Texte de la REPONSE :
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SITUATION DE L'ENTREPRISE ATOFINA DE JARRIE EN ISÈRE le président.
La parole est à M. Gilbert Biessy, pour exposer sa
question, n° 810, relative à la situation de l'entreprise Atofina de Jarrie en
Isère. M. Gilbert
Biessy. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à
l'industrie. Lors de sa dernière assemblée, le groupe
Total a annoncé une réorganisation de sa branche chimique Atofina par la
création d'une " entité décentralisée regroupant les actifs de la chlorochimie,
des intermédiaires et des produits de performance ", dénommée CIP, et qui aura
vocation à devenir un acteur " compétitif et indépendant ". Toujours selon
Total, la CIP aura pour priorité " le redressement de ses résultats ". Spécialisée depuis le début du siècle dans la fabrication
du chlore et de ses dérivés, l'usine Atofina de Jarrie dans l'Isère, située dans
le Sud grenoblois, emploie 740 salariés et induit près de 3 000 emplois. De grandes inquiétudes pèsent sur les ateliers de
production concernés : ceux de chlore - 160 000 tonnes par an et une centaine de
salariés sur les 740 de l'entreprise -, de dichloréthane et de chlorure de
méthyle. Après le transfert du centre de recherche sur
le site de Lyon, deux ateliers consommateurs de chlore ont été arrêtés. Par
ailleurs, aucun nouvel investissement n'est effectué en faveur des produits
issus du chlore. En outre, la fabrication par
électrolyse mercure, procédé jugé dangereux, sera prochainement interdite dans
toute l'Europe. Son remplacement rendu possible par un procédé à membranes moins
polluant est jugé trop onéreux par Atofina alors que ce nouveau procédé a été
mis en place dans d'autres pays européens, notamment l'Angleterre, grâce à des
aides de l'État. Les cinq redresseurs à pyralène -
produits à base de dioxyne - situés en bordure de la route nationale 85, doivent
être, quant à eux, déplacés à l'intérieur du site et remplacés par des appareils
contenant des huiles minérales avant 2010, dans le cadre d'une directive
européenne. À ce jour, aucun projet de déplacement n'est envisagé. Ces trois dernières années, onze sites ou ateliers non
compétitifs ont déjà été fermés en France et treize à l'étranger. Aujourd'hui, les menaces de tous ordres qu'engendre le
désengagement programmé du groupe Total de sa branche chimique ne laissent pas
d'inquiéter les employés, les élus et les populations qui craignent une
fermeture programmée du site de Jarrie. Alors que ce
site possède de nombreux atouts, notamment un savoir-faire reconnu et un
établissement particulièrement bien accepté dans son environnement, le ministre
délégué à l'industrie peut-il nous donner l'assurance que le site Atofina de
Jarrie poursuivra ses activités ? Quelles dispositions compte-t-il prendre afin
que le groupe respecte ses obligations dans le cadre des directives européennes
? M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire. M. Dominique
Bussereau, secrétaire d'État au budget et à la
réforme budgétaire. Monsieur Biessy, je vous prie d'excuser l'absence de mon
collègue en charge de l'industrie, M. Devedjian, qui m'a demandé de vous faire
connaître la réponse qu'il aurait souhaité vous apporter lui-même. Comme vous l'avez mentionné, Total a annoncé en février
dernier la réorganisation de sa branche chimie et la création d'une entité
autonome, au sein de laquelle la chlorochimie, les intermédiaires, et les
produits de performance seront regroupés. L'établissement de Jarrie, qui vous
est cher, monsieur Biessy, sera donc rattaché à cette nouvelle société. Ainsi que Patrick Devedjian a eu l'occasion de l'indiquer
la semaine dernière ici même, le Gouvernement considère que cette création
représente plus une opportunité qu'une menace pour la chimie de Total. Total
constate depuis plusieurs années que la façon dont sa branche chimie est
structurée représente un frein au développement tant des activités pétrolières
que des activités chimiques elles-mêmes, parce que les marchés financiers ont du
mal à appréhender une chimie non seulement inhabituellement lourde pour un
groupe pétrolier, mais surtout très hétéroclite, car - vous le savez - elle est
issue d'opérations industrielles et de fusions successives. La direction de l'entreprise Total a donc toujours tenu un
discours très clair sur sa volonté de conserver une chimie forte comme sur son
intention de recentrer l'ensemble dont elle était l'héritière. Ce constat, généralement partagé, permet d'envisager deux
méthodes : ou la vente progressive " par appartements " - si vous me permettez
l'expression -, comme cela avait commencé d'être fait dans les années passées,
ou la création en une seule opération d'un ensemble industriel cohérent et
capable de vivre sa vie économique. C'est la seconde option - vous le savez -
qui a été choisie. Le Gouvernement est convaincu que c'est celle qui donne à la
chimie de Total le meilleur potentiel de croissance. Le
portefeuille confié à la nouvelle entité sera constitué d'actifs de premier
ordre, dans lesquels Atofina occupe des positions enviables au plan mondial. La
nouvelle société totalisera 5 milliards d'euros de chiffre d'affaires, ce qui la
placera très près, notamment, de Rhodia, l'autre grand chimiste français. Elle
emploiera 20 000 personnes dans le monde dont 12 000 en France. Surtout, elle
bénéficiera d'un endettement très faible, sans doute bien inférieur à celui de
ses concurrents, ce qui constituera pour elle, monsieur Biessy, un atout
exceptionnel. L'unité de Jarrie, quant à elle, qui
emploie 740 personnes et est spécialisée dans la production du chlore et de ses
dérivés, devra faire un choix stratégique important, puisque les conventions
environnementales internationales recommandent l'abandon, à partir de 2010, de
la technologie qu'elle utilise actuellement, fondée sur l'utilisation de
mercure. La décision d'investir dans une autre
technologie appartient à la direction de l'entreprise. À notre connaissance,
aucune orientation, ni dans un sens ni dans l'autre, n'a été prise à ce stade.
Le Gouvernement reste très attentif à ce sujet, qui, certes, concerne Jarrie,
mais plus généralement toute l'industrie du chlore, qui emploie 6 000 personnes
en France. De manière générale, la chimie française doit
actuellement faire face à de multiples enjeux, notamment la mondialisation, la
recomposition capitalistique et l'environnement, dont l'exemple que vous citez
montre l'importance pour certaines branches. C'est la
raison pour laquelle le ministre chargé de l'industrie a annoncé la semaine
dernière la mise en place d'un groupe stratégique, qui rassemblera chefs
d'entreprise et syndicats. Ce groupe devra rendre des propositions concrètes
pour la fin de l'année 2004, en vue de préserver et d'améliorer, si possible, la
compétitivité de notre industrie chimique dans les dix ans à venir. Monsieur Biessy, le Gouvernement restera donc très attentif
au sort du site industriel de Jarrie dans le cadre de cette réflexion. M. le président. La
parole est à M. Gilbert Biessy. M. Gilbert Biessy. Monsieur le secrétaire d'État,
je vous remercie de m'avoir transmis la réponse de M. le ministre délégué à
l'industrie. À l'entendre, CIP constitue un ensemble
industriel cohérent qui devrait représenter un atout exceptionnel. Mais sur les
questions précises liées aux directives européennes sur la sécurité, le
Gouvernement se contente de rester attentif. Ne pourrait-il par se montrer
incitatif à l'égard du groupe Atofina ?
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