Texte de la QUESTION :
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M. François Loncle attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur l'engagement de la France dans le processus de paix en République démocratique du Congo et dans la région des Grands Lacs africains et sa contribution à la mission d'observation des Nations unies au Congo (MONUC). L'engagement diplomatique de la France, qui s'est inscrit dans la continuité, a fortement aidé au renforcement du mandat de la MONUC, à la mise en place d'un groupe de travail sur l'exploitation illégale des ressources, et à la condamnation de la violation territoriale de la RDC. Cependant la contribution financière et humaine de la France à la MONUC est faible par rapport à la force de son intervention diplomatique. En effet, au 2 août 2002, les effectifs de la MONUC représentaient un total de 4 180 hommes, dont 3 595 militaires, 482 observateurs militaires et 180 personnels d'appui. 6 militaires seulement étaient français, et 31 civils, mais qui ne dépendaient pas du ministère des affaires étrangères ; une aide logistique au contingent sénégalais de 477 hommes était fournie par la France. En outre, jusqu'à ce jour, la contribution financière française au processus de démilitarisation, rapatriement et réinsertion n'était que de 3 millions d'euros, ce qui est peu par rapport aux besoins, estimés par la Banque mondiale à 500 millions d'euros, et par rapport à l'engagement et aux responsabilités de notre pays dans la région des Grands Lacs. Aussi, afin que les récentes avancées vers la paix ne restent pas vaines et que la situation ne bascule pas à nouveau dans le bain de sang qu'ont connu ces pays, la mission de la MONUC doit impérativement être renforcée et élargie. En conséquence, il lui demande quels moyens humains, financiers et logistiques seront mis à disposition de la MONUC pour 2003 et après, quelles positions défendra la France auprès du Conseil de sécurité sur le fonctionnement et le rôle de la MONUC et quelles mesures il compte prendre pour favoriser un commerce et une exploitation éthiquement corrects des ressources naturelles de la RDC par les acteurs économiques.
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Texte de la REPONSE :
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Le 4 décembre 2002, le Conseil de sécurité a adopté à l'unanimité la résolution 1445. Ce texte, d'origine française, autorise l'augmentation des effectifs militaires de la mission de l'organisation des Nations unies en République démocratique du Congo (MONUC) de 5 500 à 8 700 hommes. Il met ainsi la MONUC, conformément aux dernières recommandations du secrétaire général de l'ONU, en mesure de s'engager pleinement dans les opérations de désarmement, démobilisation, rapatriement ou réinstallation, et réinsertion des groupes armés étrangers présents sur le territoire congolais (DDRRR). Ces opérations étaient jusqu'alors, faute pour la MONUC de disposer des capacités suffisantes, limitées à des actions ponctuelles bénéficiant de financements ad hoc. Nous avons de ce point de vue tout lieu de nous réjouir de l'adoption de la résolution 1445, en faveur de laquelle la France a joué un rôle très actif au Conseil de sécurité. Elle autorise en effet, au titre du maintien de la paix, une augmentation déterminante de notre contribution au budget de la MONUC, qui s'élevait déjà à plus de 42 millions de dollars en 2002 (année civile). A ce montant s'ajoutent, s'agissant de l'appui apporté par la France à titre national aux opérations de DDRRR, une contribution de 2 millions d'euros pour le programme régional (couvrant neuf pays) de la Banque mondiale, une convention d'un million d'euros signée avec le programme des Nations unies pour le développement afin de financer des projets d'aide en RDC, notamment en liaison avec la MONUC, et un nouveau fonds social de développement (FSD) de 3 millions d'euros dont les deux tiers seront consacrés à des projets de réinsertion et réinstallation. Le renforcement des effectifs de la MONUC permettra donc à cette dernière d'intensifier les opérations de DDRRR dans l'Est congolais. Les Nations unies ont d'ores et déjà commencé à identifier les États dont les forces armées seront disponibles pour contribuer en hommes aux contingents devant s'y déployer. La France a dans ce contexte accepté de désigner l'officier général qui sera chargé du poste de commandement avancé, à Kisangani. Le programme de DDRRR ne vise cependant qu'à inciter les intéressés à rendre leurs armes volontairement. Plus que du concours de la MONUC, sa réussite continue par conséquent de dépendre des États concernés - en particulier le Rwanda - quant aux conditions dans lesquelles les combattants et les membres de leurs familles seront rapatriés et accueillis à leur retour. Dans ce contexte, il est également important que les Nations unies poursuivent leurs autres missions, et continuent en particulier à vérifier la réalité du retrait des forces armées étrangères de RDC. Le mandat des observateurs militaires de la MONUC est à cet égard très limité par la nécessité dans laquelle ceux-ci sont de solliciter, à chaque fois, une garantie de sécurité préalable de la part des belligérants qui doivent être contrôlés. Aussi la France approuve-t-elle l'idée que la force d'intervention devant être déployée à Kindu, qui disposera d'hélicoptères militaires, puisse voir son mandat élargi à l'observation. La France a eu, dans le passé, l'occasion d'indiquer à de nombreuses reprises que le renforcement des effectifs de la MONUC, en particulier dans l'est du pays, et l'intensification des opérations de DDRRR pourraient aider à une stabilisation de la situation en RDC. C'est dans ce sens que le ministre des affaires étrangères s'est exprimé lors de sa tournée dans la région des Grands Lacs en septembre dernier, et plus particulièrement à Kinshasa, où il a notamment rencontré tous les responsables de la MONUC. Bien entendu, cet objectif ne sera pleinement atteint que si les parties coopèrent avec la communauté internationale, renoncent à l'action armée et à toute forme de provocation, et respectent leurs engagements, notamment à l'égard de la protection qu'elles doivent aux populations civiles. La France demeure à cet égard préoccupée devant les conséquences humanitaires très graves du conflit sur les populations, qui en sont les premières victimes. Les affrontements qui se sont poursuivis dans l'est du pays, malgré la conclusion, le 17 décembre dernier à Pretoria, d'un accord entre Congolais en faveur d'institutions transitoires d'union nationale, doivent cesser. L'aide humanitaire doit pouvoir parvenir sans entrave, comme le demande la résolution 1445, aux populations qui en ont besoin. Dans ce contexte particulièrement délicat, les parties doivent également s'acquitter des responsabilités qui leur sont reconnues pour garantir le respect des droits de l'homme dans les territoires sous leur contrôle. S'agissant enfin de l'exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC, et en particulier de celles des régions orientales du pays, le groupe d'experts nommés par le secrétaire général des Nations unies a rendu le 16 octobre dernier son rapport final. Ce document confirme notamment de quelle façon le pillage massif auquel se sont livrées les armées « non invitées » a évolué vers une exploitation systématique du patrimoine naturel congolais. Il comprend aussi, pour la première fois, une liste d'individus et d'entreprises impliqués dans ces trafics. La France est à l'origine de la création de ce groupe d'experts. Son objectif est de mettre un terme à cette exploitation illégale, non seulement parce qu'elle est moralement inacceptable, mais aussi parce qu'elle constitue aujourd'hui un des moteurs du conflit dans la région africaine des Grands Lacs. Trois mois supplémentaires ont donc été donnés aux experts pour compléter leur rapport en vérifiant les indications qu'il contient avec les intéressés. Leur prochain rapport nous permettra de disposer d'une nouvelle évaluation des activités de ceux qui ont été mis en cause, à la lumière des précisions que ces derniers auront fournies, et des évolutions que les experts auront eux-mêmes constatées sur le terrain. Les Etats, organismes ou individus en question pourront ainsi le cas échéant se disculper ou s'amender, sauf à s'exposer à faire l'objet d'éventuelles mesures de la part de la communauté internationale pour les y contraindre.
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