Texte de la QUESTION :
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M. Bernard Madrelle attire l'attention de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes sur une nouvelle catégorie d'emplois précaires utilisée de plus en plus souvent comme variable d'ajustement en lieu et place des intérimaires et des CDD, voire comme substitut efficace et peu onéreux au recrutement d'un salarié permanent : les stagiaires. Conçus au départ comme une immersion à visée pédagogique dans l'univers professionnel, fonctionnant à la manière d'un sas entre le monde universitaire et le monde du travail, les stages sont devenus une étape obligatoire dans le parcours des étudiants : le Conseil économique et social chiffre leur nombre annuel à 800 000 et l'APEC estime que 50 % des diplômés de niveau bac+4 ont effectué au moins trois stages pendant leur cursus. Mais, face à une conjoncture économique difficile et dans un contexte de chômage massif des jeunes, leur vocation initiale s'est progressivement altérée. Les entreprises se sont intéressées à ce vivier de main-d'oeuvre zélée, surdiplômée et dont la rémunération n'est pas obligatoire. Dans le meilleur des cas, un stagiaire peut espérer une « gratification » égale à 30 % du SMIC, soit 365 euros. L'arrêté du 20 décembre 1986, qui exonère de cotisations sociales l'employeur offrant des indemnités inférieures à ce montant, induit un véritable effet de seuil. Des grands groupes aux PME, en passant par les cabinets d'avocats, les secteurs de la communication, des médias, de la publicité, de la culture, de l'édition ou le milieu associatif, la tentation est forte de mettre à contribution cette force de travail tellement avantageuse en oubliant l'alinéa 3 de l'article 23 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui stipule : « Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante ». Tels qu'ils se sont développés et dévoyés, les stages se transforment en outils de précarisation et fragilisent l'insertion des jeunes en même temps que celle des chômeurs. Pour lutter contre les emplois déguisés et l'exploitation d'un sous-salariat privé des droits les plus élémentaires, les stagiaires réclament un statut. Il lui demande donc comment il entend répondre à leurs revendications.
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Texte de la REPONSE :
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L'attention du Gouvernement a été appelée sur le statut des stagiaires en entreprise. Fin 2005, les représentants du mouvement de stagiaires « génération précaire » ainsi que les représentants des organisations syndicales de salariés et d'employeurs ont été reçus au ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Le ministre de l'enseignement supérieur a consulté pour sa part les représentants des établissements d'enseignement et les organisations syndicales d'enseignants et d'étudiants. Le Gouvernement est favorable au développement du stage en entreprise dans le cadre des cursus scolaires ou universitaires. Cependant, l'existence de certaines pratiques abusives telles que les emplois déguisés en stages ne saurait être admise. Le stage a comme seuls objectifs la formation et l'ouverture sur l'entreprise et n'a en aucun cas vocation à pourvoir des emplois permanents dans l'entreprise. C'est pourquoi, afin de prendre en compte justement la valeur des stages, la loi relative à l'égalité des chances prévoit une gratification obligatoire pour les stages en entreprise d'une durée supérieure à trois mois. De plus, la signature d'une convention de stage tripartite est rendue obligatoire, ce qui a pour effet de ne rendre possible l'accès au stage qu'aux étudiants et, de ce fait, de limiter fortement les risques de dérives. En revanche, le Gouvernement n'est pas favorable à la création d'un statut qui conduirait à brouiller les frontières entre le stagiaire, qui est un étudiant qui se consacre lors de son stage à sa formation et à son rapport, et le salarié, qui accomplit une activité productive, placé sous la subordination de son employeur. C'est pourquoi le Gouvernement a proposé que soit négociée entre les organisations patronales, les établissements d'enseignement supérieur et l'État une charte des stages étudiants en entreprise. Un groupe de travail, composé de représentants des employeurs, des établissements d'enseignements supérieurs et des étudiants a permis l'élaboration de cette charte qui a été signée le 26 avril 2006. Le suivi et l'évaluation de l'application de cette charte feront l'objet d'une attention toute particulière. Cet ensemble améliorera la sécurité juridique tant du stagiaire que de l'entreprise et conduira à mettre en place un système vertueux dans lequel chaque partie sera consciente de ses droits et obligations.
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