MISSIONS SPÉCIFIQUES DES FORCES
DE POLICE DE TOUL
M. le président. La parole
est à Mme Nadine Morano, pour exposer sa question, n° 74, relative aux
missions spécifiques des forces de police de Toul.
Mme Nadine Morano.
Monsieur le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, ma question s'adresse à
M. le ministre de l'intérieur. Je tiens au préalable à saluer sa politique
de réorganisation des forces de sécurité sur le territoire tout comme sa
politique d'évaluation.
Ma
circonscription de Toul comptant, cas unique en France, deux centres de
détention et deux centres hospitaliers, des forces de police considérables y
sont mobilisées pour assurer le transfèrement de détenus. Ainsi, au cours des
neuf premiers mois de l'année 2002, ces opérations ont nécessité 2 763
heures-fonctionnaires, soit plus de deux fonctionnaires à plein temps, sans
parler du véhicule. Ce à quoi s'ajoutent les reconduites à la frontière et les
présentations au parquet, auxquelles les forces de police ont consacré
827 heures-fonctionnaires, plus évidemment les véhicules.
M. le ministre de l'intérieur
insiste souvent sur la nécessaire motivation des forces de sécurité. Mais
croyez-vous que ce genre d'opérations soit de nature à les motiver ? Est-il
normal, par exemple, que le transfèrement d'un détenu qui a décidé de se faire
enlever un tatouage au bras ou d'un autre qui, au motif qu'il a changé de
religion, souhaite se faire circoncire, mobilise deux fonctionnaires de police ?
Que dire aussi des policiers chargés des reconduites à la frontière de détenus
faisant l'objet d'une mesure d'expulsion et qui doivent patienter deux heures à
Roissy après le décollage, le temps que l'avion ait atteint son point de
non-retour, alors qu'ils n'auraient même pas compétence pour les récupérer si
besoin était, dans la mesure où cela relève de la police de l'air et des
frontières ? C'est dire à quel point nos forces de sécurité sont détournées de
leur mission première : être présentes sur le terrain et garantir la sécurité de
nos concitoyens. Il faut donc au plus vite réformer nos administrations, à
commencer par la pénitentiaire.
Ma question sera simple : quelles
mesures le Gouvernement entend-il prendre avec l'administration pénitentiaire,
et dans quels délais, afin que les forces de sécurité puissent se consacrer
pleinement à leur mission principale, laissant éventuellement aux forces
pénitentiaires la charge du transfèrement de détenus ? En attendant une telle
réforme, quels moyens supplémentaires pouvez-vous donner au commissariat de
Toul, dont je salue l'action, puisque, malgré le temps perdu à s'occuper de ce
qui ne relève pas de sa mission première, il fait partie de ceux qui obtiennent
les meilleurs résultats en matière d'élucidation ? Le ministre est-il prêt à
accorder des effectifs supplémentaires à ce commissariat qui en a bien besoin,
ainsi que les équipements nécessaires, c'est-à-dire un ou deux véhicules
supplémentaires ? On me trouvera peut-être trop pragmatique, mais, pendant
qu'ils servent aux reconduites à la frontière, les véhicules ne tournent pas
dans nos villes et la protection de nos concitoyens s'en ressent.
M. le président. La
parole est à M. le sécrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat.
Madame la députée, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, aurait aimé
pouvoir répondre lui-même à cette excellente question, mais le secrétaire d'Etat
à la réforme de l'Etat ne peut que se réjouir lui-même de vous voir ainsi poser
le problème de l'allocation efficace des ressources humaines de l'Etat en
fonction de ce qui constitue le coeur de sa mission. En l'espèce, il y a
effectivement lieu de réfléchir à l'utilisation des personnels mobilisés pour le
transfèrement ou la suveillance des détenus hospitalisés, qui confine souvent au
gaspillage. C'est une excellente piste de travail.
Ainsi que vous le savez, la loi
d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure a précisément
prévu qu'une réflexion soit lancée sur les moyens de confier à l'administration
pénitentiaire la charge des extractions et transfèrements de détenus ainsi que
la surveillance des détenus hospitalisés.
Un groupe de travail a été mis en
place à cette fin. Co-animé par l'inspection générale de l'administration et
l'inspection générale des services judiciaires et réunissant des représentants
de l'inspection de la gendarmerie, de l'administration pénitentiaire et de
l'inspection générale de la police nationale, ce groupe doit mener une étude sur
les différentes missions relatives aux mouvements des personnes détenues ou
prévenues en dehors des établissements pénitentiaires, à la charge de la police
nationale et de la gendarmerie nationale.
Pour ce qui concerne les services
territoriaux de la sécurité publique, les concours apportés à la justice
recouvrent les présentations, extractions, comparutions et transfèrements, la
police des andiences, la tenue des dépôts, la garde des détenus hospitalisés et
les conduites des détenus aux soins. L'ensemble de ces missions correspond
globalement, pour l'année 2001, sur laquelle nous disposons de statistiques
précices, à l'emploi de 2 347 fonctionnaires de police dans l'ensemble des
circonscriptions de sécurité publique. Pour celle de Toul, ces charges
représentent annuellement 2 711 heuresfonctionnaires, soit l'équivalent de
deux agents à temps plein.
Par
ailleurs, l'arrêté interministériel permettant la création de huit unités
hospitalières interrégionales où seront dirigés environ 80 % des
hospitalisations de détenus, c'est-à-dire tout détenu hospitalisé pour une durée
supérieure à quarante-huit heures, a été signé le 24 août 2000.
L'ouverture de ces unités hospitalières interrégionales interviendra, selon les
sites, entre 2003 et 2005. La garde à l'intérieur de ces unités incombera à
l'administration pénitentiaire. Restera à la charge des circonscriptions de
sécurité publique la garde des 20 % restants, c'est-à-dire des détenus
hospitalisés pour une durée inférieure à quarante-huit heures dans les hôpitaux
de proximité, où seront aménagées des chambres sécurisées. Un plan de
150 chambres sécurisées est en cours de réalisation ; il devrait être
achevé d'ici à la fin de l'année 2004.
La circonscription de Toul
bénéficiera de ces aménagements dans un avenir proche. Une chambre sécurisée est
d'ores et déjà en cours de réaménagement à l'hôpital Jeanne-d'Arc de Toul. La
future unité hospitalière interrégionale de Nancy-Brabois devrait voir le jour à
la fin de l'année 2003. Dès lors, les hospitalisations de moyen et long
séjour des détenus des deux centres de détention de la circonscription de Toul
devraient être assurées par cette nouvelle structure hospitalière, ce qui
soulagera d'autant le travail de la circonscription de sécurité publique de
Toul.
Votre question était donc
tout à fait pertinente ; nous espérons que les mesures prises permettront une
meilleure allocation des moyens affectés à la sécurité des Français, et tout
particulièrement dans votre circonscription.