Texte de la QUESTION :
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M. Dominique Tian appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les infractions commises par certaines personnes jouissant de l'immunité diplomatique. L'immunité diplomatique ne couvre, en principe, que les délits ou les erreurs commises par un diplomate dans l'exercice de ses fonctions. On peut cependant noter que certaines personnes qui ont des comportements répréhensibles bénéficient de cette immunité pour échapper à toute sanction. A titre d'exemple, on peut citer le délit de grande vitesse commis, le 16 avril dernier, par un secrétaire d'ambassade du Qatar dans le tunnel du Mont Blanc et dont la voiture a été contrôlée à 214 km/h alors que la vitesse maximale autorisée est de 70 km/h. Beaucoup plus grave, il y a quelques années deux jeunes enfants ont été renversés à Nice sur un passage pour piétons et sont décédés parce qu'une fois de plus un diplomate roulait à une vitesse excessive. Ces faits divers ont suscité une certaine émotion et incompréhension au sein de la population française qui a du mal à comprendre que des comportements aussi dangereux pour autrui ne puissent être sanctionnés. Il lui est donc demandé quels sont les moyens juridiques mis à la disposition de l'État français lui permettant l'application de la réglementation internationale lorsque des fonctionnaires relevant de l'immunité diplomatique commettent des infractions.
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Texte de la REPONSE :
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CHAMP D'APPLICATION DE L'IMMUNITÉ DIPLOMATIQUE M. le
président. La parole est à M. Dominique Tian, pour exposer sa question,
n° 777, relative au champ d'application de l'immunité diplomatique. M. Dominique Tian.
L'immunité diplomatique ne couvre, en principe, que les délits ou les erreurs
commises par un diplomate dans l'exercice de ses fonctions. On peut cependant
noter que certaines personnes qui adoptent des comportements répréhensibles
profitent de cette immunité pour échapper à toute sanction. À titre d'exemple,
on peut citer le délit de grande vitesse commis le 16 avril dernier par un
secrétaire d'ambassade du Qatar dans le tunnel du Mont-Blanc, dont la voiture a
été contrôlée à 214 km/h alors que la vitesse maximale autorisée est de 70 km/h.
Beaucoup plus grave, il y a quelques années, deux jeunes enfants ont été
renversés à Nice sur un passage pour piétons et sont décédés, parce qu'une fois
de plus un diplomate roulait à grande vitesse en plein centre ville. Ces faits
divers ont suscité une grande émotion au sein de la population française, qui a
du mal à comprendre que des comportements aussi dangereux pour autrui ne
puissent être sanctionnés. Il est donc demandé à M. le ministre des affaires
étrangères quels sont les moyens juridiques mis à la disposition de l'État
français lui permettant l'application de la réglementation internationale
lorsque des fonctionnaires relevant de l'immunité diplomatique commettent des
infractions graves. M. le
président. La parole est à M. le secrétaire d'État aux affaires
étrangères. M. Renaud
Muselier, secrétaire d'État aux affaires
étrangères. Monsieur le député, la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur
les relations diplomatiques prévoit des immunités de juridiction et d'exécution
pour le diplomate dans le pays où il est dûment accrédité. Ces immunités sont
absolues, même pour les actes accomplis en dehors de l'exercice des fonctions,
en vertu des articles 29 à 36. La Convention indique
également qu'un diplomate ne doit pas contrevenir aux lois et règlements de
l'État où il est accrédité, en vertu de l'article 41.1. En cas d'infraction, deux procédures sont prévues. L'État
d'origine du diplomate, qui seul en a le pouvoir, peut décider de lever son
immunité en vertu de l'article 32. D'autre part, l'État où le diplomate est
accrédité peut le déclarer persona non grata, en
vertu de l'article 9. Le contrevenant doit alors quitter le pays
d'accréditation. Une telle procédure est naturellement une décision grave. Elle
peut avoir pour conséquence une mesure équivalente, au titre de la réciprocité,
à l'égard de diplomates français en poste dans l'État concerné. L'opinion admet de moins en moins, et on peut le
comprendre, l'impunité résultant de la Convention de Vienne, notamment en
matière d'accidents de la circulation ou de droit du travail. C'est pourquoi,
dans les affaires graves, comme celle de ce diplomate qatarien, des solutions
évitant une telle impunité doivent être recherchées, sans remettre en cause la
Convention de Vienne. Chaque fois que nécessaire, le
ministère des affaires étrangères rappelle la règle selon laquelle tout
diplomate doit respecter les lois du pays où il réside, qu'il s'agisse du code
de la route ou d'autres domaines comme les conditions d'emploi des personnels de
maison. Ayons toutefois à l'esprit que les immunités,
totales ou partielles, prévues par les conventions sont motivées avant tout par
le souci de protéger les agents diplomatiques ou consulaires contre toute
pression ou abus de droit dans le pays où ils exercent leurs fonctions. C'est
une garantie importante pour que nos représentants à l'étranger puissent
accomplir leur tâche sereinement, notamment lorsqu'ils agissent au bénéfice de
nos compatriotes dans le cadre des fonctions consulaires. Dans le cas du diplomate qatarien interpellé à une vitesse
très élevée dans le tunnel du Mont-Blanc, le 16 avril dernier, l'ambassadeur du
Qatar, dès qu'il a eu connaissance des faits, a de lui-même informé le ministère
des affaires étrangères que les autorités de son pays avaient pris la décision
de rappeler l'intéressé, qui a effectivement quitté la France peu après. Les autorités qatariennes ont par la suite indiqué à notre
ambassade à Doha qu'à la suite d'une décision de justice, des sanctions avaient
été prises à l'encontre de cette personne, aboutissant en particulier à un
retrait temporaire du permis de conduire et à une forte amende. Nous avons vivement apprécié la réaction très responsable
et coopérative de l'ambassade et des autorités du Qatar, qui ont ainsi manifesté
leur compréhension à l'égard de l'émotion soulevée dans l'opinion française par
cette affaire. Je sais, monsieur le député, à quel point
vous êtes sensible à cette démarche s'inscrivant dans le respect des règles et
des lois en vigueur dans notre pays, mais aussi aux exigences de la diplomatie
internationale. M.
Dominique Tian. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat.
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