrétariat du comité interministériel aux crises nucléaires ou radiologiques (CICNR). Il est chargé de veiller à la cohérence interministérielle des mesures planifiées en cas d'accident et de veiller à la planification d'exercices et à leur évaluation. Le CICNR est un comité réuni sur l'initiative du Premier ministre. Sa mission est de coordonner l'action gouvernementale en cas de situation d'urgence radiologiques ou nucléaire. L'autorité de sûreté nucléaire assure, au nom de l'État, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France, pour protéger les travailleurs, les patients, le public et l'environnement des risques et nuisances liés aux activités nucléaires, et plus largement, aux rayonnements ionisants et contribue à l'information des citoyens dans ces domaines. Elle est placée sous l'autorité conjointe des ministres chargés de l'industrie et de l'environnement pour le contrôle de la sûreté nucléaire et du ministre chargé de la santé pour le contrôle de la radioprotection. Elle est rattachée au plan de la gestion administrative au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie (décret n° 2002-255 du 22 février 2002 modifiant le décret n° 93-1272 du 1er décembre 1993 et créant une direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection publié au JO du 26 février 2002). Le DSND assure une mission voisine de celle de l'autorité de sûreté (ASN) civile assurée par la DGSNR pour les installations et activités nucléaires intéressant la défense (décret n° 2001-592 du 5 juillet 2001). Il est placé sous la double tutelle du ministère de la défense et du ministère chargé de l'industrie. Un protocole entre le DGSNR et le DSND a été élaboré pour assurer la coordination entre ces deux entités lors d'un accident affectant une activité contrôlée par le DSND afin de faciliter la transition de la phase d'urgence gérée par le DSND, vers la phase post-accidentelle pour laquelle la DGSNR est compétente. Deux circulaires concernant la mise en place et l'organisation des plans de secours pour protéger les biens, l'environnement et les populations ont été adressées aux préfets pour leur permettre de disposer de plans plus opérationnels : l'une en date du 10 mars 2000 concerne les PPI (plans particuliers d'intervention) nucléaires à mettre en place autour des INB(S) - installations nucléaires de base civiles ou secrètes (intéressant la défense) ; l'autre, en date du 23 janvier 2004 imposant dans la totalité des départements de métropole la rénovation de leur PSS-TMR (plans de secours spécialisés concernant les transports de matières radioactives). Au premier semestre 2005 et dans le cadre de directives interministérielles publiées au Journal officiel de la République française, l'organisation des pouvoirs publics en cas d'événement entraînant une situation d'urgence radiologique en vigueur depuis la décennie 1980 et régissant la sécurité nucléaire a été simplifiée et mise à jour. Les pouvoirs publics animent une politique exemplaire en matière d'exercices nationaux de simulation de crise pour être en mesure de faire face à une éventuelle gestion de crise : la gestion de la crise s'appuie sur des plans de secours et la mise en situation régulière des acteurs impliqués dans ces plans. L'application du principe de la défense en profondeur conduit à prendre en compte l'occurrence d'accidents graves de probabilité très faible dans l'élaboration des plans de secours, afin de définir les mesures nécessaires pour protéger le personnel du site et la population et pour maîtriser l'accident sur le site. Le plan d'urgence interne, établi par l'exploitant, a pour objet de ramener l'installation dans un état sûr et de limiter les conséquences de l'accident. Il précise l'organisation et les moyens à mettre en oeuvre sur le site. Il comprend également les dispositions permettant d'informer rapidement les pouvoirs publics. Le plan particulier d'intervention, établi par le préfet, a pour objet de protéger à court terme les populations, en cas de menace, et d'apporter à l'exploitant l'appui des moyens d'intervention extérieurs. Il précise les missions des différents services concernés, les schémas de diffusion de l'alerte et les moyens matériels et humains. Les actions de protection de la population envisagées pour limiter l'impact direct du rejet sont : la mise à l'abri dans des bâtiments, visant à protéger les habitants de l'irradiation directe due au panache radioactif ainsi qu'à diminuer l'inhalation de substances radioactives ; l'absorption d'iode stable, complémentaire de la mise à l'abri lorsque le rejet comporte de l'iode radioactif ; l'évacuation, lorsque les mesures précédentes apportent une protection insuffisante en raison de l'importance des niveaux d'activité des rejets. Les PPI ne prévoient que les mesures d'urgence et ne préjugent pas des mesures qui pourraient être prises sur le plus long terme et à de plus grandes distances, telles que des restrictions de consommation ou de commercialisation de produits alimentaires ou encore la réhabilitation de zones contaminées. Les sites nucléaires civils et militaires sont astreints à réaliser, régulièrement, des exercices de simulation destinés à tester leur dispositif pour faire face aux situations d'urgence radiologique. Chaque site civil fait l'objet tous les trois ans d'un exercice national impliquant les pouvoirs publics et souvent une partie des populations concernées par le risque nucléaire. La programmation de ces exercices nationaux est réalisée conjointement par le SGDN, les autorités de sûreté nucléaire (DGSNR et DSND) et le ministère de l'intérieur de l'aménagement du territoire qui cosignent une circulaire interministérielle mise à jour annuellement. Cette circulaire fixe le calendrier et décrit le « modus operandi » des exercices. En 2004, quatorze exercices nationaux ont été organisés (Dampierre, Cambrai, Cattenom, Cruas, Gravelines, Mont-de-Marsan, Saint-Pierre-des-Corps, Sissone, Marcoule, Saint-Alban, Pierrelatte, Toulon, Blayais et Flamanville). L'organisation des pouvoirs publics et celle de la gestion de la sécurité nucléaire ont été actualisées au regard de l'expérience acquise par le biais de ces exercices, dans le cadre des directives interministérielles précitées et, en particulier, celle publiée au JORF du 10 avril 2005. Celle-ci organise la réaction des pouvoirs publics en cas d'événement entraînant une situation d'urgence radiologique. Cette réaction est testée, en tout ou partie, au cours des exercices nationaux, y compris sur les aspects de la communication, aspect fondamental de la conduite de la gestion de crise. Ces exercices font toujours intervenir l'exploitant de l'installation, les échelons administratifs déconcentrés (sous l'autorité du préfet de département) et nationaux, avec leurs appuis techniques. L'organisation des acteurs en charge des mesures de la radioactivité dans le cadre d'un accident radiologique et les modalités de coopération internationale ont également été révisées. La réalisation de plans de secours régulièrement testés au cours d'exercices diversifiés impliquant les acteurs tant locaux que nationaux, publics que privés a permis d'acquérir une expérience considérable pour la gestion technique et la communication en cas de crise nucléaire. Elle s'est révélée fondamentale pour une gestion sereine des crises réelles rencontrées au cours des dernières années (intempéries des 2 et 3 décembre 2003 en vallée du Rhône, centrale du Blayais affectée par la tempête de décembre 1999). La protection des populations : en cas de rejet accidentel important provenant d'un réacteur nucléaire, il est prévu que la population proche du site ingère des comprimés d'iode stable pour protéger la thyroïde contre les effets néfastes de l'iode radioactif. Les modalités de la nouvelle campagne de distribution des comprimés d'iode stable mise en oeuvre dans le périmètre des PPI autour des installations nucléaires susceptibles de rejeter de l'iode radioactif en cas d'accident ont été définies par circulaires des 8 février et 11 août 2005 cosignées par le DGSNR et le directeur de la défense et de la sécurité civile (DDSC). Cette campagne, qui doit débuter au mois d'octobre 2005, vise à renouveler les comprimés distribués lors des campagnes précédentes et arrivés à péremption. Pour les dix-neuf centrales nucléaires concernées, il a été décidé d'envoyer au domicile des populations concernées des bons nominatifs de retrait en pharmacie et dans un second temps de compléter la distribution par un envoi complémentaire de la boîte de comprimés d'iode par voie postale aux personnes n'ayant pas retiré leur boîte six mois après avoir reçu leur bon de retrait. La gestion des conséquences d'un accident nucléaire : depuis plusieurs années, les pouvoirs publics ont défini une doctrine pour assurer la protection immédiate des populations dans la phase d'urgence. Cette doctrine est transcrite dans les circulaires interministérielles précitées relatives aux plans de secours (PPI et PSS-TMR). L'organisation prévue dans le cadre de cette doctrine concerne la gestion des situations d'urgence radiologique consécutives à un accident sur une installation nucléaire ou un transport de matière nucléaire. La protection des populations et le contrôle des actions menées par l'exploitant pour ramener son installation dans un état sûr ont constitué les priorités de l'action de pouvoirs publics. Néanmoins, des exercices ont abordé les étapes ultérieures de la gestion de crise relatives à la gestion des territoires contaminés (phase post-accidentelle). Il existe déjà des éléments de réflexion sur la gestion du risque en phase post-accidentelle, mais il importe de mieux les formaliser dans un corps de doctrine. C'est pourquoi la directive interministérielle publiée au JO du 10 avril 2005 a confié à la DGSNR, en relation avec les départements ministériels concernés, la mission d'établir le cadre, de définir, de préparer et de mettre en oeuvre les dispositions nécessaires pour répondre à une situation « post-accidentelle ». Le travail a été entamé, avec l'objectif d'aboutir à un texte finalisé décrivant la doctrine dans un délai de deux ans.
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