Texte de la QUESTION :
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M. Jacques Remiller souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, au sujet du suicide en prison. En effet, pas plus tard que le 23 juillet dernier, c'est un retraité de 61 ans qui s'est pendu dans sa cellule de la maison d'arrêt de Béziers où il avait été incarcéré, après sa mise en examen pour tentative d'homicide volontaire et violence avec armes. Il souhaiterait savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour renforcer la sécurité des détenus, et éviter que des drames tels que celui-ci ne surviennent à nouveau.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il porte une grande attention au problème des suicides dans les établissements pénitentiaires. Le taux de suicide dans les prisons françaises doit être comparé à celui enregistré dans la population générale en France, lequel est l'un des plus élevés d'Europe et constitue la première cause de mortalité entre 25 et 34 ans. Si, comme dans d'autres pays occidentaux, les suicides sont plus nombreux en prison, il est important de noter que la France se classe dans la moyenne des pays européens. Au-delà de ces constats, force est de souligner que l'efficacité des réponses apportées dans le cadre de la politique de prévention du suicide en prison ne saurait se mesurer à l'aune de la seule statistique du nombre de suicides, ces données chiffrées ne rendant aucunement compte des passages à l'acte suicidaire qui ont pu être évités grâce au travail accompli par l'ensemble des acteurs en milieu carcéral. Ce travail concerne non seulement les personnels des services pénitentiaires mais aussi les personnels sanitaires. En outre, ces données statistiques ne sauraient non plus refléter une prétendue dégradation des conditions de détention ou encore constituer une mesure objective du mal-être en prison, notamment en raison de la dimension éminemment individuelle des actes suicidaires. Confrontée de longue date à ce phénomène, la direction de l'administration pénitentiaire a engagé dès 1967 une politique de prévention des suicides en détention. Sur la base de nombreux rapports de réflexion et d'étude, à la suite d'un programme expérimental lancé en 1997, une circulaire du 29 mai 1998 a ciblé en direction de l'ensemble des établissements les axes fondamentaux de la prévention du suicide. Ce texte a été complété par une circulaire interministérielle du 26 avril 2002, signée par les ministres de la justice et de la santé, en relation notamment avec la stratégie nationale d'actions face au suicide pour 2000-2005 lancée par le ministère chargé de la santé. Quoique aucune corrélation n'ait pu être établie entre les conditions d'incarcération et le taux de suicide, il convient de rappeler que l'augmentation de la capacité des établissements pénitentiaires et l'amélioration des conditions de détention sont des axes majeurs de la politique du Gouvernement et ont été, à ce titre, inscrits dans le rapport annexé à la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice. En outre, cette loi a apporté plusieurs améliorations au dispositif de prise en charge des personnes détenues atteintes de troubles psychiatriques. Elle prévoit notamment que l'ensemble des hospitalisations à temps complet pour troubles mentaux des personnes détenues sera réalisé dans des établissements de santé. Pour parvenir à cet objectif, des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) seront créées en 2009 et les activités des services médico-psychologiques régionaux (SMPR) seront alors progressivement recentrées sur les soins ambulatoires. Afin d'évaluer le dispositif existant en matière de prévention des suicides en détention et de le parfaire, le garde des sceaux et le ministre chargé de la santé ont conjointement confié, le 23 janvier 2003, une mission à M. le professeur Jean-Louis Terra. Les orientations préconisées doivent permettre à l'administration pénitentiaire de s'inscrire dans une élaboration dynamique et active de la prévention du suicide. À ce titre, trois grands axes de travail ont été conçus : la formation au repérage du risque suicidaire, la mise en place d'un système de détection et le déploiement de plans de prévention individualisés, ainsi que des actions au plan national. En premier lieu, le dispositif de formation au repérage a été envisagé à la fois par le biais de la formation initiale et de la formation continue. À cet effet, l'École nationale d'administration pénitentiaire a renforcé le contenu de la formation initiale ; les actions de formation continue ont été organisées en lien avec les services du ministère chargé de la santé et les directions régionales des services pénitentiaires (DRSP). À la fin 2005, ce seront près de 5 000 agents qui auront bénéficié de ces formations. Le deuxième axe, relatif à la mise en place d'un système de détection et au déploiement de plans de prévention, doit faciliter pour chaque établissement pénitentiaire la mise en oeuvre des méthodes d'évaluation du risque suicidaire individuel présenté par les personnes détenues. Enfin, des actions nationales ont été entreprises depuis début 2004. Le cahier des charges des nouveaux établissements pénitentiaires intègre les préconisations relatives à la réduction des moyens d'accès au suicide dans les cellules. S'agissant du renforcement de la pluridisciplinarité, il a été demandé à chaque établissement d'inscrire la thématique de la prévention du suicide dans le cadre préexistant de ses commissions pluridisciplinaires (commission locale d'insertion, de classement au travail, d'indigence...) ou grâce à une commission spécifique de prévention du suicide. Il a également été rappelé aux chefs d'établissement de prendre toutes les mesures utiles pour aider les familles des personnes suicidées dans l'accomplissement du travail de deuil afin de réduire les effets consécutifs à la survenue d'un suicide. Si le nombre de-suicides de personnes détenues reste encore élevé (122 en 2002 ; 120 en 2003 ; 115 en 2004), il convient de préciser que le taux de suicide est passé de 24,4 pour 10 000 personnes détenues en 1996 à 18,9 en 2004.
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