FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 84398  de  M.   Santini André ( Union pour la Démocratie Française - Hauts-de-Seine ) QE
Ministère interrogé :  défense
Ministère attributaire :  anciens combattants
Question publiée au JO le :  31/01/2006  page :  833
Réponse publiée au JO le :  04/04/2006  page :  3650
Date de changement d'attribution :  14/02/2006
Rubrique :  pensions militaires d'invalidité
Tête d'analyse :  bénéficiaires
Analyse :  déportés juifs. conditions d'attribution
Texte de la QUESTION : M. André Santini attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur la situation des déportés juifs devenus français après la guerre. En l'état actuel du droit, un déporté juif devenu français après la guerre ne peut pas bénéficier d'une pension au titre de victime de guerre. Il n'existe pas dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de le guerre de dispositions spécifiques sur les déportés juifs. Il convient de les assimiler soit à des déportés politiques (art. L. 286), soit à des personnes contraintes au travail (art. L. 308). Les décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004 ont cependant reconnu une indemnisation aux orphelins de moins de vingt et un ans dont les parents français ou déportés du territoire français ont été victimes de persécutions antisémites ou d'actes de barbarie. Avant 1998, le code imposait d'avoir été français au moment de la déportation et non pas seulement au moment de la demande de pension. C'est le Sénat qui a proposé un article 62 dans la loi de finances de 1998 ouvrant droit à pension aux étrangers résidents en France au moment de la déportation et devenus français par la suite. Á ce jour, les étrangers devenus français après la guerre qui ont été déportés dans un pays étranger sont toujours exclus du droit à pension. Quatre cents enfants déportés à Buchenwald ont été recueillis par la France et bon nombre d'entre eux ont acquis la nationalité française. Pourtant, ils ne peuvent pas bénéficier du statut de déporté hors de France car ils n'étaient ni français, ni résident français au moment de leur déportation. La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) a été saisie par le président de Mémoire 2000 et par l'ambassadeur itinérant au ministère des affaires étrangères en charge de la dimension internationale de la Shoah. La HALDE a rendu un avis favorable pour que le code soit réformé, en se fondant sur l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme « qui prohibe toute discrimination fondée sur l'origine nationale dans la jouissance du droit de toute personne au respect de ses biens ». Il souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour remédier à cette situation. - Question transmise à M. le ministre délégué aux anciens combattants.
Texte de la REPONSE : Le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre distingue deux catégories de déportés, les déportés politiques et les déportés résistants. Les déportés en raison des persécutions antisémites sont assimilés aux déportés politiques. La législation, élaborée dès 1948, prévoit que les personnes déportées pour des motifs politiques ou « raciaux », de nationalité française au moment des faits et de leur demande de pension, peuvent demander à bénéficier d'une pension d'invalidité quel que soit le pays à partir duquel elles ont été déportées. L'article 106 de la loi de finances pour 1998 donne droit au statut et à la pension de déporté politique à tous les étrangers naturalisés français et déportés à partir de la France quelle que soit leur date d'arrivée sur le territoire. Les déportés de nationalité étrangère aux moments des faits, mais qui ont acquis la nationalité française après la guerre, ne peuvent, en revanche, pas demander à bénéficier d'une pension d'invalidité s'ils ont été déportés depuis un autre pays que la France. Dans sa délibération du 19 septembre 2005, le collège de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) estime que, compte tenu de la finalité de cette pension d'invalidité, l'exclusion de ces personnes de nationalité étrangère au moment de leur arrestation et de leur déportation ne semble pas reposer sur des justifications objectives et raisonnables en lien avec cette finalité. De l'examen de cette délibération et de l'étude des textes en vigueur, il ressort que cette exclusion ne repose pas, en effet, sur des justifications objectives et raisonnables, tant au regard de l'article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 qui garantit la jouissance des droits et libertés sans distinction aucune, fondée notamment sur l'origine nationale ou sociale, que des jurisprudences du Conseil d'Etat et de la Cour européenne des droits de l'homme. Le caractère spécifique qui s'attache à la législation relative à la déportation au sein du droit français et la jurisprudence du Conseil d'État, pour ce qui concerne l'application de l'article 14 de la convention précitée, semble favorable à une mesure législative modifiant l'article L. 252-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permettant aux déportés de nationalité étrangère au moment des faits, qui ont acquis la nationalité française après la guerre, et déportés depuis un autre pays que la France, de bénéficier, ainsi que leurs ayants cause, d'une pension d'invalidité. La mise en oeuvre d'une telle mesure nécessite, néanmoins, une concertation interministérielle pour soumettre un projet de loi au Parlement. Tels sont les éléments que le ministre délégué aux anciens combattants a communiqué au président de la HALDE en réponse à sa demande.
UDF 12 REP_PUB Ile-de-France O