Texte de la QUESTION :
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M. Rodolphe Thomas attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'avant-projet de décret portant réforme de la procédure civile. Cet avant-projet provoque une vive émotion chez les avocats et chez les avoués. Ces professionnels considèrent en effet que ce dispositif remet en cause les équilibres fondamentaux du nouveau code de procédure civile, risquant de pénaliser les justiciables les plus défavorisés. Alors que l'un des principes très anciens du droit français veut que l'appel d'une décision suspende son exécution, le projet vise à rendre immédiatement exécutoires les jugements de première instance. Dès lors qu'une partie aura obtenu le bénéfice d'une condamnation en première instance, elle pourra demander à la cour de radier l'affaire tant que le jugement n'aura pas été totalement exécuté. Nombre de justiciables pourraient ainsi se voir lésés et plus particulièrement les plus fragiles d'entre eux, y compris les PME et PMI, qui n'auraient pas les moyens de payer leur condamnation par le tribunal en première instance. Le projet fait craindre, en cas d'infirmation par la cour d'appel, que la partie condamnée en première instance et qui se sera pliée aux obligations de l'exécution pour être reçue en appel, ne puisse pas obtenir remboursement face à un adversaire qui sera devenu insolvable ou aura organisé son insolvabilité. De ce fait, il lui demande quelles dispositions il compte mettre en place pour éviter de valider un texte qui risque de restreindre gravement le droit fondamental de l'appel offert à tous les justiciables quelle que soit leur condition financière.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il a transmis au Conseil d'État, pour le soumettre à son examen, le projet de décret portant réforme de la procédure civile qui a fait l'objet d'une vaste consultation et suscité des contributions enrichissantes qui ont été largement prises en compte. Ce projet de décret vise à améliorer la célérité et l'efficacité de la justice en s'appuyant sur les pratiques innovantes menées par les juridictions et les barreaux ainsi que sur le rapport Magendie en n'en reprenant toutefois pas toutes les conclusions. La disposition du projet sur l'exécution provisoire n'a pas pour effet de remettre en causé le droit d'appel mais au contraire d'en réaffirmer le caractère essentiel en écartant les appels dilatoires et en renforçant l'effectivité des décisions de première instance, qui est un principe d'une valeur égale à celui de l'accès au juge. Contrairement à ce que préconisait le rapport Magendie, le champ de l'exécution provisoire n'est pas modifié. Le projet de décret prévoit simplement qu'en appel, lorsque l'arrêt de l'exécution provisoire n'a pas été obtenu, une partie, bénéficiaire de l'exécution provisoire, pourra solliciter la radiation de l'affaire du rôle de la cour sous le contrôle du premier président. Un tel dispositif rend effective l'exécution provisoire décidée en première instance. Il garantit également l'équilibre des intérêts en présence, ceux de la partie qui a succombé en lui maintenant la possibilité de faire examiner son affaire en appel malgré la non-exécution de la décision, si elle a de justes motifs, ceux de la partie qui a gagné, en lui permettant de bénéficier de l'exécution du jugement qui lui a été accordée. Ainsi, l'ensemble de ce projet, sans porter atteinte aux grands principes de notre procédure civile, est marqué par le souci de répondre aux objectifs de rapidité et de qualité que la justice se doit de remplir.
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