Texte de la QUESTION :
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M. Yves Jego attire l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur l'interprétation de la notion de locaux dans le code de la construction et de l'habitation. L'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation dispose que « dans les locaux faisant l'objet d'un arrêté d'insalubrité de péril, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l'occupation du logement cesse d'être due à compter du premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification de l'arrêté d'insalubrité ou de péril... ». Toutefois, le terme de « locaux » ne répond à aucune définition juridique précise et peut donner lieu à interprétation. C'est ainsi que, selon plusieurs décisions de justice, les « locaux » s'entendent de toute partie d'un ensemble immobilier ayant fait l'objet d'un arrêté de péril ou d'insalubrité. Ainsi, par exemple, dans une copropriété composée de plusieurs bâtiments distincts, l'arrêté qui ne classe que certaines parties d'un seul des bâtiments se trouve étendu à tous les logements de tous les bâtiments de toute la copropriété. Les locataires occupant des logements en bon état, non visés par l'arrêté de péril, sont dispensés du paiement de tous les loyers. Cette situation crée une iniquité au préjudice des bailleurs qui, en leur qualité de copropriétaire, ont souvent à faire face à d'importants travaux de réhabilitation des immeubles. Ils sont privés des revenus locatifs qui leur permettraient de financer au moins pour partie ces travaux, les rendant plus difficile à mener, alors que de surcroît ils fournissent à leur locataire un logement exempt de critique. Il lui est en conséquence demandé s'il faut interpréter le terme « locaux » visés par l'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation de manière extensive ou restrictive : ce terme doit-il être considéré comme s'appliquant à tout logement faisant partie d'une copropriété dont au moins une partie se trouve décrite à l'arrêté classant l'ensemble immobilier en péril ou en insalubrité ; ou bien le local doit-il être expressément visé par les termes et le descriptif de l'arrêté de péril ou d'insalubrité ? Aussi, il souhaiterait savoir ce que le Gouvernement envisage de faire afin de résoudre cette difficulté.
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Texte de la REPONSE :
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L'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH) précise les dispositions relatives aux droits des occupants dans toutes les situations de bâtiments affectés par des mesures de police : insalubrité, péril, danger dans les établissements d'hébergement. Cet article du CCH a été entièrement réécrit à l'occasion de l'adoption de l'ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux (article 8 de l'ordonnance) : cette réécriture, toutefois, ne comprend que des améliorations rédactionnelles qui ne modifient pas la portée des dispositions antérieurement applicables. En particulier, le principe de la suspension du paiement du loyer dans les locaux faisant l'objet d'une mesure de police est clairement réaffirmé dans l'article L. 521-2 nouveau : « Pour les locaux visés par une déclaration d'insalubrité prise en application des articles L. 1331-25 et L. 1331-28 du code de la santé publique ou par un arrêté de péril pris en application de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l'occupation du logement cesse d'être dû à compter du premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification de l'arrêté ou de son affichage à la mairie et sur la façade de l'immeuble, jusqu'au premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification ou l'affichage de l'arrêté de main-levée. » Aussi, lorsque l'arrêté d'insalubrité ou de péril concerne les parties communes d'un immeuble en copropriété ou lorsque la situation d'insalubrité ou de péril d'un logement a pour origine un élément de ces parties communes, ces dispositions législatives relatives à la suspension du paiement des loyers s'appliquent à la totalité des lots compris dans l'immeuble en copropriété. En effet, au regard des dispositions légales fixant le statut de la copropriété (art. 1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965), un lot est composé d'une partie privative et d'une quote-part de parties communes. Ces parties communes constituent une propriété indivise entre l'ensemble des copropriétaires ; ainsi les quotes-parts de parties communes ne peuvent faire l'objet d'une individualisation physique et nominative entre les copropriétaires. Le même raisonnement s'applique lorsque l'immeuble en copropriété est composé de plusieurs bâtiments. La jurisprudence a par ailleurs confirmé que lorsqu'un désordre affectait un immeuble en copropriété et qu'une mesure de police devait être instruite, tous les copropriétaires devaient être attraits à la procédure, sous peine de nullité. Il résulte de ces éléments que tous les propriétaires des lots compris dans la copropriété, même composée de plusieurs bâtiments, sont affectés par les effets des arrêtés de péril ou d'insalubrité (obligation d'exécuter les travaux, suspension des loyers pour les bailleurs...). Il n'est aucunement envisagé de modifier l'état du droit existant en matière de copropriété, s'agissant de ses conséquences en matière d'insalubrité ou de péril. La ratification de l'ordonnance précitée du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat indigne, effectuée très récemment dans le cadre de l'examen et de l'adoption définitive de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (art. 44 de la loi), confirme que ni le Gouvernement ni le législateur n'ont entendu remettre en cause, même pour les seules procédures exceptionnelles de péril ou d'insalubrité, ce fondement juridique du régime français de la copropriété qu'est le principe d'équité entre les copropriétaires. Appliqué aux situations d'immeubles frappés par des mesures de police, ce principe permet en effet d'éviter qu'un seul copropriétaire ne subisse les conséquences d'un arrêté d'insalubrité ou de péril du fait de la carence de l'ensemble des copropriétaires quant à l'entretien des bâtiments au regard de leur sécurité ou de leur salubrité. Par ailleurs, l'application des règles actuelles présente un intérêt au plan opérationnel, car les copropriétaires sont fortement incités à engager les travaux nécessaires notamment sur les parties communes, sous la menace d'une suspension générale des loyers. Il est enfin rappelé la faculté ouverte aux grandes copropriétés, composées de plusieurs bâtiments, d'instituer des syndicats secondaires aptes à assurer l'entretien de chaque bâtiment, avec ses conséquences de droit,et notamment la limitation des effets dus à la carence des copropriétaires des autres bâtiments.
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