FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 74984  de  M.   Grosdidier François ( Union pour un Mouvement Populaire - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  écologie
Ministère attributaire :  écologie
Question publiée au JO le :  04/10/2005  page :  9108
Réponse publiée au JO le :  13/06/2006  page :  6193
Rubrique :  environnement
Tête d'analyse :  politique de l'environnement
Analyse :  charte de l'environnement. perspectives
Texte de la QUESTION : M. François Grosdidier appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005 relative à la charte de l'environnement. Les lois futures devront désormais être conformes aux principes établis par cette charte. Quant aux lois existantes, elles pourront être annulées ou modifiées si elles sont contraires à la nouvelle Constitution. L'adossement de la charte de l'environnement à notre constitution semble faire l'unanimité. Cependant les modalités de cette constitutionnalisation, notamment la portée de la charte, suscitent quelques interrogations. Il souhaite savoir quelles sont les dispositions de la charte à caractère purement déclaratoire, celles qui sont directement applicables et invocables devant le juge et les principes dont la mise en oeuvre incombe au législateur.
Texte de la REPONSE : La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant l'applicabilité des dispositions de la loi constitutionnelle adoptée le 1er mars 2005 relative à la Charte de l'environnement. Il convient effectivement de distinguer les articles déclaratoires, les articles directement applicables et invocables devant le juge et, enfin, les articles nécessitant leur mise en oeuvre par le législateur. Plusieurs articles de la Charte relèvent des déclarations de principe, à savoir l'article 8 qui marque la reconnaissance de l'importance de l'éducation et de la formation à l'environnement et non une orientation de contenu de cet enseignement ; l'article 9 qui souligne que la recherche et l'innovation doivent apporter leur concours à la préservation et à la mise en valeur de l'environnement et l'article 10 qui énonce que la Charte « inspire l'action européenne et internationale de la France. » Seul l'article 5 consacrant le principe de précaution est directement applicable et invocable devant le juge. Les autres articles de la Charte fixent des objectifs à valeur constitutionnelle qui supposent l'intervention du législateur pour leur mise en oeuvre : l'article le, qui consacre « le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » dont l'exercice est assuré également par d'autres articles de la Charte. Le caractère général des termes employés et l'absence de définition de l'environnement « équilibré et respectueux de la santé » conduit à penser que sa portée devrait être celle d'un objectif à valeur constitutionnelle, dont la mise en oeuvre dans des conditions fixées par la loi. Toutefois, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, dans une ordonnance rendue le 29 avril 2005, a pris parti en faveur de la conception de la portée du droit reconnu par l'article 1er de la Charte, qu'il qualifie de « liberté fondamentale » et non pas de simple objectif à valeur constitutionnelle. D'une manière générale, le Conseil d'État fait habituellement une interprétation restrictive de la notion de liberté fondamentale au sens de celles dont la violation est sanctionnée dans le cadre du référé liberté, interprétation que le tribunal administratif semble avoir quelque peu élargie. L'article 2 énonce le devoir de prendre part à la préservation de l'environnement. Ce devoir n'est pas conçu comme une simple obligation morale dénuée de toute portée juridique mais comme un objectif à valeur constitutionnelle qu'il appartiendra également au législateur de mettre en oeuvre. L'article 3 énonce le devoir de prévention dont il appartient au législateur de définir les modalités de mise en oeuvre. Le renvoi à la loi est explicite. Les différentes lois existantes doivent, toutefois, être considérées comme lois d'application de cette disposition. En effet, ce principe existe déjà en droit français, mais sa constitutionnalisation place le législateur dans l'obligation de le respecter lorsqu'il modifie les textes. L'article 4 énonce le devoir de réparation des atteintes à l'environnement. Dès lors, lorsque la prévention exigée de la part de tous en vertu de l'article 3 atteint ses limites, il convient d'envisager la réparation des dommages. La transposition de la directive 2003/35 du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux va être l'occasion pour le législateur de mettre en oeuvre cette disposition. L'article 6 donne valeur constitutionnelle à l'objectif de développement durable qui exige la conciliation entre ses trois composantes : protection de l'environnement, développement économique et progrès social. Il appartiendra, non seulement au législateur mais aussi aux autorités administratives, de mettre en oeuvre cette disposition. La reconnaissance du droit de l'environnement se prolonge avec l'article 7 de la Charte, par la reconnaissance d'un droit procédural à l'information et à la participation bénéficiant à toute personne. Ce droit s'exercera dans les conditions et limites définies par la loi, limites qui ont trait notamment au respect des secrets légitimes. De façon générale, toute mesure nouvelle concernant le droit de l'environnement devra être examinée au regard des dispositions de valeur constitutionnelle de la Charte qui interdisent tout recul dans la prise en compte de l'environnement.
UMP 12 REP_PUB Lorraine O