Texte de la QUESTION :
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M. Dominique Dord appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la loi intitulée justice et paix votée par le Parlement colombien. En officialisant les démantèlements des groupes paramilitaires sous condition d'une amnistie générale, équivalente à une impunité totale et sans condition de réparation, cette loi risque d'organiser le retour des paramilitaires dans le giron de l'État, ce qui à l'évidence ne sera pas sans conséquences sur la situation intérieure du pays. Il ne faudrait pas que le processus de démobilisation des paramilitaires conduise à leur impunité et, indirectement, à une certaine tolérance aveuglée et faussement innocente de leurs activités illicites. Certes, il est essentiel d'encourager les groupes illégaux armés à déposer les armes pour faire régner la paix, mais il ne faudrait pas que ces incitations se fassent au détriment de la justice, qui exige des réparations aux victimes et des sanctions pour les auteurs de crimes. Bien conscient de la difficulté à trouver cet équilibre, il lui demande comment la France entend prolonger son action en faveur d'une paix civile et durable en Colombie.
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Texte de la REPONSE :
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La loi « justice et paix », adoptée par le Congrès colombien le 21 juin et promulguée par le Président Alvaro Uribe le 25 juillet pour démobiliser les « groupes armés illégaux » -, qu'il s'agisse des paramilitaires ou des mouvements de guérilla - a fait l'objet des conclusions adoptées par le conseil affaires générales (CAG) de l'Union européenne (UE) le 3 octobre dernier. Ces conclusions définissent le cadre d'action de l'UE et proposent sur ce texte un point de vue nuancé. Le Conseil a ainsi pris note de différentes réserves, exprimées notamment par le Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCNUDH) : importance insuffisante accordée à la nécessité d'un démantèlement effectif des structures paramilitaires collectives ; distinction imprécise entre les délits « politiques » et les autres types de délits ; peu de temps disponible pour enquêter sur les aveux et sur les avoirs susceptibles de provenir d'activités illicites ; possibilités réduites offertes aux victimes de demander réparation ; peines maximales limitées pour les délits les plus graves ; difficultés pour le système juridique colombien à répondre aux exigences de la nouvelle loi. L'Union européenne a affirmé en conséquence que la loi nécessite d'être mise en oeuvre de façon effective et transparente et a décidé d'apporter une coopération aux groupes de victimes pour appuyer la mise en oeouvre de la loi. À la suite de la définition de cette position commune, et dans le prolongement des conclusions du Conseil, la France a affirmé de façon constante, auprès de ses partenaires européens, la nécessité d'une particulière attention concernant la mise en oeuvre de la loi « justice et paix », en liaison notamment avec les Nations unies et la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Elle a souligné également la nécessaire vigilance de l'ensemble de la communauté internationale, afin que la loi adoptée par le Congrès colombien puisse apporter, dans le respect des principes de justice, de vérité et de réparation, une pleine contribution à la recherche de la paix en Colombie. À ce stade, il semble notamment indispensable, avant que l'UE ne s'engage plus avant dans une éventuelle assistance au Gouvernement colombien ou à l'Organisation des États américains, qu'il soit procédé à une évaluation exhaustive de la mise en oeuvre de la loi « justice et paix », afin de déterminer si celle-ci se réalise de manière effective et transparente, comme le prévoient les conclusions du CAG du 3 octobre.
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