Texte de la QUESTION :
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M. Georges Hage attire l'attention de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes sur les premiers effets visibles et désastreux du contrat nouvelle embauche (CNE). Ce nouveau dispositif est en place depuis six mois. Il est destiné aux entreprises de moins de 20 salariés et permet aux employeurs de se séparer d'un salarié sans motif pendant deux ans. D'ores et déjà, des dizaines de personnes bénéficiaires de ce contrat ont été remerciées sans aucune raison à travers tout le pays et plusieurs d'entre elles s'apprêtent à saisir ou ont saisi les conseils de prud'hommes. Á Grenoble, un serveur a été remercié après avoir annoncé à son employeur qu'il devait subir une intervention chirurgicale. Le même sort a été réservé à un salarié agricole en Gironde après avoir réclamé le paiement de ses heures supplémentaires. Un autre a été licencié le lendemain du jour où il était arrivé avec dix minutes de retard pour prendre son poste. Le contrat première embauche en direction des jeunes fonctionnant sur le même mode produira des effets similaires. Nous comprenons mieux pourquoi le MEDEF, fort de cette expérience, réclame la fin des contrats à durée indéterminée et un contrat unique de travail offrant les mêmes caractéristiques que le CNE. Nous sommes entrés dans une spirale dangereuse pour le droit au travail et la protection des salariés. La précarité est en passe d'être élevée au rang de norme avec toutes les conséquences économiques et sociales qui s'ensuivront. Nul ne peut ignorer qu'il s'agit là d'une formidable régression mais aussi d'une menace pour l'économie. Le ressort essentiel de notre faible croissance repose sur la consommation. La précarisation du travail ne peut qu'entraîner une diminution du pouvoir d'achat, l'impossibilité pour les salariés, appelés à être de plus en plus nombreux, de prévoir leur avenir et donc de consommer et d'investir. Cela aura des répercussions sur la demande et donc sur la production, sur les services et sur l'emploi. Il souhaite que le Gouvernement tire les leçons du CNE et renonce à avancer plus loin dans cette voie dangereuse.
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Texte de la REPONSE :
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L'attention du Gouvernement a été attirée sur l'effet sur l'emploi des CNE et les contentieux. L'objectif poursuivi par le législateur en habilitant le Gouvernement à instituer par voie d'ordonnance le CNE était d'inciter les petites entreprises à recruter. Les petites entreprises sont particulièrement exposées aux fluctuations d'activité. De ce fait, elles hésitent à accroître leurs effectifs. Ceci est particulièrement regrettable car les entreprises de moins de 20 salariés représentent 2,5 millions d'employeurs, c'est-à-dire un vivier d'emploi important. Vivier d'autant plus important que 1,5 million de ces entreprises n'ont pas de salarié. Or, ce sont ces chefs d'entreprise qui hésitent à embaucher. Ils craignent en effet les incertitudes liées à l'évolution du marché et les difficultés juridiques et financières qu'entraînerait une rupture du contrat de travail. Le contrat nouvelle embauche (CNE) répond aux besoins des petites entreprises, celles-ci ayant effectivement embauché massivement en CNE. Les 440 000 intentions d'embauches recensées par les URSSAF entre août 2005 et mars 2006 en CNE se sont concrétisées. D'après une enquête réalisée par la DARES en collaboration avec l'ACOSS et publiée le 14 juin 2006, les responsables d'entreprise considèrent que le CNE a eu un impact substantiel sur leurs embauches d'octobre. 30 % d'entre elles n'auraient pas eu lieu sans ce nouveau contrat de travail. Dans 20 % des cas, les chefs d'entreprise auraient peut-être embauché plus tard sous un autre contrat de travail si les perspectives d'activité s'étaient confirmées ou s'ils avaient rencontré un profil plus adapté au poste offert. L'embauche n'aurait, en tout état de cause, jamais eu lieu dans 10 % des cas. Ce sont ainsi entre 44 000 et 132 000 emplois supplémentaires qui ont vu le jour depuis le mois d'août 2005, sans aucun coût pour les finances publiques. En outre, le CNE assure une vraie stabilité dans l'emploi puisque les ruptures à l'initiative de l'employeur sont peu nombreuses (11,4 %). Si le CNE est un contrat de travail dont les modalités de rupture sont adaptées pendant une période de consolidation, ce contrat n'est pas zone de non-droit permettant les licenciements abusifs pour des motifs arbitraires. Les premiers jugements des conseils des prud'hommes en sont la preuve. Des montages divers de renouvellement des contrats aux seules fins d'échapper aux exigences du code du travail ont été sanctionnés au titre de l'abus de droit (jugement du Conseil des prud'hommes de Longjumeau du 20 février 2006). De même, les dispositions dérogeant à l'exigence de motivation du licenciement et d'une cause réelle et sérieuse ne sont pas une invitation à l'arbitraire, puisque les garanties essentielles de notre ordre public social s'imposent.
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