Texte de la QUESTION :
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M. Georges Colombier attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que la verbalisation automatique des automobilistes en excès de vitesse pourrait porter atteinte au principe de présomption d'innocence garanti par la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, tout automobiliste verbalisé par un radar automatique doit d'abord payer son amende avant de pouvoir contester. Une telle situation est d'autant plus regrettable que les radars automatiques sont quelquefois à l'origine d'erreurs, et il arrive ainsi que les numéros d'immatriculation soient mal lus. Or, même dans ce cas, l'intéressé est d'abord obligé de payer avant de réclamer ensuite. Il souhaiterait donc qu'il lui indique les solutions qu'il envisage en la matière.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de rappeler à l'honorable parlementaire qu'aux termes de l'article 6 paragraphe 2 de la Convention européenne des droits de l'homme le principe de la présomption d'innocence est défini de la manière suivante : « Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ». Ce principe n'est nullement remis en cause par les dispositions de l'article 529-10 du code de procédure pénale qui prévoient que, dans certain cas, la recevabilité de la contestation de l'infraction par l'automobiliste est subordonnée au versement d'une consignation préalable. Il convient tout d'abord de souligner que le versement d'une consignation préalable n'a pas à être effectué si l'auteur de la contestation est en mesure de justifier du dépôt d'une plainte pour vol, pour destruction du véhicule ou pour usurpation de la plaque d'immatriculation ou encore s'il fournit l'identité de la personne « qui était présumée conduire le véhicule lorsque l'infraction a été constatée ». Cette obligation de consignation ne saurait être analysée comme une remise en cause de la présomption d'innocence dont bénéficie le titulaire du certificat d'immatriculation puisqu'il ne s'agit aucunement de la part de l'automobiliste, d'un aveu de culpabilité et de l'exécution d'une peine. Cette mesure constitue en effet une simple condition de recevabilité de certaines contestations, une exigence procédurale pour accéder au juge. Elle n'a d'autre objet que de prévenir les recours dilatoires. L'article 529-10-2° du code de procédure pénale précise d'ailleurs que « cette consignation n'est pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donne pas lieu au retrait des points ». De même, l'article 530-1 dernier alinéa du même code précise « [qu'] en cas de classement sans suite ou de relaxe, s'il a été procédé à la consignation (...) le montant de la consignation est reversé, à sa demande, à la personne à qui avait été adressé l'avis de paiement de l'amende forfaitaire ou ayant fait l'objet des poursuites ». En outre, illustration supplémentaire que l'exigence du paiement d'une consignation préalable ne constitue qu'une condition pour accéder au juge et non une remise en cause de la présomption d'innocence, l'article 530-1-1° précise que l'officier du ministère public, rendu destinataire de la contestation, ne peut que classer sans suite la procédure ou saisir la juridiction de proximité ou encore rejeter la contestation pour des motifs de recevabilité formelle. L'appréciation du bien-fondé de la contestation ne lui appartient donc pas et est entièrement soumise au juge, ce qui démontre bien qu'on ne saurait tirer aucune conséquence de fond, du paiement de la consignation. Le garde des sceaux tient en outre à faire observer à l'honorable parlementaire que compte tenu de la technologie de lecture optique utilisée pour identifier les plaques d'immatriculation sur les photographies réalisées par les radars, les cas d'erreur sont rares. Dans la très grande majorité des cas, ces « erreurs » d'identification sont en fait de fausses plaques qui reprennent les numéros d'une voiture régulièrement enregistrée par le service des cartes grises. Il peut aussi arriver que le contrevenant ait utilisé l'identité d'une autre personne afin d'obtenir une carte grise pour son véhicule. Dans ces deux cas, ainsi que cela a été mentionné, le titulaire du certificat d'immatriculation qui est rendu destinataire d'un avis de contravention, peut contester l'infraction sans verser de consignation préalable. Le garde des sceaux tient donc à assurer l'honorable parlementaire que le dispositif ainsi prévu respecte ce principe fondamental qu'est la présomption d'innocence.
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