Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Tourtelier appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur les menaces qui pèsent sur le bon fonctionnement de la commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), voire sur sa pérennité. Cette autorité administrative indépendante, créée par la loi n° 2000-494 du 6 juin 2000, modifiée par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, est chargée « - sans préjudice des prérogatives que la loi attribue, notamment en matière de direction et de contrôle de la police judiciaire, à l'autorité judiciaire - de veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République ». Toute personne qui a été victime ou témoin de faits dont elle estime qu'ils constituent un manquement aux règles de déontologie, peut demander que ces faits soient portés à la connaissance de la CNDS. Autorité essentielle dans une démocratie, la CNDS remet chaque année un rapport au Président de la République. Malgré les conditions relativement restrictives de sa saisine, la commission a vu son activité croître d'année en année. Ainsi, 107 saisines concernant 97 affaires ont été transmises par des parlementaires et la défenseure des enfants en 2004, année marquée par une nouvelle progression du nombre des dossiers. Ceux-ci, au nombre de 19 en 2001, 40 en 2002, 70 en 2003, ont augmenté de 38 % en 2004. Cette tendance se confirme en 2005. La très grande majorité des saisines concerne des fonctionnaires de la police nationale et de l'administration pénitentiaire. L'examen des dossiers met trop souvent en évidence des manquements à la déontologie relatifs à la discrimination que précisément le Président de la République et le ministre lui-même combattent. La CNDS, à travers une très forte proportion d'affaires dont elle a été saisie, met en cause ce phénomène et ces dérapages déontologiques. En portant à la connaissance du procureur de la République des faits qui laissent présumer l'existence d'une infraction pénale, en portant sans délai à la connaissance des personnes investies du pouvoir disciplinaire des manquements susceptibles d'entraîner des poursuites, en rapportant au Président de la République et au Parlement les résultats de son activité, la CNDS assure un lien majeur utile à la transparence, à la justice et à l'amélioration de notre démocratie. Le rôle de la commission nationale de déontologie de la sécurité est indissociable des valeurs de la République. Réduire son budget déjà insuffisant, c'est la condamner à disparaître, c'est aggraver une nouvelle fracture entre le citoyen et les services de police, de gendarmerie ou de l'administration pénitentiaire pour ne citer qu'eux. En moins de cinq ans, la CNDS a acquis une légitimité et participe aux avancées dans le rapport de confiance entre les citoyens, les forces de l'ordre, la justice et l'État. Mais concrètement, pour exercer les pouvoirs d'auditions qui sont les siens dans le cadre des investigations prévues par la loi, la commission doit, soit convoquer à Paris les personnes concernées, soit se rendre sur place, notamment dans les lieux de détention. Dotée en 2005 d'un budget de 541 602 (loi de finances), la CNDS s'est vu imposer un gel de 100 000 et ne disposait déjà plus au 1er septembre que d'une somme dérisoire, hors paiement du loyer et des salaires. Son président a tiré la sonnette d'alarme en alertant le directeur du budget dès mai 2005, puis ministre lui-même en juillet dernier, puisque les crédits nécessaires à la commission pour l'accomplissement de sa mission sont inscrits au budget de ses services. Ces interventions restées sans réponses ont pour conséquence d'affaiblir gravement le fonctionnement de la Commission. La CNDS ne pourra ni assurer ses dépenses courantes, ni instruire les dossiers supposant des déplacements. L'instruction de ceux-ci sera reportée à 2006, ce qui ne pourra qu'engendrer un retard préjudiciable à l'ensemble de son activité et mettre en cause la pérennité même de cette institution indépendante au service des citoyens. C'est pourquoi il lui demande de redonner à la CNDS tous les moyens budgétaires qui lui manquent et de restaurer dans notre République une autorité indépendante ad hoc et expérimentée conforme à nos engagements internationaux et à nos valeurs. - Question transmise à M. le Premier ministre.
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