FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 767  de  M.   Cortade Alain ( Union pour un Mouvement Populaire - Vaucluse ) QOSD
Ministère interrogé :  emploi
Ministère attributaire :  emploi
Question publiée au JO le :  25/05/2004  page :  3735
Réponse publiée au JO le :  26/05/2004  page :  4010
Rubrique :  formation professionnelle
Tête d'analyse :  contrats de professionnalisation
Analyse :  réglementation
Texte de la QUESTION : M. Alain Cortade appelle l'attention de M. le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale sur une conséquence particulièrement néfaste de la mise en place du contrat de professionnalisation pour les 4 000 jeunes du département de Vaucluse qui suivent chaque année une formation en alternance. Le contrat de professionnalisation, s'il permet de simplifier le système jusqu'alors en place, en remplaçant plusieurs contrats école-entreprises par un contrat unique, risque de rendre impossible l'obtention de certains diplômes par la voie de l'alternance. En effet, tandis que d'un côté ce contrat abaisse le volume horaire de formation à 270 heures, de l'autre la réglementation actuelle exige un minimum de 1 100 heures de formation pour la préparation des diplômes d'État tels que les bacs professionnels et les brevets de techniciens supérieurs. En conséquence, le contrat de professionnalisation ne pourra déboucher pour les jeunes qui ont opté pour cette voie sur la délivrance d'un diplôme reconnu tant par les autorités que par les entreprises. Or, le choix de l'alternance est pour nombre d'élèves en situation financière difficile bien souvent le seul moyen de poursuivre leurs études, et plus particulièrement de s'orienter vers les filières dites professionnelles. Le contrat de professionnalisation risque donc soit de sortir ces 4 000 jeunes vauclusiens prématurément et sans qualification du système scolaire, soit de les détourner des filières techniques. Face à cette situation doublement inquiétante, il le prie donc de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il compte prendre afin de parer à cette conséquence particulièrement néfaste du dispositif, qui risque, demain, de priver le Vaucluse d'une main-d'oeuvre qualifiée dont la région manque déjà si durement.
Texte de la REPONSE :

CONSÉQUENCES DE LA MISE EN PLACE DU CONTRAT
DE PROFESSIONNALISATION DANS LE VAUCLUSE

M. le président. La parole est à M. Alain Cortade, pour exposer sa question, n° 767, relative aux conséquences de la mise en place du contrat de professionnalisation dans le Vaucluse.
M. Alain Cortade. Monsieur le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes, la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a permis de dépoussiérer un système datant de 1971. Les réformes successives avaient conduit à rendre ce système peu lisible et particulièrement complexe. En regroupant les différents contrats de formation en alternance - contrats de qualification, d'orientation et d'adaptation - en un outil unique, le contrat de professionnalisation, la formation professionnelle retrouvera sans aucun doute la lisibilité qui lui faisait défaut.
La réforme et la simplification du système étaient donc nécessaires. La démarche courageuse enfin entreprise en ce sens honore le Gouvernement.
Toutefois, je tiens à vous faire part de ma profonde inquiétude concernant l'un des aspects de la réforme.
Le dispositif actuel aboutit en effet à une double réduction, celle du contrat du jeune en formation de vingt-quatre à douze mois, et celle de la durée de sa formation. Le volume horaire d'enseignement passe de 33 % à 15 % de la durée du contrat, soit 270 heures de formation sur douze mois au lieu des 1 200 heures actuellement réparties sur vingt-quatre mois.
Cette disposition risque d'avoir des incidences particulièrement dommageables pour les nombreux jeunes qui, chaque année, choisissent, chaque année, la voie de l'alternance puisque la réglementation actuelle requiert de fait un minimum de 1 100 heures d'enseignement pour que la formation débouche sur un diplôme d'État tels que le bac professionnel, le BTS ou le BEP. Par conséquent, le nouveau dispositif rendra très difficile l'accès aux diplômes par la voie de l'alternance.
Certes, cette durée constitue un seuil minimal : des accords pourront prévoir une augmentation des heures de formation jusqu'à 25 % et au-delà pour les jeunes dépourvus de qualification et ceux désirant suivre des formations diplômantes. Néanmoins, cette possibilité n'est que de l'ordre de la dérogation, si bien qu'actuellement nous ne disposons pas des garanties nécessaires à sa concrétisation.
Monsieur le secrétaire d'État, cette situation est particulièrement inquiétante pour deux raisons dont m'ont fait part les organismes de formation professionnelle de ma circonscription, que je tiens à saluer.
Tout d'abord, dans mon département du Vaucluse, 3 978 jeunes ont choisi en 2003 de se former par l'alternance, et près de 80 % d'entre eux ont obtenu grâce à elle un diplôme. Le risque est donc réel de voir s'accroître considérablement, dans les années à venir, le nombre de jeunes de mon département, mais aussi d'ailleurs, sortant du système de formation sans diplôme. En effet, pour ces jeunes, souvent issus de milieux défavorisés, l'alternance représentait jusqu'alors le seul moyen d'obtenir un diplôme reconnu. Je rappelle qu'en dépit d'un système de bourses efficace, certains étudiants ne peuvent pas, pour des raisons économiques évidentes, poursuivre leurs études autrement que par cette voie.
Par ailleurs, l'alternance concerne majoritairement les filières techniques et professionnelles. Or comment inciter nos jeunes à s'engager dans ces filières s'ils ne sont pas assurés, au terme de leur formation, d'obtenir les diplômes qui sont indispensables sur le marché du travail ? Le risque est donc grand de voir nos élèves se détourner de ces branches. Pourtant, le Vaucluse a fortement besoin de cette main-d'oeuvre qualifiée car c'est l'un des départements les plus déficitaires en la matière, comme le montre le recours fréquent à la main-d'oeuvre étrangère.
Pour dissiper ces inquiétudes, je vous prie de répondre à une question très claire : quelles garanties pouvez-vous donner aujourd'hui aux jeunes désireux de s'engager dans un contrat de professionnalisation et qui souhaitent voir leur formation déboucher sur l'obtention d'un diplôme, comme les dispositions dérogatoires semblent le permettre ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes.
M. Laurent Hénart, secrétaire d'État à l'insertion professionnelle des jeunes. Monsieur le député, vous avez bien rappelé le cadre de la question : il y a d'abord eu un accord professionnel unanime des partenaires sociaux, puis la reprise des éléments principaux de cet accord dans la loi votée il y a un peu plus d'un mois dans cette Assemblée, par vous-même notamment, afin de permettre sa mise en oeuvre.
S'agissant du contrat de professionnalisation et de sa capacité à permettre l'obtention de diplômes, notamment le bac ou le BTS, que vous avez cités, je voudrais vous apporter trois éléments de réponse. Vous en avez d'ailleurs mentionnés certains, mais avec un a priori qui reflète pour une part les inquiétudes des organismes de formation. J'ai reçu leurs représentants, et il est vrai que ces organismes n'ont peut-être pas été suffisamment associés à l'élaboration du dispositif de l'alternance pour les jeunes que nous proposons. Car il n'y a pas que le contrat de professionnalisation : il faut aussi prendre en compte l'enseignement dispensé par l'éducation nationale ou la formation professionnelle et l'apprentissage.
Premièrement, l'accord interprofessionnel et la loi reposent sur l'idée que la formation professionnelle tout au long de la vie devient prioritaire, ce qui d'ailleurs devrait rassurer les organismes de formation qui voient s'ouvrir à eux de nouveaux marchés, et que cette formation doit être conduite au niveau des branches. Plus que par le passé, c'est bien branche par branche que la formation professionnelle, y compris initiale, va s'organiser. Les partenaires sociaux que j'ai rencontrés, après Jean-Louis Borloo, pour régler ces questions de mise en oeuvre du contrat de professionnalisation, m'ont tous dit, tant les représentants des salariés que ceux des employeurs, qu'ils avaient le souci de concilier, branche par branche, les assouplissements de durée que vous avez évoqués avec l'obtention d'un diplôme par les jeunes. L'État suivra bien sûr ce travail afin que le cadre du nouveau dispositif soit applicable le 1er octobre.
Deuxièmement, l'accord lui-même - vous y avez fait allusion de manière elliptique, mais je crois qu'il faut entrer dans les détails -, il prévoit la possibilité de passer du contrat de professionnalisation, qui remplace les trois précédents contrats, à l'apprentissage comme mode de qualification diplômante pour les jeunes. Il prévoit même la possibilité pour les partenaires sociaux gestionnaires de la formation professionnelle d'affecter une partie des ressources de la formation professionnelle à l'apprentissage. C'est une nouveauté. Cela signifie qu'il y aura, au-delà de la disposition de principe, les moyens de la financer. C'est tout le sens du travail mené actuellement dans le cadre du plan de cohésion sociale que de permettre le développement de l'apprentissage pour qu'il puisse, en accord avec les partenaires sociaux, prendre en partie le relais de la formation professionnelle de manière intelligente et articulée.
Troisièmement, je tiens à ajouter un point que vous n'avez pas mentionné, même s'il était en filigrane dans votre question : la mise en oeuvre du nouveau dispositif au 1er octobre. C'est la prochaine rentrée pour beaucoup de jeunes qui choisissent l'alternance. Nous travaillons actuellement avec l'ACOSS pour " tuiler " l'ancien dispositif et le nouveau. Ainsi, la mise en oeuvre le 1er octobre du contrat de professionnalisation n'impliquera pas l'arrêt le 30 septembre des contrats en cours. Il faut permettre aux organismes de formation d'accueillir les jeunes dans le cadre de l'ancien dispositif et du nouveau, seulement pour la rentrée 2004 évidemment. Ceci permettra à des départements sous tension en matière de formation, tel que celui du Vaucluse, d'avoir une palette plus large pour la mise en oeuvre de ce nouveau dispositif, qui n'impliquera pas ipso facto la suppression immédiate des contrats en cours relevant des anciennes catégories. Nous sommes actuellement en discussion pour parvenir à la superposition de l'ancien système et du nouveau durant quelques semaines, afin de garantir l'accueil du plus grand nombre de jeunes en alternance.
M. le président. La parole est à M. Alain Cortade.
M. Alain Cortade. Monsieur le secrétaire d'État, je suis rassuré par votre réponse, mais je pense qu'il y a un déficit d'information et de communication en la matière qu'il faudrait combler au plus tôt.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. le secrétaire d'Etat à l'insertion professionnelle des jeunes. Je précise que nous sommes en discussion avec l'ACOSS, les partenaires sociaux et la chambre syndicale des organismes de formation en alternance.
Globalement tout se passe bien, et je crois que nous progressons vers un accord sur le tuilage des périodes autour du 1er octobre. Mais je tiens à ne faire une communication à ce sujet qu'à partir d'une base certaine, sur laquelle nous n'aurons pas à revenir et qui aura bien reçu l'assentiment des partenaires que j'ai mentionnés. J'ai bon espoir d'y aboutir dans quelques semaines.
J'espère que nous serons fixés sur ce point d'ici à l'été. Dès lors, par le biais des directions départementales, l'information sera propagée le plus énergiquement possible.

UMP 12 REP_PUB Provence-Alpes-Côte-d'Azur O