Texte de la REPONSE :
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DESTRUCTION DE TOURS À VILLEPINTE M. le
président. La parole est à M. François Asensi,
pour exposer sa question, n° 787, relative à la destruction de tours à
Villepinte. M. François
Asensi. Madame la secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des
chances, la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 stipule, dans
son article 25-1, que " toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour
assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille " et précise " notamment
pour l'alimentaire, le logement, les soins médicaux ". Pourtant ce droit est aujourd'hui régulièrement bafoué. Le
septième rapport de la fondation Abbé Pierre, publié en mars 2002, recense ainsi
trois millions de personnes mal logées en France. En Ile-de-France, les besoins
en logements sociaux sont immenses et rien que dans mon département, en
Seine-Saint-Denis, plus de 50 000 demandes sont en attente. Alors que le chômage et le travail précaire ne cessent de
progresser en France, une profonde ségrégation spatiale s'installe peu à peu
dans notre paysage urbain. Dans les quartiers à forte implantation d'HLM, pour
les ménages en difficulté ou à faibles ressources, la part du budget consacrée à
un loyer, même modeste, devient insupportable. Ces difficultés se traduisent par
une augmentation des expulsions. En Seine-Saint-Denis,
nous avons ainsi enregistré une explosion des recours à la force publique : 2
259 en 2003, contre 1 397 l'année précédente. La
décision prise par M. le ministre Borloo d'instituer un moratoire sur les
expulsions de logements HLM, comme l'avaient demandé des maires communistes de
Seine-Saint-Denis, et notamment MM. Birsinger et Braouezec, va dans le bon sens.
Mais elle est nécessairement transitoire car elle s'attaque aux conséquences et
non aux causes. Souvent, en plus, les résidences sont
mal entretenues, ces quartiers sont désertés par les services publics, en voie
de privatisation, et montrés du doigt par les médias, voire par certains élus.
Cela est vécu par les habitants, stigmatisés dans leur ensemble, comme un
véritable préalable à la démolition de leur habitat. Le
plan mis en place par le Gouvernement prévoit la démolition de 200 000 logements
sociaux vétustes en cinq ans et la construction de 200 000 logements neufs. Nous ne pouvons que souscrire à ce programme immobilier
qui, cependant, n'est pas sans poser de nombreuses questions tant les
financements sont notoirement insuffisants. A cet égard, les arbitrages opérés à
Bercy ne vous donneront pas, et vous le savez, les moyens de vos ambitions. En
outre, ce plan, avec ces 200 000 logements, est loin de régler le problème des 3
millions de mal-logés. Aujourd'hui, sous couvert de
renouvellement urbain, voire de mixité sociale, de nombreux quartiers deviennent
la cible de promesses de destruction, et ce aux seuls fins de chasser les
populations en difficulté ou jugées indésirables. Dans
de tels cas, la notion de mixité sociale est fortement pervertie et véhicule des
relents réactionnaires. La mixité sociale, c'est non pas exclure les populations
en difficulté, mais au contraire favoriser leur promotion économique, sociale et
culturelle. Promotion à laquelle doivent être associées les classes moyennes qui
croient aujourd'hui en la solidarité. Un exemple concret
me permet ici d'illustrer mes propos : dans ma circonscription, dans le quartier
de la Fontaine-Mallet, à Villepinte, la municipalité et le bailleur ont annoncé
la destruction de certaines tours sans aucune concertation préalable avec les
habitants, qui l'ont appris par hasard. Devant le
mouvement d'inquiétude et d'indignation légitimes qui ont fait suite à ces
déclarations, le bailleur a tenu à préciser que les destructions donneraient
lieu - je reprends les termes employés -, " le cas échéant ", à un nombre
équivalent de constructions. C'est faire peu de cas de
ces populations dites en difficulté, de leurs quartiers, de leurs lieux de vie,
mais aussi de la démocratie locale. Est-il tolérable en effet que ces familles,
particulièrement soumises à l'insécurité du marché de l'emploi, soient également
confrontées à l'inconnu et à l'insécurité s'agissant de leur logement ? M. le ministre Borloo a récemment signé une convention avec
le président de la Caisse des dépôts pour un apport de 550 millions d'euros sur
cinq ans. L'appui à la création d'entreprises dans les zones franches urbaines
paraît y tenir une place importante. L'accès à l'emploi
est, il est vrai, un réel souci dans ces quartiers. Mais est-il utile de
persévérer dans la stigmatisation, qu'une politique axée sur la seule exemption
de charges pour les entreprises tend à renforcer ? Pour attirer les entreprises
dans ces quartiers, ne faut-il pas d'abord y rétablir le lien social ?
L'entreprise en est-elle le seul vecteur ? Ne faut-il pas aussi fortement
promouvoir la reconquête de ces quartiers par les services publics, les
transports et toutes ces infrastructures qui font le lien social ? Madame la secrétaire d'Etat, dans le cadre du projet de
rénovation urbaine de la Fontaine-Mallet, avez-vous pris des engagements fermes
et précis pour que la finalité sociale des nouveaux logements construits soit
préservée ? Bailleur et municipalité sont-ils soumis à des contraintes en la
matière ? Bref, va-t-on détruire ces tours sans
concertation avec leurs habitants, souvent en grandes difficultés, ou va-t-on
mettre en oeuvre un véritable plan de reconstruction urbaine associant ces
habitants au devenir de leur vie personnelle ? J'aimerais connaître la position
du Gouvernement en la matière. M. le président. La parole est à Mme la secrétaire
d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances. Mme Catherine
Vautrin, secrétaire d'Etat à l'intégration et à
l'égalité des chances. Monsieur le député, plusieurs axes de la politique
volontariste conduite par le Gouvernement, et plus particulièrement par
Jean-Louis Borloo, ont pour objectif de lutter contre les phénomènes de
ségrégation sociale et spatiale que vous venez d'évoquer. Le programme de rénovation urbaine décidé par le
Gouvernement à travers la loi de programmation pluriannuelle du 1er août 2003 a
pour objectif d'agir de façon massive contre les phénomènes de ségrégation
sociale et spatiale dont souffrent les quartiers d'habitat social. Les
opérations de démolition de logements sociaux entreprises dans le cadre des
projets de rénovation urbaine obéissent à un principe de reconstitution globale
de l'offre démolie. Cette reconstitution de l'offre en
logements sociaux - selon le principe " un logement reconstruit pour un logement
démoli " - doit par ailleurs être envisagée au niveau de la commune ou de
l'agglomération dans l'optique d'une plus grande diversité tant dans sa
composition sociale que dans sa répartition spatiale afin d'éviter de recréer
des phénomènes de ségrégation. Dans la reconstitution de
l'offre en logements sociaux, l'utilisation du prêt locatif à usage social -
PLUS - est en soi un gage de mixité sociale et d'accueil de ménages à revenus
modestes puisqu'il impose qu'au moins 30 % des locataires aient des revenus
inférieurs à 60 % des plafonds de ressources définis pour l'accès au logement
social. Par ailleurs, la poursuite de la mise en oeuvre
de l'article 55 de la loi SRU oeuvre également à la cohésion sociale et
spatiale. Comme vous le savez, les dispositions de cet article obligent les
communes de plus de 3 500 habitants situées dans une agglomération de plus de 50
000 habitants, ou celles de plus de 1 500 habitants en Ile-de-France, à réaliser
des logements sociaux si ceux-ci représentent moins de 20 % de leur parc de
résidences principales. M.
le président. La parole est à M. François Asensi. M. François Asensi.
Madame la secrétaire d'Etat, n'ayant pas obtenu de réponse précise sur le cas
précis de la cité Fontaine-Mallet à Villepinte, ce que je regrette, je me
bornerai à faire un commentaire. La Seine-Saint-Denis
compte 50 000 demandeurs de logements et de nombreux quartiers en grande
difficulté sociale. Le problème de l'avenir du logement social ne peut donc se
résoudre dans le seul périmètre de ce département. La solidarité de
l'Ile-de-France, la solidarité nationale doivent jouer : nous en avons besoin.
Alors qu'on invite les maires, dont je suis, à pratiquer la mixité sociale, on
ne peut aujourd'hui leur demander d'exclure les familles en difficulté de
Seine-Saint-Denis. Par solidarité et par justice sociale, nous devons au
contraire faire en sorte que ces habitants puissent vivre dans des logements
décents. Pour ma part, en tout cas, je me refuse, en tant que maire, à demander
à des familles, sous prétexte de mixité sociale, de quitter ma ville et -
passez-moi l'expression - d'aller se faire voir ailleurs. Cette question
fondamentale implique une politique du logement bien plus audacieuse que celle
actuellement menée par le Gouvernement. M. le président. La parole est à Mme la secrétaire
d'Etat. Mme la secrétaire
d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances. Monsieur Asensi, le
Gouvernement mesure toutes ces difficultés. C'est d'ailleurs ce qui a prévalu
dans le contexte d'août 2003 puisque l'ANRU est un outil puissant, en termes
tant méthodologiques que financiers, qui permet de réaliser des opérations d'une
ampleur certaine avec pour objectif de travailler pour les communes confrontées
à de grandes difficultés. Soyez-en assuré, la mixité sociale est vraiment une
des priorités du Gouvernement. M. le président. En attendant l'arrivée de M.
d'Aubert, actuellement au Sénat, je suspends la séance quelques minutes.
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