Texte de la QUESTION :
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M. Gérard Voisin attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés d'interprétation par le ministère public de l'article 433-3 du code pénal et, plus particulièrement, de son 4e alinéa. Il constate, en effet, que les apports des dispositions de l'article 433-3 se trouvent très largement diminués dans la pratique et lui demande de bien vouloir préciser si, d'une part, « les menaces » relèvent nécessairement d'un délit déjà punissable par un autre texte et si, d'autre part, les « violences » considérées portent exclusivement sur atteintes a l'intégrité physique des personnes et en aucun cas des violences morales ou des atteintes à la dignité des fonctions ou des personnes, et, enfin, si les « actes d'intimidation » peuvent être constitués de faits non délictueux. Il remercie le Gouvernement de bien vouloir apporter les précisions relatives à l'interprétation de ce texte, précisions de nature à renforcer l'efficacité de ce dispositif visant à protéger l'exercice de certaines fonctions et mandats.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, expose à l'honorable parlementaire que l'article 433-3 du code pénal - ainsi que l'article 434-8 du même code qui définit dans des termes proches le délit de menaces ou d'actes d'intimidation commis envers des magistrats - ne précise pas la notion même de menace. Cependant, alors que les alinéas 1 et 2 de l'article 433-3 visent « la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens », l'alinéa 4 s'en tient à la seule notion de « menace ». A contrario, et sous réserve de l'interprétation souveraine des juridictions de jugement, il est possible de considérer que la menace de commettre un simple fait de nature contraventionnelle est constitutif de l'infraction prévue à l'article 433-3, alinéa 4. De même, le fait que la rédaction de l'alinéa 4 ne vise pas expressément la menace de commettre un crime ou un délit dont la tentative est punissable laisse supposer que la qualification serait applicable à des menaces de commettre tout type de délit ou de contravention, y compris des violences. En tout état de cause, il est certain que la notion de menace telle qu'elle est entendue dans la rédaction de l'article 433-3 alinéa 4 du code pénal se définit aussi en fonction de l'intention de l'auteur, l'acte matériel devant démontrer la volonté de celui-ci d'obtenir du dépositaire d'une fonction publique qu'il commette un trafic d'influence. La notion de violences doit être entendue dans le même sens que celui des articles 222-7 à 222-13 du code pénal. Sont ainsi visés non seulement les actes qui incluent un contact physique entre l'auteur et la victime, mais encore les actes qui, sans atteindre matériellement la personne, sont de nature à provoquer un choc psychologique. S'agissant enfin de ce qu'il convient d'entendre par « tout autre acte d'intimidation », il convient de souligner que la jurisprudence en retient une définition large. La chambre criminelle de la Cour de cassation a ainsi considéré qu'un acte d'intimidation pouvait être constitué par « l'action concertée de plusieurs personnes, de nature à empêcher un officier ministériel d'accomplir sans le concours de la force publique, un acte de sa fonction ». En l'espèce, « l'action concertée » avait été caractérisée par la cour d'appel comme « la détermination des prévenus à rester groupés à la sortie d'un appartement dont l'occupant était expulsé, et à empêcher tout passage des meubles » (Crim., 18 mai 1999, Bull. crim. n° 98). Au terme de ces développements, le garde des sceaux souhaite souligner à l'attention de l'honorable parlementaire que les dispositions de l'article 433-3 alinéa 4 du code pénal sont de nature d'assurer une parfaite protection juridique des personnes qui, dans le cadre de l'exercice de leur fonction publique, peuvent être victimes de menaces ou de violences ou d'actes d'intimidation dans le but de les contraindre à commettre un trafic d'influence.
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