DEBAT :
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MARCHÉS PUBLICS
M. le président. La
parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Exclamations puis huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je vous en prie, mes chers collègues !
M. Arnaud Montebourg.
Cette question est destinée à M. Raffarin, Premier ministre. (« Montebourg, voyou ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement a eu l'idée de faire table rase des règles applicables aux marchés publics passés par toutes les collectivités locales.
M. François Grosdidier. Caricature !
M. Arnaud Montebourg.
C'est la fin des appels d'offres et de la mise en concurrence des entreprises pour tous les marchés publics inférieurs, tenez-vous bien, à 6,2 millions d'euros, soit 41 millions de francs.
M. François Goulard.
Comme d'habitude, M. Montebourg n'a rien compris et ignore les lois !
M. Arnaud Montebourg. Voici donc que les présidents de conseils généraux pourront construire des collèges, les maires creuser des piscines, en choisissant les entreprises comme bon leur semble...
M. Lucien Degauchy. Et alors ?
M. Arnaud Montebourg. ... selon la tête des entrepreneurs. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Ce projet organise le favoritisme dans les marchés publics sur la plus grande échelle que l'on ait jamais vue.
M. François Grosdidier. Urba ! Urba !
M. Arnaud Montebourg. Il autorise, de fait, ce trafic d'influence et la corruption, en rendant quasi impossible la preuve des malversations dans les marchés publics. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. François
Goulard. C'est un autoportrait !
M. Arnaud Montebourg. D'ailleurs, les malversations dans les affaires des lycées d'Ile-de-France (« Urba ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), dans les affaires des lycées de Provence-Alpes-Côte d'Azur (« Urba ! » sur les mêmes bancs) ou dans les affaires de l'OPAC de la ville de Paris (« Urba ! » sur les mêmes bancs) n'ont pu être prouvées que grâce à la législation que vous entendez supprimer. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues.
M. Arnaud Montebourg. Après les multiples critiques et attaques dont ce projet a fait l'objet, vous avez indiqué, monsieur le Premier ministre, que la copie de votre décret, qui était d'ailleurs déjà prête, allait être revue.
M. Bernard Deflesselles. Eh bien alors ?
M. Arnaud Montebourg. Vous avez reculé mais, malheureusement, pour mieux réaliser votre funeste projet dès l'automne, affirmez-vous.
Nous vous demandons, dans l'intérêt du pays, d'y renoncer tout à fait. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Lucien
Degauchy. Urba !
M. Arnaud Montebourg. Sinon, l'histoire ne retiendra peut-être de vous que cela : d'avoir été celui qui aura ouvert les vannes de la corruption à tous les étages de la République. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous risqueriez de devenir une sorte de Berlusconi à la française (Claquements de pupitre sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) dont la politique judiciaire ressemble déjà curieusement à la vôtre : impitoyablement répressive pour le citoyen ordinaire...
M. le président. Monsieur Montebourg...
M. Arnaud Montebourg. ... extraordinairement complaisante pour la grande délinquance financière en col blanc (Mêmes mouvements)...
M. le président. Monsieur Montebourg...
M. Arnaud Montebourg. ... qui implique un grand nombre de vos amis, parmi lesquels figure, malheureusement pour la France, le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées et claquements de pupitre sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Bernard Accoyer. Scandaleux !
Plusieurs députés du groupe l'Union pour un mouvement populaire. Voyou !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie. Monsieur Montebourg, je suis intéressé par la fréquence avec laquelle ce sujet revient régulièrement lors des séances de questions.
Mme Martine David. Nous y reviendrons encore, parce que nous sommes choqués !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela montre que certains d'entre vous semblent moins convaincus que d'autres de la nécessité de réformer le code des marchés publics, en toute transparence (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), en toute responsabilité, de manière à améliorer - j'ai déjà eu l'occasion de le dire la semaine dernière - la qualité, la rapidité, la réactivité et les tarifs de nos achats. (Mêmes mouvements.)
M. François
Hollande. Pourquoi reculez-vous, alors ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Soyons clairs ! Quand le Premier ministre a déclaré vouloir améliorer le système, il l'a fait en totale harmonie avec votre serviteur. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Cette initiative, que nous avons volontairement prise pour améliorer la performance du système d'achats français,...
M. Jean-Pierre Blazy. Pour améliorer la magouille !
M. Michel Lefait. Par dogmatisme !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... doit être assumée par tous, y compris, bien sûr, par les représentants élus, le Premier ministre et moi-même en sommes conscients.
Au cas où vous ne le sauriez pas, je vous indique que le projet de décret qui a été rédigé a fait l'objet de consultations (« Du MEDEF ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste) auprès de nombreuses personnes directement concernées et d'élus (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), de manière, justement, que tous les problèmes que vous soulevez soient évités.
Regardez la percée intellectuelle que nous sommes en train de réaliser. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Mme Martine David. Quelle percée !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le Gouvernement, la semaine dernière, à l'initiative du Premier ministre, a déclaré - le président de l'Assemblée nationale en est témoin - qu'il était ouvert à l'idée de réfléchir sur le sujet avec des élus, en petit nombre bien sûr...
Mme Martine David. Lesquels ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... représentant tous les partis qui souhaiteraient s'exprimer sur ce sujet.
M. François Hollande. C'est ce qu'on fait !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je vous invite donc formellement, monsieur Montebourg, si le groupe socialiste l'accepte, à venir discuter, avec moi et d'autres, de ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Bruno Le Roux. Retirez plutôt le texte !
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