Texte de la QUESTION :
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Mme Martine Billard attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur la question des arrêtés anti-mendicité pris à l'initiative de maires pour application sur le territoire de leurs communes. En effet, beaucoup de maires estiment que les situations dramatiques des personnes sans domicile fixe qui essaient de survivre dans nos rues ne pourraient être résolues par de tels arrêtés municipaux, particulièrement inappropriés, qui interdisent le fait de solliciter la générosité des passants. Cela a été le cas au cours de l'été 2005 sur la commune d'Argenteuil (Val-d'Oise). Le 15 juillet 2005, deux arrêtés municipaux de cette nature ont été pris par le maire de la troisième ville d'Ile-de-France. Garant de la légalité des actes administratifs, M. le sous-préfet d'Argenteuil a été saisi par des citoyens qui, argumentation à l'appui, contestaient la légalité et l'opportunité juridiques de ces deux actes. Ils demandaient au représentant de l'État de saisir dans les meilleurs délais le tribunal administratif compétent. Une première lettre d'observations datée du 8 août 2005 et une seconde datée du 19 août 2005 ont été adressées par M. le sous-préfet au maire d'Argenteuil, mais à ce jour, les deux actes litigieux n'ont toujours pas été déférés et restent applicables sur le territoire communal. Le délai dont disposent les personnes physiques ou morales pour exercer un recours direct contre les deux actes incriminés a, normalement, dû être prorogé, suite à la saisine de M. le sous-préfet et aux démarches effectuées consécutivement par ce dernier. Comme pour tout acte administratif, la légalité interne et externe de tels arrêtés municipaux ne saurait faire l'objet d'exception. Aussi lui demande-t-elle s'il envisage d'adresser des préconisations claires aux représentants de l'État afin que les tribunaux administratifs soient immédiatement saisis, avec une demande explicite de suspension provisoire, dès lors que des présomptions d'illégalité sont décelées sur lesdits arrêtés. De plus, s'agissant des situations où de telles présomptions d'illégalité existent, elle lui demande quels sont les critères objectifs pouvant conduire l'État, par le biais de son représentant, à faire le choix de s'abstenir d'attaquer immédiatement cette catégorie particulière d'actes administratifs ou de s'abstenir d'en demander immédiatement la suspension provisoire.
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Texte de la REPONSE :
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La légalité des arrêtés anti-mendicité pris à l'initiative de maires pour application sur le territoire de leurs communes doit être appréciée au regard des principes généraux qui s'appliquent aux arrêtés de police du maire. L'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales confie au maire l'exercice de la police municipale : le bon ordre, la tranquillité, la sécurité et la salubrité publiques. La police municipale comprend notamment tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais et places, les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes, le bruit et les tumultes, ainsi que le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements, notamment les foires, marchés, spectacles et cafés. En application de ce texte, le maire peut restreindre ou prohiber certaines activités s'exerçant sur la voie publique. Les interdictions et limitations ainsi prononcées doivent cependant être strictement proportionnées à ce qui est indispensable au maintien du bon ordre, de la tranquillité ou de la salubrité publiques car les exigences de la police municipale doivent se concilier avec l'exercice des libertés fondamentales et le principe de la liberté du commerce et de l'industrie. S'agissant de la légalité des arrêtés anti-mendicité, le Conseil d'Ëtat, par un arrêt rendu le 9 juillet 2003 « M. Lecomte, Association AC Conflent » a jugé que l'arrêté d'un maire qui n'interdisait les actes de mendicité que durant la période estivale, du mardi au dimanche, de 9 heures à 20 heures, et dans une zone limitée au centre-ville et aux abords de deux grandes surfaces, était une mesure d'interdiction légalement justifiée par les nécessités de l'ordre public. Le contrôle de légalité des actes des collectivités locales est une mission que l'article 72 de la Constitution confie au préfet qui est seul compétent pour juger de l'opportunité d'un déféré. L'article L. 2131-8 du code général des collectivités territoriales permet, sans préjudice du recours direct dont il dispose, à un tiers, qui s'estime lésé par un acte pris par une collectivité territoriale, de demander au représentant de l'État, dans le délai de deux mois qui suit l'acquisition du caractère exécutoire de l'acte, de déférer l'acte litigieux au tribunal administratif. Toutefois, le refus du préfet de déférer, à la demande d'un tiers lésé, est insusceptible de recours. Ce tiers dispose de la possibilité d'exercer un recours direct auprès du tribunal administratif dans le délai de deux mois qui suit la réponse explicite ou implicite du préfet. (Conseil d'État - 25 juin 1991, Brasseur).
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