FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 89100  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  affaires européennes
Ministère attributaire :  affaires européennes
Question publiée au JO le :  21/03/2006  page :  2906
Réponse publiée au JO le :  25/07/2006  page :  7761
Rubrique :  Union européenne
Tête d'analyse :  coopération judiciaire
Analyse :  mandat d'arrêt européen. extradition. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de Mme la ministre déléguée aux affaires européennes sur le mandat d'arrêt européen. Cette procédure, mise en place dans l'Union européenne en 2002, semble faire ses preuves, avec quelques 3000 procédures enregistrées en 2004 qui ont conduit à l'arrestation d'un millier de personnes. Des difficultés demeurent cependant en matière d'extradition, l'Allemagne, la Pologne et Chypre refusant d'introduire dans leur législation le renvoi vers un autre pays de leurs détenus nationaux. La République tchèque et les Pays-Bas montrent aussi leur réticence. Aussi, il souhaiterait savoir si elle entend soutenir une harmonisation de la législation en la matière.
Texte de la REPONSE : Les vingt-cinq États membres de l'Union Européenne ont tous transposé dans leur législation nationale la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres. Le premier bilan dressé par la Commission européenne sur l'évaluation de la mise en oeuvre de la décision cadre du 13 juin 2002 se révèle globalement positif. La Commission européenne comptabilise dans son rapport du 24 janvier 2006, sur la période du 1er janvier 2004 - date d'entrée en vigueur de la décision-cadre - au mois de septembre 2004, 2 603 mandats émis, 653 personnes arrêtées et 104 personnes remises. La transmission des demandes par des formulaires standards et la judiciarisation du traitement de ces demandes ont permis une réduction notable de la durée moyenne d'exécution des demandes. La durée minimale de neuf mois sous l'ancien régime d'extradition n'est, en effet, plus que de quarante-trois jours avec le mandat d'arrêt européen, voire de treize jours, en cas de consentement à la remise par l'intéressé. Les difficultés évoquées par l'honorable parlementaire sont liées à la découverte de conflits de normes dans certains États membres. La situation, à cet égard, diffère en Pologne, à Chypre, en République Tchèque et en Allemagne. En Pologne, aux termes de la décision de la Cour constitutionnelle polonaise, une révision de la Constitution sera nécessaire avant novembre 2006, la reconnaissance du mandat d'arrêt ayant été validée à titre « provisoire » : les effets de l'inconstitutionnalité des dispositions litigieuses de la loi de transposition ont été suspendus, ce qui permet ainsi la remise des nationaux. A Chypre, les nationaux ne peuvent être remis, en revanche, tant que la révision constitutionnelle ne sera pas effectuée, compte tenu de l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 7 novembre 2005. L'amendement à la Constitution est actuellement en discussion au Parlement et devrait être adopté en juin, après les élections parlementaires du 21 mai. En République Tchèque, le recours contre la loi de transposition a été rejeté par la Cour constitutionnelle le 4 mai 2006. En Allemagne, l'arrêt de la Cour fédérale constitutionnelle du 18 juillet 2005 qui a annulé la loi de transposition, empêche, juridiquement comme au plan pratique, la mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen, alors même que la question de la révision de la Loi fondamentale n'est pas posée. Le nouveau projet de loi de transposition a été présenté le 27 janvier 2006 et la nouvelle loi pourrait être adoptée cet été. Le mécanisme européen de remise des nationaux, qui constitue une innovation majeure de la décision-cadre, n'est ainsi pas remis en cause. Les problèmes soulevés en Pologne, à Chypre, en République Tchèque et en Allemagne sont en voie de résolution. Une harmonisation des législations nationales en la matière ne paraît, dès lors, pas nécessaire en l'état. La situation aux Pays-Bas est particulière. Elle est liée au fait que les Pays-Bas conditionnent la remise aux fins de poursuites de leurs ressortissants à la garantie qu'ils puissent, s'ils sont condamnés, exécuter sur le territoire néerlandais la peine prononcée dans l'État d'émission. La décision-cadre prévoit bien, dans son article 5 paragraphe 3, cette possibilité de subordonner la remise à l'acception par l'État d'émission de cette garantie, mais ne prévoit aucune modalité d'exécution. Dans ce silence des textes, les Pays-Bas appliquent la convention STCE 112 du 21 mars 1983 du Conseil de l'Europe sur le transfèrement des personnes condamnées dont l'article 9 offre deux modes d'exécution des condamnations : poursuite ou conversion. Une réflexion pourrait s'engager avec nos partenaires européens sur cette question, à l'occasion des conclusions qui seront dégagées par la commission dans son rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de la décision-cadre attendu pour juillet 2006, notamment à la lumière du principe de reconnaissance mutuelle approuvé au Conseil Européen de Tampere les 15 et 16 octobre 1999. Si la décision-cadre offre la possibilité pour l'État membre, destinataire d'un mandat d'arrêt européen aux fins d'exécution, d'exécuter lui-même sur son territoire la peine prononcée à l'égard de ses ressortissants, elle ne précise pas non plus les modalités de l'exécution de la peine. Ce dernier point a, d'ores et déjà, fait l'objet d'une initiative des Républiques d'Autriche et de Finlande et du Royaume de Suède en vue de l'adoption d'une décision-cadre du Conseil concernant l'ordonnance d'exécution européenne et le transfèrement des personnes condamnées entre les États membres de l'Union européenne. Il s'agit notamment d'établir l'obligation de principe pour l'État d'exécution de prendre en charge, aux fins de l'exécution de leur condamnation, même sans leur consentement, ses ressortissants et les personnes qui ont leur résidence habituelle sur son territoire ayant fait l'objet d'une condamnation définitive à une peine privative de liberté. La France, qui demeure attachée à la poursuite de l'exécution de la condamnation, soutient cette initiative et tout particulièrement les dispositions relatives à l'adaptation de la sanction. Elle considère que ces dispositions qui excluent la conversion de la peine constituent, en effet, un élément majeur du projet de décision-cadre du conseil concernant l'ordonnance d'exécution européenne et le transfèrement et contribuent à renforcer la coopération judiciaire pénale européenne.
UMP 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O